Projet de loi 4D : ce que le texte va changer pour les communes
Pendant des mois, c’est le plus grand flou qui a réglé sur ce texte, à propos duquel le gouvernement n’a, longtemps, dévoilé que des aspects très généraux. La semaine dernière, on a commencé à entrer dans le concret avec l’interview donnée par Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, au journal Les Échos (lire Maire info du 17 décembre). Ces premiers éléments ont permis de comprendre que le gouvernement n’entendait pas donner satisfaction aux demandes de l’AMF de voir des compétences majeures, comme la santé, le sport ou la culture, transférées aux communes et EPCI.
Différenciation et participation citoyenne
Au chapitre de la différenciation, les grandes lignes sont connues : la loi explicitera « les marges de différenciation autorisées par la Constitution » et donnera aux élus « de nouveaux pouvoirs normatifs », c’est-à-dire leur permettra de prendre certaines décisions prises aujourd’hui uniformément, par décret. Le ministère donne l’exemple des pièces à fournir pour une inscription scolaire.
Les CTAP (conférences territoriales de l’action publique) devraient voir leurs compétences élargies – il leur serait permis de « prendre des résolutions relatives à la mise en place de délégations de compétences entre collectivités territoriales ». Par ailleurs, le gouvernement prévoit d’abaisser le seuil de signatures de citoyens permettant de demander une consultation ou une délibération « sur une affaire de la compétence d’une collectivité » : actuellement d’un cinquième du nombre d’électeurs d’une commune, il passerait à un dixième. Le texte va également prévoir de « permettre au conseil municipal de consulter la population avant la création de communes nouvelles », ce qui interroge, car rien n’interdit cette pratique aujourd’hui déjà.
Pas de grands bouleversements à venir en matière de transition écologique. Le gouvernement entend « clarifier les rôles de chefs de file des collectivités », mais apparemment sans apporter de grandes nouveautés par rapport à la loi de transition énergétique ou la loi d’orientation des mobilités. Le bloc local serait conforté en tant que chef de file sur « la mobilité durable, l’aménagement de l’espace, la transition énergétique locale, la gestion de l’eau, l’assainissement, les déchets ».
Le texte prévoit aussi de déléguer « une partie du fonds chaleur et du fonds économie circulaire de l’Ademe » et de donner un siège à l’ADCF au conseil d’administration de l’Ademe.
Urbanisme
Le texte prévoit aussi de créer « un cadre juridique » plus clair sur les questions du recul du trait de côte et de l’aménagement du littoral, de renforcer les pouvoirs de police du maire dans les espaces naturels protégés – avec une compétence de droit donnée au maire, sauf si « le périmètre excède celui de la commune ».
Plus hardi : le projet de loi devrait donner aux intercommunalités une compétence « en bloc » sur un certain nombre de sujets logement : « aides à la pierre, hébergement, DALO, contingent préfectoral et réquisition ». La récupération des biens abandonnés (sans maître) sera facilitée et les délais réduits. Deux autres mesures prévues : « Permettre la dissociation de la propriété du foncier de celle des appartements pour l'accès à la propriété de logement intermédiaire » et « ouvrir la dissociation de la propriété du foncier et du bâti pour les commerces et locaux d'activités ».
Santé
En matière de santé, ce sont surtout les régions qui sont concernées par les réformes prévues, mis à part la possibilité nouvelle qui sera offerte aux communes de « recruter du personnel soignant pour les établissements (qu’elles) gèrent ». Les conseils de surveillance des ARS seront transformés en conseils d’administration, avec « un tiers des places attribuées aux collectivités locales » et « deux places de vice-présidents » pour les élus locaux, sans précision pour l’instant de la répartition de ces places par strates.
Crises
On retiendra aussi de cet avant-projet de loi des mesures de « simplification en période de crise ». Le gouvernement veut notamment « permettre en cas de nouvelle crise, sans avoir à repasser par la loi, l'activation des modalités exceptionnelles de fonctionnement des collectivités déployées en 2020 ».
Le texte prévoit aussi toutes sortes de mesures diverses concernant le déploiement du très haut débit (accélération de la mise en place de la Base adresses locales), le régime de protection des alignements d’arbres, ou encore l’élargissement du droit de préemption des terres agricoles sur les aires d’alimentation des captages d’eau potable aux syndicats mixtes et aux établissements publics locaux.
Le texte devrait être validé et transmis au Conseil d’État avant la fin de l’année, puis être présenté devant le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale « en janvier ». Le gouvernement ne mentionne pas encore de date d’examen par le Cnen. Enfin, le projet de loi sera présenté en Conseil des ministres « début février » et examiné « au premier semestre » par le Sénat.
Franck Lemarc
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