Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 11 mars 2024
Catastrophes

Tempête Monica : des intempéries qui ont fait de nombreux dégâts dans le Gard et l'Ardèche

Le week-end a été particulièrement agité dans le Sud-Est et dans l'Ouest du pays. En cause : la dépression Monica. Plusieurs départements ont été placés en alerte orange pour « pluie-inondation », « crues », « risques d'avalanches » ou « vents violents ». Le bilan humain est lourd.

Par Lucile Bonnin

« La dépression Monica est à l'origine d'un temps très agité ce week-end au sud-est avec fortes pluies, des vents tempétueux et des conditions de blizzard sur le sud du Massif central et le sud des Alpes. C'est le 3ème week-end consécutif d'intempéries dans le sud-est du pays » , peut-on lire sur le site Météoconsult. 

Selon la Chaîne Météo, près d'une centaine de records quotidiens de pluies pour un mois de mars ont été battus ce week-end. Par exemple, avec plus de 100 mm de pluie ce samedi, la station de Nîmes-Courbessac dans le Gard bat son record absolu en 24h pour un mois de mars. « Cet épisode méditerranéen et cévenol figure parmi les plus importants survenus pour un mois de mars en France depuis 50 ans ».

Résultat : de nombreux cours d’eau sont entrés en crue. Au total, huit départements ont été placés en vigilance orange pour « crues »  et/ou « vagues-submersion ». Dans le Gard, la Cèze est montée à plus de 9 mètres, un record qui n’avait pas été enregistré depuis 1976. Dans les Cévennes ardéchoises plus de 300 litres d'eau sont tombés par mètre carré en 48 heures. L'Ardèche, à Vallon-Pont-d'Arc, a donc par exemple atteint 8,5 mètres au pic de crue hier matin. 

Plusieurs décès et disparitions 

A partir de samedi, très vite, plusieurs drames ont été constatés. D’abord, dans le Gard, à Gagnières, alors que la route avait été fermée par le maire, le corps d'un homme a été retrouvé dans sa voiture. L’homme a traversé avec sa voiture un pont submersible. « Il était là depuis 12 ans, il connaissait bien le quartier et la fréquence des inondations sur ce pont submersible. Le pont est éclairé de part et d'autre, balisé, donc on ne comprend pas. On n’arrive pas à l’expliquer » , a indiqué le maire de Gagnières, Olivier Martin, dans plusieurs médias. Selon l’AFP, un garde champêtre avait demandé directement au conducteur de ne pas s'y engager.

Samedi soir toujours, à Dions, une voiture a été emportée avec un homme et deux enfants de 4 et 13 ans. Ils sont toujours recherchés. A Goudargues, dans le nord du Gard près de l'Ardèche, les sauveteurs ont retrouvé deux corps dans une voiture de deux femmes, âgées de 47 et 50 ans, qui se rendaient en Espagne. Depuis dimanche, un homme de 70 ans a disparu près de la commune de Saint-Martin-de-Valamas (Ardèche). 

Au total, dans ces deux départements, on déplore pour le moment trois morts et quatre disparus. Lors d'une prise de parole depuis le ministère de l'Intérieur, Gérald Darmanin a affirmé que sept personnes étaient en réalité portées disparues : six dans le Gard et une en Ardèche. La tempête a également fait une victime en Charente-Maritime sur l’île de Ré. 

« Nous déplorons toujours des comportements (...) dangereux, d'abord pour les personnes qui s'exposent, dangereux également pour les personnes dont le devoir est d'aller leur porter secours », a regretté la préfecture du Gard. 

Ponts submersibles : la sécurité en question

Mais ces comportements dangereux sont aussi rendus possibles par une sécurisation parfois insuffisante des ponts submersibles, que de nombreux maires, notamment dans cette région, ont souvent pointée du doigt. Rappelons que les ponts submersibles sont caractérisés par le fait d’être, d’une part, très bas sur l’eau, et, d’autre part, de ne pas avoir de parapet, pour permettre l’écoulement des débris en cas de submersion et ne pas bloquer le débit. En conséquence, si un véhicule s’engage sur ces ponts, il peut suffire de quelques centimètres d’eau, si le courant est fort, pour emporter le véhicule. 

Dans le Gard en particulier, qui compte pas moins de 63 de ces ponts, des maires et présidents d’EPCI ont, depuis longtemps, signalé un manque de signalisation ou de moyens efficaces d’empêcher totalement le passage en cas de crue. Dans bien des cas, il n’existe qu’un panneau de signalisation « route submersible ». Dans d’autres, une simple demi-barrière, aisée à contourner par des automobilistes inconscients. Des maires et des députés réclament donc une évolution de la législation sur ce sujet – comme cela a été le cas dans le passé pour les passages à niveau, avec l’installation de barrières réellement infranchissables voire, pourquoi pas, de feux rouges clignotants comme il en existe aux passages à niveau ferroviaires. 

On peut également se demander, une fois encore, pourquoi le système FR-Alert n’a pas été déclenché lors de cet épisode. La page du portail FR-Alert, consultée ce matin, montre clairement que le dispositif n’a pas été déclenché pendant l’épisode Monica – la dernière alerte ayant été déclenchée le 5 mars. 

Ce système, qui a pourtant démontré son efficacité lors de la tempête Ciaran, est tellement peu connu que même les parlementaires ignorent son existence : ce matin, sur RMC, un député du Gard déclarait : « Dans un pays civilisé, on a les moyens d’envoyer une alerte géolocalisée sur les téléphones pour toutes les personnes qui bornent dans les zones dangereuses. »  On en a tellement « les moyens »  que ce dispositif existe sur tout le territoire depuis deux ans, il s’appelle FR-Alert et peut être déclenché par les préfets y compris sur une zone très restreinte. Ce dispositif souffre, visiblement, d’un grand manque de visibilité, ce qui paraît plus qu’étonnant quand des vies sont en jeu. 

Des dégâts dans les communes 

« Malheureusement, nous ne sommes pas préparés aujourd’hui à faire face à ces événements de pluies torrentielles et beaucoup de zones inondables sont exploitées et habitées » , a déploré la climatologue Françoise Vimeux, directrice de recherche à l'Institut de recherche pour le développement (IRD). Plusieurs hébergements d’urgence ont donc été ouverts dans les communes comme cela a été le cas à Antibes par exemple. 

Olivier Amrane, président du Conseil départemental de l’Ardèche, interrogé hier sur Franceinfo a indiqué que le phénomène a été d’autant plus délicat à gérer « que cela arrive coup sur coup ». Il y a eu « un épisode neigeux la semaine passée, avec jusqu'à 80 cm sur les sommets »  ; le département a « rarement des cumuls aussi impressionnants ». Le président du Conseil départemental rapporte que beaucoup de routes ont été fermées, et que le vent « a arraché beaucoup d'arbres et mis beaucoup de réseaux électriques par terre ». Quelques 4 000 foyers ont été privés d'électricité dans le département. 

Depuis dimanche, les communes des côtes du nord et de l'ouest de la France font face aux grandes marées, en plus des intempéries liées à la tempête Monica. Six départements sont toujours en vigilance orange crues ce lundi, selon le dernier bulletin de Météo France. Il s’agit de la Charente-Maritime, la Gironde, le Puy-de-Dôme, les Pyrénées-Atlantiques, la Saône-et-Loire et l’Yonne. La Gironde l’est également pour « vagues-submersion ».
 

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2