Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 23 juillet 2024
Gouvernement

Gouvernement : tractations à gauche, « pacte de gouvernance » à droite

C'est toujours l'incertitude la plus totale qui plane sur le futur gouvernement appelé à diriger le pays dans les mois à venir, alors qu'aucune majorité ne s'est dessinée à l'Assemblée nationale après les élections anticipées. La gauche se cherche toujours un Premier ministre, tandis que Les Républicains ont défini hier  leurs lignes rouges. 

Par Franck Lemarc

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© Wikipedia

Après un week-end marqué par l’élection des instances dirigeantes de l’Assemblée nationale (lire Maire info d’hier), on ne peut certes pas dire que la « clarification »  voulue par le chef de l’État, en procédant à la dissolution de l’Assemblée, soit au rendez-vous. 

Le NFP dans l’impasse

Du côté du Nouveau Front populaire, les discussions ont semble-t-il repris pour tenter de s’accorder sur le nom d’un Premier ministre choisi en commun, après une semaine d’interruption qui ont permis, en revanche, de se mettre d’accord sur un candidat unique à la présidence de l’Assemblée nationale. Une fois encore, c’est la confusion qui règne. Deux noms ont émergé, depuis une dizaine de jours, sans qu’aucun d’eux fasse totalement consensus entre les différentes formations qui composent le NFP. Celui d’Huguette Bello, d’abord, présidente du conseil régional de La Réunion, a été proposé par le Parti communiste et a le soutien de La France insoumise, mais pas celui du PS et des Écologistes. Ancienne membre du Parti communiste réunionnais de Paul Vergès et proche de Jean-Luc Mélenchon, ancienne maire de Saint-Paul, son nom avait déjà été évoqué comme ministre d’un éventuel gouvernement de gauche, en cas de victoire de Jean-Luc Mélenchon en 2022. Même si elle devait finir par être acceptée par tous les partis membres du NFP, les derniers échos de presse laissent à penser qu’Huguette Bello n’est pas enthousiasmée par la perspective de devenir Première ministre, avec la perspective d’être renversée dès son discours de politique générale. 

Autre piste largement évoquée ces derniers jours : Laurence Tubiana, qui, à l’inverse, a le soutien des socialistes et des écologistes mais pas celui des Insoumis. Haute fonctionnaire, économiste, chercheuse, Laurence Tubiana, à la différence d’Huguette Bello, n’a jamais été élue. C’est en revanche une spécialiste très pointue des questions environnementales, ayant participé à plusieurs conférences de haut niveau sur le climat et co-dirigé le débat national sur la transition énergétique de 2012. C’est elle qui a négocié l’Accord de Paris de la Cop 21, en 2015. Elle siège au Haut conseil pour le climat et dirige, en outre, l’Agence française de développement. 

Soutien de François Hollande en 2012, elle s’est exprimée le 11 juillet, dans une tribune, pour appeler à la constitution d’un gouvernement de coalition entre le NFP et « les autres acteurs du front républicain ». C’est notamment cette position qui lui vaut le rejet de La France insoumise. 

Dimanche, constatant que sa candidature ne fait pas l’unanimité, Laurence Tubiana a annoncé qu’elle se retirait de la course. 

Depuis, l’alliance de gauche semble dans l’impasse. Des noms sont jetés, comme des ballons d’essai, alors même que parfois les intéressés ne sont pas au courant. Ceux de Cécile Duflot, présidente d’Oxfam, ou celui de l’ancien ministre et ancien candidat à la présidentielle Benoît Hamon, ont par exemple été évoqués, tout comme celui du député communiste André Chassaigne, qui a clairement dit n’être « pas intéressé »  par Matignon. 

À droite, soutien sous conditions, sans participation

Pendant ce temps, à droite, Les Républicains ont présenté hier leur « pacte législatif », destiné à « empêcher le blocage du pays ». Les deux présidents des groupes LR à l’Assemblée nationale et au Sénat, Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau, ont tenu une conférence de presse hier pour expliquer leur démarche, après avoir sans ambigüité aidé à l’élection de Yaël Braun-Pivet à la présidence de l’Assemblée nationale : un soutien sous condition à une éventuelle majorité, mais sans participation gouvernementale. 

Il est en effet hors de question, pour eux, de participer à « une coalition gouvernementale », comme les y appelle, notamment, le ministre démissionnaire de l’Intérieur, Gérald Darmanin. Pour Laurent Wauquiez, le président Macron a fait « trop de dégâts dans le pays en sept ans »  pour que Les Républicains acceptent de gouverner avec lui. Néanmoins, Les Républicains souhaitent que le pays puisse être gouverné. Ils ont donc proposé un « pack »  de 13 lois, « applicables tout de suite », qu’ils s’engagent à voter à l’Assemblée nationale et au Sénat si le futur gouvernement s’en empare. Les LR jouent une partition très claire : pendant que la gauche s’écharpe sur le casting, nous travaillons sur le programme. 

Ces 13 textes sont seulement évoqués et n’ont pas été rédigés. Ils s’organisent autour de « trois axes », ont expliqué les deux présidents de groupe : la restauration de l’autorité, la relocalisation de la production et le renforcement des services publics. Avec une « priorité absolue », voire « une obsession » : la « revalorisation du travail ». « En France, il y a trop d’aides sociales, trop d’assistanat, expliquait hier Laurent Wauquiez, et pas assez de salaire ». 

Le « pacte »  met l’accent sur la sécurité, avec la volonté de « mettre enfin en place une justice de tolérance zéro », et « la suppression des aides sociales pour les délinquants et les parents de délinquants mineurs ». Sur les services publics, l’ancien maire du Puy-en-Velay propose une recette simple : « Moins de bureaucratie, moins de normes, plus de services publics de proximité ». 

Les deux dirigeants de droite demandent également « l’arrêt de l’immigration incontrôlée »  et proposent de restaurer les mesures de la loi immigration qui ont été censurées par le Conseil constitutionnel. Ils remettent également sur la table la suppression de l’Aide médicale d’État.

Les 13 textes sur lesquels la droite s’engage à voter touchent aux sujets les plus divers, y compris le logement, l’agriculture, la transition énergétique, ainsi qu’un texte sur « la liberté des communes et collectivités locales ». 

Les deux présidents ont enfin annoncé que deux « lignes rouges »  seraient tracés, qui donneraient lieu au dépôt immédiat d’une motion de censure par leur groupe : une hausse des impôts et une baisse des pensions de retraite. 

Il reste à connaître les intentions du chef de l’État. Continuera-t-il de refuser un gouvernement exclusivement Front populaire, comme il  l’a exprimé aux lendemains du scrutin ? Va-t-il continuer de plaider pour une large coalition ? Pour l’instant, Emmanuel Macron semble surtout décidé à prendre son temps, puisqu’il a demandé hier qu’une « trêve politique »  ait lieu pendant les JO. Trêve que le chef de l'État va débuter... en s'exprimant lui -même, sur France 2, ce soir. 

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