Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 24 juin 2024
Aménagement numérique du territoire

Déploiement de la fibre : de nouvelles mises en demeure contre Orange et XpFibre

L'Arcep a prononcé, le 28 mai dernier, des mises en demeure à l'encontre d'Orange et de XpFibre de respecter l'obligation de complétude des déploiements FttH d'ici au 31 décembre 2025. Dans les territoires urbains et péri-urbains, les opérateurs ne respectent toujours pas leurs engagements.

Par Lucile Bonnin

C’est à l’occasion de la publication la semaine dernière des résultats du suivi du marché des services fixes à haut et très haut débit par l’Arcep qu’il a été indiqué que de nouvelles mises en demeure avaient été prononcés fin mai à l’encontre de l’opérateur Orange et XpFibre (anciennement SFR FTTH) par les membres de la formation de règlement des différends, de poursuite et d’instruction (dite « RDPI » ) de l’Arcep. 

Ces décisions interviennent dans un contexte où les déploiements en zone moyennement dense qui ont fait l’objet d’un Appel à manifestation d'intérêt d'investissement (Amii) ont drastiquement ralenti (lire Maire info du 17 juin). 

L’Arcep a donc prononcé des mises en demeure de respecter l’obligation réglementaire de complétude des déploiements FttH. Dans le détail, Orange doit rendre raccordables environ 560 000 locaux non raccordables sur un total d’environ 2,97 millions de locaux recensés (ces derniers chiffres correspondent au 7 983 points de mutualisation visés par l'Arcep) ; XpFibre doit de son côté encore raccorder 53 000 locaux non raccordables sur 340 000 locaux recensés (ces derniers chiffres correspondent au 750 points de mutualisation visés par l'Arcep). Pour rappel, « les locaux raccordables au réseau FttH correspondent aux logements ou locaux à usage professionnel raccordables à un réseau de communications à très haut débit en fibre optique par l'intermédiaire d'un point de mutualisation. » 

La complétude dans la zone Amii

Tout commence en janvier 2011, où Orange et SFR ont indiqué au gouvernement leur intention de « couvrir environ 3 500 communes sur fonds propres »  dans la partie des zones moins denses réglementaires des zones d’initiative privées. C’est précisément cette partie que l’on appelle « zone Amii ». 

Mais quelles sont-elles ? Comme l’indique l’Avicca dans une tribune publiée vendredi, « cette obligation, fixée par la réglementation Arcep de 2010, prévoit en effet que les opérateurs d’infrastructures sont dans l'obligation de rendre raccordables à la fibre l'intégralité des logements d'une armoire de rue (point de mutualisation ou PM), ce que l'on appelle la zone arrière du point de mutualisation (ZAPM). »  

Rappelons que l’enjeu est majeur pour l’aménagement numérique des territoires : le respect de ces obligations garantit que l’ensemble des locaux puisse se voir proposer un raccordement. L'Arcep rappelle que « la complétude est atteinte dès lors que l'ensemble des locaux (habitations, entreprises, etc.) sont raccordables ou, dans une faible proportion, « raccordables sur demande », sauf impossibilité dûment justifiée (par exemple, cas de refus des copropriétés ou propriétaires concernés). » 

Mise en demeure tardive et nouvelles règles du jeu 

Pour rappel, Orange s’était engagé en 2018 dans 2 978 communes de la zone Amii, à raccorder d’ici 2020 100% des locaux, dont un maximum de 8 % raccordables « sur demande ». Pour SFR (XpFibre), l’engagement portait sur 100 % des locaux, dont 8 % maximum raccordables « sur demande », d’ici 2022.

Cependant, en mars 2024, le gouvernement a décidé de rebattre les cartes en signant avec Orange un nouvel accord (lire Maire info du 13 mars). Cet accord, factuellement, porte des objectifs revus à la baisse puisque désormais il n’est plus question de 100 % en zone Amii mais plutôt d’un taux de couverture de 98,5 %. 

Cette mise en demeure est jugée tardive par l'Avicca puisqu'elle laisse aux opérateurs un délai jusqu'à fin 2025 qui « ressemble plus à une obligation de complétude en 3 à 15 ans pour les PM. Une éternité pour les centaines de milliers de Français qui attendent désespérément d'être raccordables à la fibre ! »  Les élus en ont conscience : « c'est long, très long. » 

Cependant, l’Avicca a l’espoir de voir naître d’autres mises en demeure « sur d'autres points de mutualisation "plus récents" »  ce qui constituera au final « une manière de rendre progressivement l'intégralité de la zone Amii raccordable à la fibre. »  Les élus souhaitent que « que le bras du régulateur ne faiblisse pas si l'échéance de fin 2025 venait à ne pas être respectée. » 

On ne peut plus raisonnablement parler d’un simple retard et les forts écarts au sein des territoires sont exacerbés. Par exemple, une commune en zone Amii peut ne pas être raccordée à la fibre quand la commune voisine en zone d'initiative publique l'est déjà. Frustrations, incompréhensions, agacements : l’image de la fibre en pâtit alors qu’elle va bientôt remplacer définitivement l’ADSL à l’horizon 2030 (lire Maire info du 21 juin). 

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