ZFE : 25 propositions pour les rendre « socialement acceptables »
Par Franck Lemarc
C’est à l’occasion de la réunion du groupe ministériel « qualité de l’air en ville » que Jean-Louis Moudenc, maire de Toulouse et président de France urbaine, a remis au ministre Christophe Béchu les 25 propositions du groupe de travail. Celui-ci a travaillé en coopération avec d’autres associations d’élus, dont l’AMF, mais aussi d’autres organisations comme l’Union des entreprises de transport et de logistique ou le Secours catholique.
Alors que le ministre de la Transition écologique a annoncé une forme d’assouplissement du dispositif (lire article ci-dessus), le groupe de travail a axé ses propositions sur « l’acceptabilité sociale et territoriale » du dispositif. Car pour de très nombreux élus, le risque est grand de voir les ZFE provoquer de « l’exclusion » – sociale, en empêchant les plus modestes, possesseurs de véhicules anciens et donc polluants, d’accéder au cœur des métropoles, et territoriale, en créant des zones de relégation au sein même des métropoles.
Doubler les aides
C’est pour lutter contre cette fracture territoriale que le groupe de travail propose, en premier lieu, d’étendre les aides de l’État proposées aux habitants de ZFE à ceux qui en sont directement voisins. En effet, les citoyens habitant à proximité d’un grand pôle urbain « sont souvent contraints de s’y déplacer pour accéder à l’offre médicale, universitaire, culturelle ou professionnelle » . Leur permettre d’accéder, eux aussi, aux aides de l’État « au même titre que les habitants des ZFE » serait une mesure de « justice territoriale ».
Plus largement, le groupe de travail demande que ces aides de l’État soient fortement augmentées. Rappelant que le moins cher des véhicules électriques coûte plus de 22 000 euros, le groupe de travail constate que les ménages les plus modestes ne sont pas en mesure de les acquérir. Il propose donc le doublement des aides de l’État (bonus écologique et prime à la conversion), la possibilité d’utiliser ces aides pour acheter un véhicule d’occasion et la simplification des aides (mise en place d’un guichet unique).
Ce guichet unique, proposent les rapporteurs, pourrait être piloté par les intercommunalités « pour permettre un accompagnement de proximité en partenariat avec les acteurs en charge des solidarités ».
Il est par ailleurs constaté que l’avance de fonds, pour les ménages les plus modestes, est souvent impossible pour acquérir un nouveau véhicule. Solution proposée : l’extension du prêt à taux zéro (PTZ) dans tous les territoires concernés par une ZFE et son octroi « à tout usager ».
Les alternatives
Outre les aides permettant aux ménages de s’équiper en véhicules propres, le groupe de travail demande le développement massif de solutions permettant aux usagers de se passer de leur voiture. Ce qui doit passer par le développement de services de transports métropolitains ferroviaires et routiers. Le groupe de travail chiffre à « une centaine de nouvelles dessertes » les besoins minimums, ce qui demandera naturellement « un soutien exceptionnel de l’État » et probablement une augmentation du
Versement mobilités. Ces demandes rejoignent celle faites par le Sénat, la semaine dernière, sur le financement des transports collectifs (lire Maire info d’hier).
Le groupe de travail demande également des mesures plus énergiques pour promouvoir le covoiturage (notamment des voies dédiées), le transport à la demande et le vélo.
Acteurs économiques
Reste les problèmes économiques : comment ne pas grever l’activité de artisans, commerçants, entreprises de logistique, dont tous n’ont pas, loin de là, les moyens de renouveler immédiatement leurs véhicules ?
Le groupe de travail propose une évolution des règles nationales, en autorisant « jusqu’en 2030 » la circulation dans les ZFE des poids lourds et véhicules utilitaires Crit’Air 2. Il demande en outre une harmonisation des règles à l’échelle de toutes les ZFE pour les professionnels, « pour éviter une multiplicité de situations à prendre en compte » pour les professionnels qui travaillent sur tout le territoire.
Enfin, le groupe de travail propose plusieurs pistes pour améliorer la concertation et la compréhension autour du dispositif, par exemple en faisant évoluer la vignette Crit’Air, en y intégrant notamment l’entretien et le contrôle technique. Ou en instaurant des dérogations pour les « petits rouleurs » , qui « pourraient être pertinentes pour des publics souvent âgés, n’utilisant que très rarement une voiture parfois ancienne mais l’entretenant précautionneusement et ne contribuant ainsi que très faiblement aux émissions ».
Ces mesures, présentées hier à Christophe Béchu, ont été reçues plutôt positivement par celui-ci, qui a estimé que la plupart d’entre elles étaient « de bon sens » . Le ministre dit attendre les conclusions d’une deuxième mission, confiée à l’ancienne ministre de l’Écologie Barbara Pompili, avant de prendre des décisions qui pourraient intervenir « en septembre ».
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