Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 13 septembre 2024
Petite enfance

Instruction des enfants dans la famille : rappel des obligations des maires

Depuis la loi confortant les principes de la République en 2021, les règles ont changé en matière d'instruction des enfants dans la famille. Un guide juridique élaboré par l'État, en lien avec l'AMF, rappelle utilement les obligations des maires.

Par Franck Lemarc

La loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance a posé le principe de la scolarisation obligatoire dès trois ans. Par la suite, la loi du 24 août 2021 a modifié les règles en matière d’instruction dans la famille, qui fait dorénavant l’objet d’une demande d’autorisation auprès du Dasen, et non plus d’une demande de dérogation auprès de celui-ci et du maire. Depuis la rentrée de 2022, celle-ci n’est possible que dans quatre cas : quand l’état de santé ou le handicap de l’enfant ne lui permet pas d’être scolarisé ; quand l’enfant doit pratiquer « une activité sportive ou artistique intensive »  ; en cas d’itinérance de la famille en France ou d’éloignement géographique de tout établissement scolaire public. Enfin, il existe une quatrième condition, moins simple à établir, à savoir l’existence d’un « projet éducatif » , lié à « l’existence d’une situation propre à l’enfant »  (sous conditions). 

Les parents qui souhaitent inscrire leur enfant à domicile doivent faire leur demande entre le 1er mars et le 31 mai de l’année précédente, sauf cas exceptionnel (par exemple des raisons de santé intervenues après le 31 mai). 

Dans le contexte de cette nouvelle législation, la DGCL et la Direction générale de l’enseignement scolaire ont souhaité rappeler « le rôle des élus locaux » , dans un guide [LIEN] mis à jour au printemps dernier, qu’il est utile de rediffuser à l’occasion de cette rentrée.

Recensement

Rappelons tout d’abord qu’il revient au maire de procéder, à chaque rentrée, au recensement des enfants résidant dans sa commune qui sont soumis à l’obligation scolaire (entre 3 et 16 ans donc). Depuis la loi du 24 août 2021, chaque enfant soumis à l’obligation scolaire se voit désormais attribuer un identifiant national, afin de faciliter le suivi par les maires. Cette liste établie par le maire doit indiquer « les modalités selon lesquelles [l’enfant] est instruit » , à l’école ou en famille. Attention, il ne revient plus désormais aux familles de déclarer aux maires l’instruction d’un enfant en famille : c’est le Directeur académique des services de l’Éducation nationale (Dasen) qui en est maintenant chargé, dans la mesure où c’est lui qui est récipiendaire du dossier de demande d’instruction en famille.

La liste établie par le maire doit être mise à jour « chaque premier du mois ». Cette liste permet notamment au Dasen de vérifier si tous les enfants soumis à l’obligation scolaire sont bien inscrits dans un établissement, ou bénéficient d’une autorisation d’instruction en famille. Dans le cas contraire, les familles sont mises en demeure d’inscrire leur enfant sous quinze jours dans un établissement « et de faire aussitôt connaître au maire »  celui-ci. 

Lorsque c’est le maire qui constate qu’un enfant habitant sa commune n’est pas inscrit dans un établissement et ne bénéficie pas d’une autorisation d’instruction dans la famille, il doit en avertir immédiatement le Dasen et le procureur de la République, et transmettre une information préoccupante au président du conseil départemental. 

L’enquête sur l’instruction dans la famille

Le maire est par ailleurs toujours tenu de mener une enquête sur l’instruction dans la famille, y compris pour les enfants entre 3 et 5 ans. Mais depuis la loi du 24 août 2021, les règles ont changé : le maire n’a plus à établir les raisons alléguées par les personnes responsables de l’enfant, puisque ces raisons sont communiquées par les familles au Dasen lors de l’instruction du dossier. 

En revanche, il revient au maire de vérifier ces motifs avancés par les familles et de « contrôler s'il est donné à l'enfant une instruction compatible avec son état de santé et les conditions de vie de la famille » . Cette enquête doit avoir lieu dès la première année de la période d’instruction dans la famille, puis tous les deux ans jusqu’aux 16 ans de l’enfant. Elle doit être menée par un agent municipal – le guide précise que les services départementaux de l’Éducation nationale ne peuvent se substituer aux services municipaux pour effectuer cette enquête. 

En cas de garde alternée, il est exigé que l’enquête soit menée au domicile des deux parents, « par chacun des maires concernés »  si les parents ne résident pas dans la même commune. 
L’enquête doit permettre de vérifier « la réalité des motifs avancés par les personnes responsables de l'enfant pour obtenir l'autorisation d'instruction dans la famille ». Il est désormais obligatoire, par ailleurs que les personnes responsables fournissent au maire une attestation de suivi médical de l’enfant, dans la mesure où celui-ci ne bénéficie pas de la médecine scolaire. 

Le guide rappelle précisément les éléments qui doivent être établis dans l’enquête, qui sera par la suite transmise par le maire au Dasen et aux personnes responsables de l’enfant.

Attention, cette enquête n’est ni un contrôle pédagogique (qui revient à l’Éducation nationale) ni une enquête sociale – elle doit se limiter strictement aux vérifications mentionnées plus haut. Si, néanmoins, il est constaté lors de l’enquête que des enfants d’au moins deux familles bénéficient d’une instruction « dans un même domicile » , le maire doit alors immédiatement saisir le procureur de la République, car cette pratique est illégale (il s’agit alors d’un établissement clandestin). 

À noter que le guide comprend également des fiches sur le fonctionnement de l’instance départementale chargée de la prévention de l'évitement scolaire, mise en place en 2022, à laquelle participent les maires ; et sur l’articulation entre l’instruction dans la famille et la protection de l’enfance. 

Deux autres fiches traitent de la prévention de la radicalisation et du suivi des enfants « issus de familles itinérantes »  en matière d’instruction. 

Récemment auditionnée par la Cour des comptes, l’AMF a rappelé les difficultés pouvant être rencontrées par les maires pour mener l’enquête auprès des familles et pour recenser tous les enfants résidents en âge d’obligation scolaire.

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