Punaises de lit : l'Assemblée nationale s'empare du sujet
Par Franck Lemarc
Le sujet est à la une depuis un mois, même si le phénomène du retour des punaises de lit est bien plus ancien. La présence de ces parasites dans certaines salles de cinéma à Paris, ainsi que des images (plus ou moins vérifiées) de punaises dans les réseaux de transport, les hôpitaux ou les écoles, a alimenté ces dernières semaines un certain emballement médiatique.
Quoi qu’il en soit, le phénomène est bien réel et pourrit la vie de milliers de personnes, tant il est difficile de se débarrasser de ces insectes. D’où la volonté du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale de « s’emparer du sujet, afin de le hisser au rang de priorité de l’action publique ».
Évolutions récentes
Rappelons qu’en mars 2022, un « plan interministériel » avait déjà été annoncé, avec plusieurs axes d’actions, dont « un accompagnement de la filière de détection et de traitement » , une meilleure observation du phénomène, « la clarification des responsabilités entre bailleurs et locataires ». Ce plan n’a eu que peu de retombées concrètes. Notons également qu’en matière de relation entre propriétaires et locataires, une modification législative avait déjà eu lieu en 2020, au moment de la loi Elan, dont l’article 142 impose aux bailleurs de remettre au locataire un logement « exempt de toute infestation d’espèces nuisibles ou parasites » . Les auteurs de la nouvelle proposition de loi notent que « toutes les conséquences de cette clarification n’ont pas encore été évaluées » – façon élégante de dire que cette disposition n'a pas eu d’impact.
Une autre évolution, réglementaire celle-ci, a été décidée l’été dernier : un décret paru au Journal officiel du 30 juillet redéfinit « les règles sanitaires d’hygiène et de salubrité des locaux d’habitation et assimilés » . Ce texte, entré en vigueur le 1er octobre dernier, ajoute notamment au Code de la santé publique cette disposition : « Toutes mesures nécessaires sont prises pour prévenir la prolifération d'animaux causes de nuisances pour la santé humaine, notamment les punaises de lit, dans les locaux d'habitation et, s'il y a lieu et en urgence, pour y remédier. »
La proposition de loi du groupe Renaissance vise à poursuivre le travail de « réponse » à ce phénomène… en particulier à l’approche de JO de 2024 – beaucoup craignent que les images de punaises de lit largement diffusées ces dernières semaines fassent une publicité détestable à la France à un moment où des millions de touristes supplémentaires sont attendus. Les auteurs de la proposition de loi rappellent qu’un nouvel « plan interministériel » est en cours d’élaboration, qui se traduira à la fois par des mesures réglementaires et « des modifications d’ordre législatif » . En attendant, ils prennent les devants en proposant trois mesures d’application relativement simple.
Les trois articles de la proposition de loi
La proposition de loi comporte trois articles.
Le premier vise à améliorer la détection et la cartographie du phénomène, en obligeant les professionnels de la détection et du traitement des nuisibles à déclarer « à l’autorité administrative » toute infestation de nuisibles qu’ils auraient constatée, sous peine d’une amende de 1 500 euros. Pour être efficace, on imagine que cette mesure suppose la création d’une plate-forme centralisée de signalement sur internet.
Le deuxième article s’attaque à un « angle mort » : celui des meublés de tourisme qui, rappellent les auteurs du texte, « ne relèvent ni de la règlementation applicable aux hôtels ni de celle applicable aux baux à usage d’habitation » . Pour combler ce « vide juridique » , l’article 2 impose notamment aux plateformes (type AirBnB par exemple), de mettre en place « une procédure de signalement (…) des infestations d’espèces nuisibles et parasites ».
Enfin, le troisième article concerne directement les maires : il permet à ceux-ci de « définir des règles relatives à la collecte et au traitement des déchets infestés de punaises de lit » , et punit d’une amende de 500 euros tout manquement à ces règles. Il s’agit ici de traiter le problème des personnes qui déposent dans la rue des matelas ou des fauteuils infestés par des punaises de lit, et qui pourraient être récupérés par d’autres personnes, participant ainsi à l’infestation de nouveaux logements.
Ceci dit, on peut s’interroger sur l’utilité d’inscrire cela dans la loi, vu que rien n’empêche un maire, dès à présent, de prendre un arrêté interdisant le dépôt d’objets infestés, ni de mettre en place des modalités spécifiques de collecte des encombrants infestés.
Il est à noter que ce texte n'aborde pas du tout la question du coût financier pour les ménages touchés. En revanche, deux amendements au projet de loi de finances ont été déposés créer un « fonds d'urgence ». L'amendement du groupe Renaissance propose un fonds de 5 millions d'euros pour aider à la désinfection ds foyers les plus modestes. Il est à noter que ces 5 millions d'euros seraient pris sur le budget de la prime d'activité.
La date d’examen de ce texte n’est pas encore fixée. Normalement, le mois de novembre est consacré par priorité à l’examen du projet de loi de finances, mais l’usage du 49.3 par le gouvernement pour faire passer les textes budgétaires sans débat étant apparemment devenu la norme, les députés devraient avoir du temps pour pouvoir examiner d’autres textes.
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
Ce que contient le plan du gouvernement pour ne pas voir « se reproduire les émeutes »
Qualité du réseau mobile : une connectivité qui progresse, mais toujours de façon hétérogène
Services publics : une nouvelle campagne pour trouver un France services près de chez soi