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Édition du mercredi 5 février 2025
Santé publique

Permanence des soins : en cas de carence, les ARS peuvent désormais désigner des établissements de santé 

En application de la loi Valletoux, le gouvernement a publié ce matin un décret qui permettra de rééquilibrer la charge entre les secteurs privé et public s'agissant des gardes de nuit et de week-ends.

Par A.W.

Afin de mieux répartir l’effort entre hôpitaux publics et cliniques privées, le gouvernement a publié, ce matin au Journal officiel, un décret modifiant les conditions de désignation des établissements de santé assurant les gardes de nuit et de week-ends.

En ligne de mire, le déséquilibre patent qui existe actuellement entre les deux secteurs et qui conduit les hôpitaux publics à prendre en charge l’essentiel de la permanence des soins hospitaliers. 

Plus de 80 % des gardes assumées par l’hôpital public

Ces derniers assument ainsi 82 % des gardes (et même 87 % si l’on comptabilise les établissements privés non lucratifs), alors que le secteur privé n'en assure que 13 %, selon un récent un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). Une proportion qui est bien en deçà de son poids dans le système de santé et qui conduit certains praticiens à quitter l’hôpital public pour éviter cette contrainte.

Ce décret vient donc préciser les nouvelles modalités de mises en œuvre de ces permanences de soins, après la promulgation de la loi Valletoux, en toute fin d’année 2023. Un texte porté à l’époque par l’ancien président de la Fédération hospitalière de France (FHF) devenu député de Seine-et-Marne, Frédéric Valletoux (Horizons), dont l’objectif est d’améliorer l'accès aux soins et de répondre aux inégalités de santé territoriales. 

Pour les réduire et garantir à chaque concitoyen un accès aux soins à proximité permanent, cette loi a donné la possibilité aux Agences régionales de santé (ARS) de contraindre l'ensemble des établissements de santé à assurer, si besoin, la permanence des soins en établissement. Et en particulier ceux privés, afin de rééquilibrer leurs contributions avec le secteur public.

Le texte prévoit ainsi que la « responsabilité collective »  de la permanence des soins repose en premier lieu sur les établissements de santé qui doivent s’organiser, « dans le cadre de la mise en œuvre du schéma régional de santé et de l'organisation territoriale de la permanence des soins ». Une notion qui a été introduite récemment dans le droit en la confiant, outre ces établissements de santé, également aux médecins, dentistes, sages-femmes et infirmiers. 

Carence et responsabilité collective

Mais, pour faire face à la crise du système de santé, le texte porté par l’ancien maire de Fontainebleau (et éphémère ministre de la Santé dans le gouvernement de Gabriel Attal) va désormais plus loin. Si le mécanisme prévoit une grande liberté d'organisation entre établissements, en cas de carence, l'Agence régionale de santé (ARS) aura un pouvoir renforcé pour en désigner certains en dernier recours.

Ainsi, lorsque l’« appel à candidatures »  mis en place pour désigner les structures qui seront chargées de la permanence de soins reste « tout ou partie infructueux », le directeur général de l’ARS devra dresser un « constat de carence »  en précisant « les zones »  et « les spécialités médicales concernées », indique le décret.

Dans la foulée, il devra réunir les établissements de santé des territoires impactés, ainsi que « des représentants des professionnels de santé exerçant en leur sein »  dans le but de les « inviter »  à « répondre aux nécessités d'organisation collective de la permanence des soins ». 

Si cette réunion ne permet pas de pourvoir à « l’ensemble des besoins »  et qu’aucune proposition n’aboutit, l’ARS pourra « désigner un ou plusieurs »  établissements et professionnels de santé qui y exercent pour « assurer »  ou « contribuer »  à la permanence des soins. Une désignation qui restera « temporaire »  et ne vaudra que « jusqu'à ce qu'une structure soit désignée »  au terme de l’appel à candidatures… « sauf à ce qu'il se révèle infructueux ».

Plus globalement, on peut retenir que le directeur de l’ARS aura la responsabilité d’assurer une organisation qui respecte les principes de qualité et de sécurité des soins.

Prise en charge financière

Lors de l’adoption de la loi, la profession avait prévenu qu’elle resterait vigilante à l’égard des décrets d'application : « Ce qui pourrait nous mettre en colère c'est qu’on rétablisse une certaine forme d’obligation », avait ainsi expliqué Patrick Gasser, président du principal syndicat de spécialistes Avenir spé, assurant que « cela mettrait en l'air les négociations conventionnelles ».

Dans un communiqué commun publié la semaine passée, le syndicat et sept autres fédérations du secteur estimaient d'ailleurs que « la nécessaire révision des schémas d’organisation de la PDSES [permanence des soins en établissements de santé], prévue par le ministère de la Santé, s’engage dans un calendrier trop serré », et jugeaient « essentiel que l’organisation mise en place ne perturbe pas l’équilibre nécessaire au bon fonctionnement des établissements de santé et qu’elle soit adaptée à chaque situation locale, en accord avec tous les acteurs impliqués ».

Reste que la participation des établissements et professionnels de santé pourra être « prise en charge financièrement par le fonds d'intervention régional », dont « la nature des charges couvertes »  et « les conditions d'indemnisation »  sont fixées par le gouvernement, comme l’indique le décret.

Alors que « 87 % du territoire est un désert médical », Frédéric Valletoux déplorait, lors de l’examen de sa proposition de loi, que « 45 % des médecins généralistes seraient en situation de burn-out »  et qu’une quarantaine de départements sont aujourd’hui « sous le seuil critique de 40 spécialistes pour 100 000 habitants ». 

Pour y remédier, on peut rappeler que cette loi a élargi les compétences des infirmiers avec la création du statut « d'infirmier référent »  (qui exercera une mission de suivi et de renouvellement des prescriptions pour les patients chroniques) et donné la possibilité aux collectivités locales d’accorder des indemnités de logement et de déplacement aux étudiants en dentaire de troisième cycle, comme le rappelle Vie-Publique.

Point particulièrement tendu, l'adhésion automatique des médecins à des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) censées faciliter la coordination à l'échelle du territoire n'avait, elle, pas été retenue dans la version finale du texte de loi.

Consulter le décret.

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