Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 8 janvier 2025
Nouvelle-Calédonie

Alcide Ponga, maire de Kouaoua, élu président d'une Nouvelle-Calédonie qui s'enfonce dans la crise

Après le renversement du gouvernement dirigé par l'indépendantiste Louis Mapou, le 24 décembre, la Nouvelle-Calédonie a un nouveau gouvernement et un nouveau président. Mais pas assez d'argent pour faire fonctionner ses institutions.

Par Franck Lemarc

L’Assemblée délibérante de Nouvelle-Calédonie a élu hier un gouvernement de 11 membres, mais celui-ci n’a pas réussi, dans un premier temps, à élire son président, en raison des profondes divisions dans le camp indépendantiste comme dans le camp non indépendantiste. Bien que les non-indépendantistes soient majoritaires dans le gouvernement, ils ont échoué hier à se mettre d’accord sur un nom, tandis que quatre membres du gouvernement se sont abstenus, ne permettant pas d’atteindre le quorum. 

Un second vote a eu lieu aujourd’hui, et les 6 non-indépendantistes ont réussi à s’accorder sur le nom d’Alcide Ponga (Le Rassemblement-Les Républicains), maire de la commune de Kouaoua. 

Aides conditionnées

Cette élection se déroule sur fond de crise économique gravissime aggravée par la chute du gouvernement Mapou, qui a conduit au non-versement d’une partie des aides exceptionnelles versées par l’État. 

En effet, un accord conclu entre le gouvernement de Nouvelle-Calédonie et l’État et, fin 2024, prévoyait que celui-ci verserait une aide financière exceptionnelle de 231 millions d’euros à la Nouvelle-Calédonie, mais à une condition : que le Congrès néocalédonien adopte trois réformes fiscales avant le 31 décembre : la création d’un jour de carence dans la fonction publique, l’augmentation de la « cotisation calédonienne de solidarité »  (un impôt sur le revenu spécifique dans l’archipel), qui devait passer de 2 à 3 %, et enfin la hausse de la TGC (taxe générale sur la consommation, équivalent calédonien de la TVA). 

Les deux premières réformes ont été adoptées le 23 décembre. Mais le 24, le gouvernement Mapou est tombé, ce qui a empêché le vote de la troisième réforme – la hausse de la TGC. 

Or le versement de cet argent était devenu d’une urgence absolue, notamment pour permettre aux collectivités locales de continuer à fonctionner. Comme l’expliquait récemment sur Nouvelle-Calédonie la Première le président de l’Association française des maires de Nouvelle-Calédonie, Pascal Vittori, de nombreuses communes n’ont plus les moyens de faire fonctionner normalement les services publics. « Certaines avaient dû arrêter le ramassage scolaire, les cantines scolaires, elles avaient dû arrêter les aides sociales également. Les CCAS (centre communal d'action sociale) n'étaient plus en mesure de venir en aide aux familles en difficulté. Et en cette fin d'année, on a des communes qui commençaient à annoncer qu'elles ne pourraient plus payer les charges sociales de leurs agents. » 

À Paris, le gouvernement a décidé de couper la poire en deux :  puisque seulement deux réformes sur trois ont été adoptées, il a annoncé sa décision de ne verser que les deux tiers de l’aide promise, soit 154 millions d’euros au lieu de 231. Le troisième tiers sera versé lorsque la réforme de la TGC sera adoptée. 

Le versement des deux premiers tiers de l’aide devrait néanmoins représenter un bol d’oxygène pour des communes asphyxiées par la crise. 

« Effondrement de la consommation » 

À cette crise s’ajoute celle qui frappe les petites et moyennes entreprises, elles aussi asphyxiées par la chute brutale de la consommation. Conséquence des émeutes et de la crise du nickel, 9 000 salariés sont au chômage en Nouvelle-Calédonie, et un quart des salariés du privé sont « dans une situation de précarité », selon l’institut de statistique de Nouvelle-Calédonie. Comme l’expliquait, le 2 janvier, Pierrick Chatel, le président de la CPME de Nouvelle-Calédonie, les Calédoniens, confrontés à des baisses massives de pouvoir d’achat, « font le choix de conserver leur argent pour se nourrir et pour se loger. (…) il y a un effondrement de la consommation ». Les réformes exigées par l’État, qui grèvent encore un peu plus les revenus des habitants, vont aggraver la situation, selon Pierrick Chatel : « La hausse de la CCS, c’est de la consommation en moins. » 

Les entreprises comme les communes, faute d’adoption d’un budget dans l’Hexagone, sont de surcroît sans visibilité sur le maintien ou non des aides de l’État en 2025. Le projet de budget qui a conduit à la censure du gouvernement Barnier contenait un prêt d'un milliard d'euros pour la Nouvelle-Calédonie, destiné à « sécuriser le paiement des situations d'urgence, le paiement des fonctionnaires ou certaines aides critiques ». Il est pour l'instant au point mort. 

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