Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du vendredi 13 septembre 2024
Santé publique

Le risque d'épidémie de dengue, de chikungunya ou de zika est « assez élevé » en France, selon l'Anses

Une étude assez inquiétante de l'Anses a été publiée ce matin, qui établit que le risque d'une épidémie liée aux maladies transmises par le moustique tigre est désormais bien réel en France. Explications.

Par Franck Lemarc

On appelle cela des « arboviroses » : il s’agit de maladies dues à un virus transmis par les insectes. Ces maladies sont très nombreuses, allant de la fièvre jaune à l’encéphalite en passant par la dengue, le chikungunya et le zika, et sont hélas très répandues notamment dans les zones tropicales, particulièrement favorables à la prolifération des insectes. 

Mais ces maladies – changement climatique oblige – se développent à présent dans les zones tempérées. En 2022 en France, on a compté 66 cas de dengue « autochtone », c’est-à-dire due à une infection locale et non lors d’un voyage. C’est, en une seule année, l’équivalent du nombre de cas constaté pendant les dix années précédentes. 

Le ministère de la Santé a donc demandé à l’Anses d’expertiser ce risque. L’agence a publié, ce matin, ses conclusions, présentées dans un rapport de près de 300 pages. 

Risque de 5 à 7 sur 9

Et ces conclusions ne sont guère réjouissantes. La prolifération extrêmement rapide du moustique tigre en métropole, présent aujourd’hui dans 78 départements sur 96, rend le risque de transmission d’arboviroses particulièrement important. Selon les données du ministère de la santé, dans une quinzaine de départements (façade méditerranéenne, Rhône, Hauts-de-Seine…)  le moustique tigre est aujourd’hui présent dans plus de 40 % des communes. Sa diffusion a été relativement rapide : en 2004, la présence du moustique tigre n’était constatée que dans un seul département (les Alpes-Maritimes), avant de coloniser les quatre cinquièmes du pays en vingt ans. 

Résultat : selon l’Anses, le risque de voir survenir une épidémie d’une des trois maladies précitées dans les cinq ans à venir est « compris entre 5 et 7 sur une échelle de 0 à 9 » . Une épidémie étant comprise, rappelle l’Anses, comme le moment « où il n’est plus possible de relier toutes les personnes infectées à un foyer, et où les transmissions échappent au dispositif de contrôle ». 

Tensions sur le système de santé

Selon l’Anses, si une épidémie devait survenir, « les moyens de prévention et de contrôle des arboviroses pourraient être rapidement saturés » . La gestion de ces maladies requiert en effet « des moyens matériels, financiers et humains importants : les protocoles de surveillance et de contrôle nécessitent en effet, d’une part, de retracer tous les contacts de la personne infectée au cours des 10 jours précédents et, d’autre part, de contrôler les lieux visités par le malade afin d’éliminer les moustiques tigres présents ». 

L’Anses juge donc que le système de santé « serait en tension en cas d’épidémie majeure » , d’autant plus si l’offre de soins, notamment la médecine d’urgence, est « déjà saturée », comme c’est devenu, pour ainsi dire, la norme en France. 

Il faut signaler, heureusement, que ces trois maladies (dengue, chikungunya et zika), si elles sont invalidantes, ne sont que rarement mortelles : le taux de létalité de la dengue est de 0,06 % et d’environ 0,4 % pour le chinkungunya. 

Les risques les plus importants en cas d’épidémie seraient donc, comme l’écrit l’Anses, la déstabilisation des services de santé et des impacts économiques. 

L’Agence souligne également le risque « d’aggravation des inégalités sociales » : « En cas d’épidémie d’arbovirose, l’Anses appelle les autorités à la vigilance pour que les populations les plus défavorisées aient accès aux informations, aux moyens de prévention et aux soins. » 

Préconisations

L’Anses appelle donc les pouvoirs publics à « adapter les moyens aux besoins de prévention, de surveillance et de contrôle » , et préconise « la mise en place d’un plan interministériel de lutte contre ces maladies afin de mieux identifier et coordonner les acteurs impliqués, y compris la mobilisation de la population ». Elle estime également nécessaire de « valoriser les expériences des départements et régions d’Outre-mer », depuis longtemps confrontés à cette menace, et mieux former les personnels de santé pour qu’ils connaissent notamment « les signaux d’alerte des formes graves d’arbovirose ». 

Plus généralement, il y a nécessité à tenter de freiner le développement des moustiques tigres, ce qui passe aussi par des actions d’informations et de sensibilisation qui peuvent être entreprises par les maires. La principale recommandation à faire passer est d’inciter les personnes à « vider les coupelles et autres contenants remplis d’eau pour éviter qu’ils deviennent des gites larvaires » , et à recouvrir les récupérateurs d’eau de pluie avec une moustiquaire. 

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