Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 3 septembre 2019
Vie publique

Réforme des institutions (2) : les projets de loi organique et ordinaire organisent la limitation du nombre de mandats consécutifs

Au-delà du projet de loi constitutionnelle (lire article ci-dessus), le gouvernement a également présenté un projet de loi organique (c’est-à-dire relatif aux modalités d’organisation et de fonctionnement des pouvoirs publics) et un projet de loi ordinaire. Ce sont ces textes qui visent à organiser, notamment, la diminution du nombre de parlementaires, l’introduction d’une dose de proportionnelle aux élections législatives et – ce qui va intéresser au plus près les élus locaux – la limitation du nombre de mandats exécutifs dans le temps. 

Limitation du cumul des mandats dans le temps
« Nul ne peut exercer plus de trois fois consécutivement les fonctions de chef de l’exécutif ou de président de l’assemblée délibérante d’une même collectivité territoriale ou d’un même EPCI à fiscalité propre. »  Cet article 6 du projet de loi ordinaire reprend les termes de la précédente tentative de réforme, il y a un an. Et de même, ces dispositions ne s’appliqueraient qu’aux communes de plus de 9000 habitants et aux EPCI de plus de 25 000 habitants. Elles s’appliqueraient en revanche à tous les départements et toutes les régions. 
Grâce à l’étude d’impact qui accompagne ce texte, on dispose de chiffres précis sur le nombre de collectivités concernées : la mesure toucherait 1116 maires de communes et 34 maires d’arrondissement, ainsi que 603 présidents d’EPCI. 
L’interdiction n’empêcherait nullement un maire, en revanche, de rester conseiller municipal pour un quatrième mandat ou plus.
En cas de non-respect de cette nouvelle règle, si personne n’a soulevé la question devant le tribunal administratif, le préfet déclarerait le contrevenant « démissionnaire d’office ».
Le décompte du nombre de mandats intègrerait « la fonction en cours au moment de l’entrée en vigueur »  de la loi. Autrement dit, si ce texte était adopté en l’état avant les élections municipales, un maire ou président d’EPCI déjà en fonction actuellement n’aurait plus droit, par la suite, qu’à deux mandats. Il devrait donc renoncer à sa fonction à partir de l’élection de 2032. Un maire élu en mars prochain aura, lui, le droit de siéger jusqu’en 2038.
Cette semi-rétroactivité est une petite entorse à ce que le président de la République avait promis au Congrès des maires en 2017 : « Cette limitation s’appliquera à compter du prochain renouvellement des mandats, c’est-à-dire sans tenir compte des mandats précédemment effectués. » 
Notons également que dans le projet de loi organique, la même règle (impossibilité d’exercer plus de trois mandats consécutifs) est proposée pour les députés et les sénateurs. 
Enfin, le projet de loi organique élargit le champ du non-cumul des mandats : il deviendrait impossible de cumuler un mandat de parlementaire avec la fonction de membre, président et vice-président du conseil métropolitain de Lyon ou de vice-président de l’Assemblée de Corse.

Réduction du nombre de parlementaires et proportionnelle
Promesse d’Emmanuel Macron, là encore : il est proposé dans le projet de loi organique de réduire d’un quart le nombre de parlementaires : le nombre de députés passerait de 577 à 433 ; celui des sénateurs, de 348 à 260. 
Sur ces 433 députés, 346 seraient élus de la même façon qu’aujourd’hui, c’est-à-dire au scrutin uninominal à deux tours. Mais – et c’est la principale innovation – 87 autres députés seraient élus à la proportionnelle, c’est-à-dire via un scrutin de liste, avec une barre à 5 %. Il y aurait donc, le jour des élections législatives, deux scrutins distincts dans chaque bureau de vote : les électeurs devraient, d’une part, élire le député de leur circonscription ; et, d’autre part, voter pour une liste de 87 candidats présentée à l’échelle nationale. Ce qui occasionnera une logistique plus compliquée pour les communes, puisqu’il faudra à chaque fois prévoir deux urnes, sans doute deux tables, etc. 
Cette réforme de la composition et du mode de scrutin des deux assemblées, si elle est adoptée, va forcément induire un redécoupage des circonscriptions électorales. Avec, pour le Sénat, une difficulté particulière liée au fait que le Sénat, constitutionnellement, doit être élu en deux fois (par moitié, tous les trois ans). L’étude d’impact du projet de loi organique revient en détail sur cette question : pour le gouvernement, il est impératif que la diminution du nombre de sièges au Sénat porte sur tous les départements à la fois. Il a donc renoncé à l’idée d’une entrée en vigueur progressive, série par série, de la baisse du nombre de sénateurs, qui « se heurterait au principe constitutionnel d’égalité des suffrages ». Il est donc proposé que le Sénat soit renouvelé intégralement et en une seule fois, en 2021. Les sénateurs élus en 2014 verraient donc leur mandat prolongé d’un an, et ceux élus en 2017 verraient le leur réduit de deux ans. À partir de cette remise à zéro des compteurs, le renouvellement par série reprendrait normalement, à partir de 2024 donc. 
À ce jour, cette question semble être la plus clivante : les sénateurs sont, en majorité, vent debout contre le principe d’un renouvellement en une seule fois, en 2021. C’est sans doute le sujet sur lequel le gouvernement aura le plus de mal à trouver un consensus.

Franck Lemarc

Télécharger le projet de loi organique.

Télécharger le projet de loi ordinaire. 

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