Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 8 juin 2022
Catastrophes

Qu'est-ce que le système FR-Alert, qui sera déployé le 22 juin ?

Le gouvernement confirme que le nouveau dispositif d'alerte des populations par le biais de téléphones portables, FR-Alert, sera déployé le 22 juin prochain. Après l'échec du système SAIP, c'est une toute nouvelle approche qui a été choisie. Explications. 

Par Franck Lemarc

Il s’agit d’une obligation décidée à l’échelle européenne : le 11 décembre 2018, les États membres de l’Union européenne ont voté une directive relative aux systèmes de télécommunications imposant l’élaboration d’un dispositif d’alerte aux populations en cas de danger grave et imminent. Cette directive a été transposée dans le droit français par une ordonnance du 26 mai 2021 dont l’article 3 fixe cette obligation, avec une entrée en vigueur au 21 juin 2022. 

L’échec de SAIP

Il s’agit de compléter le dispositif d’alerte aux populations déjà existant en s’appuyant sur la possession, par l’écrasante majorité des citoyens, d’un téléphone portable. Jusqu’à présent, le système d’alerte, en France, est essentiellement fondé sur les quelque 2 000 sirènes installées dans un certain nombre de communes, et le réseau de télécommunications, en particulier les chaînes de radio du réseau France bleu. 

Après les attentats de 2015 et à l’occasion de l’organisation par la France de l’Euro de football, l’État avait fait une première tentative de système d’alerte par le biais des smartphones, le SAIP (système d’alerte et d’information des populations), destiné à alerter rapidement les personnes qui se trouveraient dans une zone menacée, notamment, par une attaque terroriste. 

Ce système a été un échec, pour de multiples raisons analysées notamment dans le rapport parlementaire du sénateur Jean-Pierre Vogel. La principale étant que le SAIP reposait sur le téléchargement d’une application – donc un acte volontaire des personnes – et que seuls 900 000 citoyens l’avaient fait. Sans compter, de surcroît, que cette application ne fonctionnait pas sur tous les téléphones, et qu’elle était entachée de plusieurs bugs. L’échec du système SAIP a été démontré de façon patente lors de l’attentat du 25 juillet 2016 à Nice, lors de laquelle le système a mis plus de … trois heures à annoncer l’alerte. 

Diffusion via les antennes relais

La logique du nouveau système FR-Alert sera donc entièrement différente, puisqu’elle ne demandera aucune démarche de la part des utilisateurs : toute personne se trouvant dans une zone concernée par un danger imminent (catastrophe climatique, accident industriel, attaque terroriste, etc.) recevra un message sans avoir eu à télécharger préalablement une application. 

En effet, le système s’appuie sur une autre technologie appelée diffusion cellulaire (cell broadcast) : un message est délivré aux opérateurs par l’État, puis répercuté par ceux-ci via les antennes de télécommunications 4G et 5G, « sous forme d’ondes radio, sur un canal dédié », précise le ministère de l’Intérieur. Tous les téléphones étant à portée de ces antennes recevront donc immédiatement le message, qui sera signalé par un son spécifique et « intrusif ». Même si le téléphone est en mode silencieux ou vibreur, le son sera diffusé tout de même – seuls les téléphones éteints ou en mode « avion »  ne pourront le recevoir. 

Dans un deuxième temps, les messages de FR-Alert seront également diffusés par un autre canal, les SMS géolocalisés, qui permettront une diffusion via les antennes plus anciennes (2G et 3G), mais avec un inconvénient : la diffusion prendra plus de temps. 

Dans tous les cas, les personnes n’auront plus besoin ni de s’inscrire ni d’installer une application dédiée. Le ministère de l’Intérieur assure que l’État n’aura en aucun cas besoin d’avoir accès aux données de géolocalisation des personnes, puisque les alertes se diffuseront via les antennes relais des opérateurs de téléphonie. 

Autres précisions données par le ministère : le système est uniquement dédié aux alertes, ce qui interdit, par exemple, qu’il puisse être utilisé pour diffuser de la publicité. Et les messages pourront être diffusés en plusieurs langues dans les zones touristiques. Beauvau assure également que le système ne va pas « remplacer »  mais seulement « compléter »  le dispositif d’alerte par sirènes. 

Demain, les collectivités ?

Pour l’instant, ce système va rester entièrement à la main de l’État. C’est-à-dire qu’une collectivité ne pourra pas y avoir directement accès pour diffuser, le plus vite possible, une alerte urgente. Pour le moment, les communes qui souhaitent mettre en place leur système d’alerte ne peuvent le faire qu’en envoyant un sms à tous les résidents dont elles connaissent le numéro – ce qui exclut, par exemple, les touristes pendant les périodes de vacances. Plusieurs acteurs du secteur plaident donc pour une extension du système FR-Alert aux collectivités, pour permettre à celles-ci de pouvoir diffuser un message non pas à une liste d’abonnés mais à tous les possesseurs de téléphones présents dans une zone donnée. Selon un expert, Philippe Jauneau, récemment interrogé par nos confrères de Techni-cités, l’État aurait « une vraie volonté de partager l’outil (…) avec les collectivités »  et les choses pourraient se débloquer, après qu’auront été réglés les questions juridiques et l’encadrement du système. 

En attendant, dès le 22 juin prochain, le système FR-Alert, qui a été testé ces derniers mois dans plusieurs régions, va devenir effectif sur l’ensemble du territoire. 

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