Protection des élus : le gouvernement prêt à faire évoluer sa position
Par Franck Lemarc
Dans des centaines, sans doute des milliers de communes, hier à midi, les maires ont réuni les habitants devant les mairies pour demander le retour à la paix civile. L’occasion pour les habitants – parfois venus en nombre – de manifester leur soutien à leur maire, comme ils l’ont fait, de manière particulièrement chaleureuse, à L’Haÿ-les-Roses, ovationnant le maire Vincent Jeanbrun dont le domicile et la famille ont été attaqués dans la nuit de samedi à dimanche (lire Maire info d’hier).
Annonces en fin de semaine
À peine plus d’un mois après la tentative d’incendie contre le domicile du maire de Saint-Brévin, qui avait entraîné la démission de celui-ci, la question de la sécurité des élus locaux revient sur le devant de la scène. Les mesures annoncées alors (« pack sécurité » pour les élus, mise en place d’un Centre d’analyse et de lutte contre les violences faites aux élus, déploiement de 3 400 « référents atteintes aux élus » ) n’ont visiblement pas encore porté leurs fruits – même si le contexte des émeutes urbaines de ces derniers jours est tout à fait particulier.
Emmanuel Macron, qui reçoit ce matin à l’Élysée les maires dont les communes ont été touchées par ces violences, pourrait déjà annoncer de premières mesures. Mais, selon la ministre chargée des Collectivités territoriales, Dominique Faure, qui s’est longuement exprimée ce matin sur Public Sénat, cette rencontre sera surtout « le temps de la reconnaissance et de l’écoute », et ce n’est qu’en fin de semaine que le gouvernement annoncera un « renforcement » des mesures de protection des élus, sur « quatre axes » : « La protection juridique et psychologique, la protection physique, les nouvelles mesures juridiques et le rapprochement entre les maires et les parquets ». Une quinzaine de mesures devraient être annoncées à la fin de la semaine.
La ministre a indiqué que le gouvernement allait « pousser » une proposition de loi relative à cette question de la protection des élus, sans préciser exactement laquelle – il y en a plusieurs actuellement dans les circuits. D’après ses propos, on peut comprendre que la proposition de loi que souhaite favoriser le gouvernement est celle du député LR Thibault Bazin, « visant à sanctionner plus durement les violences commises à l'encontre d'une personne investie d'un mandat électif public ». Ce texte, composé d’un article unique, vise à appliquer les mêmes peines en cas d’agression d’un élu qu’en cas d’agression d’un policier ou d’un gendarme – avec donc une peine maximum, en cas de circonstances aggravantes, de 10 ans de prison de 150 000 euros d’amende.
Il convient de rappeler que tout récemment, au Parlement, l’opposition avait tenté d’introduire une telle disposition… que le gouvernement avait alors refusée.
Protection fonctionnelle
Dominique Faure a toutefois également déclaré que le gouvernement souhaitait réfléchir à des mesures telles que la protection fonctionnelle « automatique » de la commune pour les maires, « sans délibération du conseil municipal ».
Cette mesure figure, elle, dans une autre proposition de loi, sénatoriale celle-ci et transpartisane, puisqu’elle porte la signature aussi bien de sénateurs de droite, de centre-droit et de centre-gauche. Beaucoup plus fournie, cette proposition de loi traite de la protection fonctionnelle, disposant que le conseil municipal ne peut s’y opposer « que pour un motif d’intérêt général ». Le texte propose également d’étendre la prise en charge de la protection fonctionnelle par l’État aux communes de moins de 10 000 habitants (contre moins de 3 500 aujourd’hui).
La proposition de loi vise à améliorer l’assurance des risques liés à un mandat électif, à renforcer les prérogatives du procureur en cas d’atteinte à un élu, et à réformer les CLSPD (Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance) pour y intégrer, à la demande des maires, « un groupe thématique chargé des violences commises à l’encontre des élus ».
Il reste à voir quelle sera l’attitude du gouvernement par rapport à ces propositions.
Qu’il s’agisse de l’un et de l’autre de ces textes, il n’y a de toute façon aucune chance qu’ils soient discutés rapidement. Dominique Faure a indiqué ce matin qu’il fallait « trouver une niche parlementaire » où caser ces discussions, ce qui d’après elle ne pourra intervenir « avant le mois d’octobre ».
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