Professionnalisation de la médiation sociale : le texte adopté en première lecture à l'Assemblée nationale
Par Franck Lemarc
« Médiateurs sociaux, socio-culturels, correspondants, de nuit, agents d’ambiance… » Les milliers de personnes qui travaillent aujourd’hui dans ces métiers le font sans cadre juridique précis, puisque, comme l’explique l’auteur de la proposition de loi, Patrick Vignal, déjà auteur d’un rapport sur ce sujet en 2022, « il n’existe pas à ce jour de texte législatif confortant la médiation sociale et reconnaissant son utilité sociale ».
Définition
La proposition de loi du député de l’Hérault, co-signée par des députés aussi bien de droite que de gauche, vise à pallier ce manque. Elle prévoit de créer dans le Code de l’action sociale et des familles un nouveau titre consacré à la médiation sociale, pour, d’abord, définir celle-ci, « ses objectifs, ses modalités d’action et son cadre d’intervention » : « La médiation sociale est un processus de création et de réparation du lien social, ainsi que de règlement des situations conflictuelles de la vie quotidienne. » Le texte précise ensuite que la médiation sociale peut « être mise en place à l’initiative de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements, et de toute personne morale, publique ou privée ».
Le texte prévoit également la mise en place de « référentiels de compétences, de formation et de bonnes pratiques ». Il définit de nouveaux « contrats pluriannuels de développement territorial de la médiation sociale », qui préciseraient « le cadre de la gouvernance et du pilotage du développement territorial de la médiation sociale ainsi que les contributions financières respectives des signataires ». Enfin, le texte prévoit que les charges induites par la médiation sociale pour les collectivités soient compensées par l’État sous forme d’une majoration de DGF.
Conventions avec les collectivités
En commission des lois, les députés ont globalement validé ces dispositions, et ajouté quelques mesures supplémentaires. Ils ont voté la possibilité, pour les collectivités territoriales, de « conclure des conventions pluriannuelles d’une durée maximale de six ans avec les personnes morales qui exercent des activités de médiation sociale certifiées par un organisme indépendant ». Par ailleurs, ils ont prévu que les médiateurs sociaux devront, dans un délai d’un an après leur embauche, « suivre une formation » dont les modalités et le contenu seront définis par décret.
Dernier ajout de la commission : le gouvernement devra, dans les 18 mois qui suivront la promulgation de la loi, établir « un rapport évaluant le nombre réel de postes de médiateurs sociaux » et évaluant « l’opportunité et la faisabilité de financer 7 000 postes supplémentaires de médiateurs sociaux ».
Adultes-relais
Lors du débat en séance publique, hier, le gouvernement a, par la voix de la ministre Catherine Vautrin, d’emblée soutenu cette initiative des députés : « Vous nous proposez un texte grâce auquel nous pourrons préciser le cadre d’intervention de la médiation sociale, confirmer son insertion dans un pilotage territorial, avec une possibilité de financement départemental – j’insiste sur l’importance du terrain –, et renforcer la formation des professionnels. (…) Ces ambitions sont partagées par le gouvernement. »
Les orateurs des différents groupes ont globalement tous soutenu ce texte, bien que certains en dénoncent le « manque d’ambition ».
Au cours de la discussion, huit amendements ont été adoptés, dont deux venant du gouvernement. Celui-ci a notamment proposé de dispenser de la formation obligatoire prévue par la loi un médiateur qui « justifie d’une qualification suffisante ». Par ailleurs, il a modifié la rédaction initiale, qui prévoyait que « les adultes relais exercent cette activité [la médiation sociale] notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et dans les autres territoires prioritaires des contrats de ville ». Le gouvernement a fait supprimé le mot « notamment » et la formule « dans les autres territoires prioritaires des contrats de ville ». Il considère en effet que cette notion manque de précision, puisque la liste de ces territoires n’a pas été redéfinie depuis 2014, alors que les QPV, eux, ont fait l’objet d’un nouveau zonage à la fin 2023. « L’élargissement du zonage aux ‘’autres territoires prioritaires des contrats de ville’’ repose sur une classification datée de dix ans, qui ne correspond plus aux réalités de terrain, et où aucun poste d’adultes-relais n’a été créé depuis le 1er janvier 2015 », a expliqué le gouvernement. « Il est donc nécessaire de revenir à une rédaction qui ne permet le déploiement du dispositif spécifique et propre à la politique de la ville des adultes-relais que dans les seuls quartiers prioritaires de la politique de la ville ».
C’est dans ces termes que le texte a été adopté en première lecture. Il lui reste encore un long chemin à parcourir, puisqu’il ne fait pas l’objet d’une procédure accélérée : il va donc devoir être examiné par le Sénat puis revenir devant les deux chambres pour une nouvelle lecture.
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