Les textes intéressant les collectivités qui seront au programme de la prochaine session parlementaire
Par Franck Lemarc
Faute de gouvernement, aucun projet de loi (c’est-à-dire des textes élaborés par le gouvernement) ne figure pour l’instant à l’agenda de l’Assemblée nationale, dont les travaux reprendront a priori le mardi 1er octobre, sauf convocation d’ici là d’une session extraordinaire, de plus en plus improbable.
En revanche, au fil des jours, les députés élus en juillet dernier déposent des propositions de loi sur le bureau de l’Assemblée nationale, et un certain nombre de textes déjà débattus lors de la précédente législature ont été redéposés sur le bureau de la présidente de l’Assemblée nationale. Certains intéressent directement les maires.
Poursuite de la navette pour plusieurs textes importants
Parmi ces textes qui étaient déjà en cours de navette et qui ont été redéposés – et seront donc discutés dans les semaines ou les mois à venir –, il faut retenir la proposition de loi « Faciliter la transformation de bureaux en logement » (lire Maire info du 23 mai), ou encore le très important texte « Remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue », qui vise à donner de nouveaux pouvoirs aux maires pour réguler les meublés de tourisme type AirBnb (lire Maire info du 30 janvier 2024).
Retour également lors de la prochaine session de la proposition de loi de l'écologiste Sandrine Rousseau « visant à mieux indemniser les biens immmobiliers causés par le retrait-gonflement de l'argile » (lire Maire info du 12 avril).
Il faudra également suivre le sort de la (ou des) proposition(s) de loi sur le statut de l’élu que la dissolution de l’Assemblée nationale a brutalement stoppée – notamment le texte élaboré par Violette Spillebout et Sébastien Jummel l’année dernière. Ce dernier n’ayant pas été réélu, la députée Renaissance a déposé à nouveau son texte, en juillet, cette fois co-signé par le socialiste Stéphane Delautrette. Il reste à savoir si, comme le souhaitait la ministre sortante chargée des Collectivités territoriales, Dominique Faure, ce sujet fera également l’objet d’un projet de loi gouvernemental.
En tout état de cause, il ne faut pas trop traîner : pour que les dispositions adoptées puissent entrer pleinement en vigueur lors du prochain mandat municipal, en 2026, il faut qu’un texte soit adopté un an avant, c’est-à-dire en mars ou en juin prochain, selon la date qui sera retenue pour les élections municipales.
D'autres propositions de loi intéressant les maires et déjà adoptées par le Sénat ont été remises à l’agenda de l’Assemblée nationale : le texte sur l’ancrage territorial de l’alimentation, celui sur l’urbanisme commercial et celui sur l’accès aux pharmacies dans les communes rurales. On peut également mentionner le texte sur l'interdiction du recours aux cabinets privés de conseil par les acteurs publics, ainsi qu'une proposition de loi sur l'organisation de funérailles républicaines, qui imposerait aux communes de mettre à disposition des familles qui le souhaitent leurs salles municipales afin de pouvoir organiser des moments de recueillement, et de faire procéder à une cérémonie civile par un officier d'état civil de la commune.
De nouveaux textes
Au-delà de ces textes déjà en discussion, on peut citer un certain nombre de propositions de loi nouvelles déposées cet été ou à la rentrée.
Parmi elles, un texte de Jean-Luc Warsmann « relatif à à l'exercice par un ressortissant communautaire des fonctions d'adjoint au maire » . Il s’agit d’une proposition de loi constitutionnelle, qui vise à revenir sur une restriction jugée « dépassée » par le député Liot des Ardennes : si les ressortissants européens ont aujourd’hui le droit de participer aux élections municipales et d’être élus conseillers municipaux, ils ne peuvent être ni maires ni adjoints. Le député propose que leur soit ouverte la possibilité de devenir adjoints au maire, ce qui demanderait une modification de l’article 88-3 la Constitution.
La députée LR de la Loire Sylvie Bonnet a déposé une proposition de loi dont l’objet est contenu dans le titre : « Rétablir la pratique de la réserve parlementaire au profit des petites communes et des associations » . Estimant que le FDVA et la DETR, qui ont en partie remplacé la réserve parlementaire supprimée en 2017, « ne sont pas à la hauteur des enjeux » du fait d’une « gestion technocratique déconnectée de la réalité des territoires » , la députée propose de rétablir la réserve parlementaire pour les associations et certaines communes. Elle a choisi, dans son texte, un seuil assez étrange, puisqu’il ne correspond à aucun des seuils habituellement en vigueur dans la réglementation : celui de 18 000 habitants.
Notons également un texte qui vient d’être déposé par le député LR Jérôme Nury (Orne), demandant de mettre fin aux « parachutages » en imposant que tout candidat à une élection législative soit électeur dans une commune située dans la circonscription, afin que les élus soient « en prise directe avec les Français qu’ils représentent ». Cette proposition de loi suscitera certainement, si elle est débattue, d’âpres discussions, d’autant qu’elle va se télescoper avec la volonté très ferme du Rassemblement national de voir institué un scrutin proportionnel aux législatives. Ce qui répondrait à une logique totalement inverse, puisque la proportionnelle réduirait au contraire les liens entre les députés et leur territoire d’élection. Ce débat sur le mode d’élection de la prochaine Assemblée nationale va certainement être très présent dans les mois à venir, dans la mesure où le RN en a fait une de ses « lignes rouges » conditionnant son soutien au gouvernement Barnier, et que toute une partie de la gauche y est également favorable.
Réforme des retraites
Rappelons enfin que la question des retraites va à nouveau s’inviter dans le débat parlementaire, à la fin du mois d’octobre. Le RN a en effet confirmé hier qu’il avait déposé une proposition de loi visant à abroger la réforme des retraites de 2023, et que ce texte sera à l’ordre du jour de sa niche parlementaire, le 31 octobre.
Si la proposition de loi n’est pas encore disponible sur le site de l’Assemblée nationale, et qu’on ignore donc son contenu réel, nul doute que les débats à son propos vont être particulièrement intéressants à suivre. En effet, l’abrogation de la réforme des retraites était également au programme du Nouveau Front populaire – et les voix additionnées du RN et du NFP permettent d’obtenir la majorité absolue. Il est donc théoriquement possible que le texte soit adopté… à supposer que la gauche décide de voter un texte présenté par le RN, ce qu’elle s’est toujours interdit jusqu’à présent.
Cette manœuvre du Rassemblement national est donc particulièrement habile, puisque le parti de Marine Le Pen sera gagnant dans tous les cas : si son texte est voté, il apparaîtra comme le parti qui a eu la tête d’une réforme rejetée par une majorité de Français. S’il est rejeté, du fait de l’abstention de la gauche, il aura beau jeu de dénoncer une trahison de celle-ci et son incapacité à tenir ses promesses électorales. Un véritable casse-tête à venir, et pour la gauche, et pour le futur gouvernement.
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