Construction de logements : les « premières mesures » de simplification dévoilées par l'exécutif
Par A.W.
Délais des contentieux réduits, dématérialisation des permis de construire, simplification des procédures d’aménagement… Le ministre du Logement, Guillaume Kasbarian, a dévoilé une série de mesures de « simplification » et « d’accélération » de la production de logements, lors de son passage, mardi, au Marché international de la promotion immobilière (Mipim) qui se tient à Cannes jusqu’au 15 mars.
« De l’offre, de l’offre et encore de l’offre »
Alors que le pays traverse une intense crise du logement avec des permis de construire et des mises en chantier qui n'ont jamais été aussi bas depuis l'an 2000, ce sont cinq chantiers prioritaires et dix « premières mesures » de simplification – sur les « 14 mesures » qui devaient être initialement annoncées – qui doivent permettre de gagner « plusieurs mois » sur les projets de construction et de faciliter l’aménagement « partout sur le territoire ».
Surtout, c’est « le début d’un processus qui, de mois en mois, produira de nouveaux résultats concrets », escompte l’ancien député d'Eure-et-Loir, dont la feuille de route est limpide : « De l'offre, de l'offre, et encore de l'offre ».
Afin de « redonner confiance dans l’investissement locatif » et « encourager les propriétaires à mettre leur logement en location », Guillaume Kasbarian souhaite ainsi « déverrouiller le marché du logement » pour « lever les contraintes qui pèsent sur les projets immobiliers », a-t-il rappelé, hier à l’Assemblée, en réponse à une question du député Horizons de la Charente-Maritime Christophe Plassard, qui s’inquiétait de l’explosion des locations de courte durée et d’une chute de « près de 20 % » des ouvertures de chantier dans son département.
Et pour cela, il compte décliner au secteur du logement le « choc de simplification » voulu par Emmanuel Macron. Un processus de simplification qui a d’ailleurs déjà commencé avec la création de 22 territoires « engagés pour le logement » dont le but est de permettre la création de 30 000 logements « dans les deux ans qui viennent », a-t-il rappelé.
Digitalisation des permis de construire
Concrètement et afin d’accélérer les procédures d’aménagement, l’exécutif va d’abord étendre « les permis d’aménager multi-sites » qui permettent à un porteur de projet de déposer un seul permis pour plusieurs sites d’aménagement et de simplifier l’instruction de la demande.
Dans ce cadre toujours, il a été décidé que les règles d’urbanisme en ZAC seront désormais appliquées, « de droit », sur « l’ensemble du périmètre du projet et non lot par lot », et que le titulaire d’un permis d’aménager puisse dorénavant « découper sa zone d’aménagement en tranches », obtenir une garantie d’achèvement pour chaque tranche et un permis de construire dès l’obtention de cette garantie. Il est également prévu de faciliter « la densification en lotissement », en donnant aux propriétaires la possibilité de modifier les règles de modification des règlements de lotissements, notamment pour construire de nouveaux locaux.
S’agissant du deuxième chantier évoqué par le ministre du Logement (l’accélération de la numérisation des autorisations d’urbanisme), le gouvernement compte obliger les personnes morales et les professionnels à déposer les permis de construire par voie électronique afin de « limiter le nombre d’exemplaires papier exigé par les collectivités […] de moins de 3 500 habitants ». Les services de l’État devront, eux, être saisis « uniquement par voie dématérialisée », tandis qu’un formulaire « simple et adapté » sera proposé pour régulariser les autorisations d’urbanisme. « Soit à la demande de l’autorité compétente, soit pour tenir compte des remarques du juge au lieu de demander un permis modificatif », précise le ministère.
Par ailleurs, ce dernier annonce la mise en œuvre d’un certificat de projet qui listera « les procédures, les régimes et les décisions applicables au projet » ainsi qu’un « calendrier d’instruction de ces décisions ». Enfin, le gouvernement prévoit de raccourcir les procédures de recours – afin de gagner « quatre mois dans les délais de contentieux » et ainsi « économiser jusqu’à 10 % du coût de portage foncier » – et d’identifier les leviers permettant de « statuer plus rapidement » sur la recevabilité des recours.
Des réponses « pas à la hauteur »
Une réponse déjà jugée « insuffisante » par le président du Pôle Habitat de la Fédération française du bâtiment (FFB), Grégory Monod, pour qui « le problème principal » ne porte pas sur l’offre… mais sur la demande.
« C’est une bonne chose de traiter cette question [de l’offre], mais pour nous, le problème principal est de soutenir la demande, c’est-à-dire les candidats à la propriété qui ne peuvent plus acheter depuis la hausse des taux de crédit l’an passé ! Les réponses apportées ne sont donc ni suffisantes, ni à la hauteur de l’enjeu », a déploré Grégory Monod, dans un entretien à Capital.
Reconnaissant que « certaines mesures vont dans le bon sens » (la densification des lotissements, l’harmonisation des règles d’urbanisme à l’échelle de l’ensemble d’un projet, accélération des permis de construire dans les zones d’aménagement…), il estime, toutefois, que ces mesures ne sont « absolument pas » suffisantes pour répondre à la crise actuelle. « Ce ne sont pas avec ces seules 10 mesures que l’on sortira de la crise. Je pense par exemple à la numérisation des permis de construire, que veut accélérer le gouvernement. Cela ne me semble pas le vrai sujet : l’enjeu pour nous se situe plutôt sur les délais de traitement, qu’il faudrait diviser par deux ! Idem sur l’idée de réduire le délai de 60 jours entre la délivrance de l’autorisation de construire et l’éventuel dépôt de recours gracieux des riverains contre un projet. Mais ce sont les délais de l’ensemble des procédures administratives qu’il faudrait réduire ».
Ces premières mesures faites par Guillaume Kasbarian sont arrivées au lendemain de la publication des 25 « pistes d’action » préconisées par l’AMF afin de « relancer durablement une politique nationale de production de logement ambitieuse et cohérente ».
Jugeant la politique menée par le chef de l’État depuis 2017 « responsable » de la crise actuelle, l'association propose de « redonner du pouvoir aux maires » (en renforçant, par exemple, leur place dans les politiques de logement social), de libérer le foncier (en révisant la fiscalité) ou encore de « réhabiliter l’acte de construire » (en soutenant notamment « concrètement les communes qui participent à l’effort de production de logement abordable » ).
Celle-ci a également fait part de sa vigilance face au « choc de décentralisation » voulu par le gouvernement.
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