Rapport Thiriez : cinq chantiers pour réformer la haute fonction publique
Évoquée depuis de nombreuses années et régulièrement mise aux oubliettes, la suppression de l’École nationale d’administration (ENA) s’est à nouveau invitée dans le débat public, le mardi 18 février, avec la réception par le Premier ministre Édouard Philippe du rapport rédigé par l’avocat Frédéric Thiriez. Un rapport maintes fois annoncé et régulièrement différé ces dernières semaines en raison de son contenu polémique.
Missionné le 14 mai 2019, l’ancien président de la Ligue de football professionnel formule quarante-deux propositions qui, si elles ne sonnent pas expressément le glas de l’ENA, annoncent « une véritable refondation » de cette institution. En dessinant les contours d’une réforme de la haute fonction publique, le rapport Thiriez propose, en effet, de repenser à la fois « le recrutement, la formation et la carrière des hauts fonctionnaires ».
Élaboré à partir d’une large consultation menée dans les plus hautes sphères de l’administration française (260 acteurs publics ont été auditionnés), le document rédigé par Frédéric Thiriez a été aussitôt validé dans ses grandes lignes par Matignon. Deux heures après la réception officielle du rapport, Édouard Philippe chargeait Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, d’instruire les propositions. Cinq axes de travail sont d’ores déjà retenus par le chef du gouvernement.
Davantage de mixité sociale
Le premier chantier porte sur la mise en œuvre d’un plan de « diversification sociale et géographique des recrutements ». Il s’agit notamment de créer des « classes égalité des chances » à travers l’Hexagone, de lancer des actions de tutorat dès le collège et de systématiquement intégrer un quota de boursiers au sein des masters et classes préparatoires aux grandes écoles de la fonction publique.
Le Premier ministre retient également du rapport Thiriez la proposition de « décloisonner les formations des hauts fonctionnaires ». Au cours de leur cursus, quelle que soit leur future filière de spécialisation (administrative, judiciaire, technique, santé, territoriale), ces derniers devront suivre un tronc commun de formation et participer à des expériences de travail en commun. De ce fait, Matignon précise que l’ENA « sera remplacée par une école du management public, avec une vocation élargie ».
Priorité au terrain
Troisième piste validée : « Le renforcement du caractère opérationnel » et de la « dimension terrain » de la formation des hauts fonctionnaires. Certaines mesures seront plus particulièrement explorées, comme la refonte du contenu des concours « dans un sens moins académique » ou l’intégration obligatoire pendant la scolarité « d’un stage long en territoire » et d’un engagement citoyen qui pourrait prendre la forme d’une préparation militaire.
La fin de la titularisation et de l’avancement automatiques dans les grands corps constitue le quatrième objectif du Premier ministre. Ce dernier souhaite que ces deux principes soient « désormais conditionnés à la réalisation réussie d’un temps d’apprentissage dans le corps et de missions de terrain en administration active ».
Enfin, Édouard Philippe adoube la création d’un Institut des hautes études du service public. Ce nouvel organisme étant chargé de la détection et de la formation continue des agents destinés aux postes de cadres dirigeants.
Le chef du gouvernement a, par ailleurs, indiqué que ces nouvelles modalités ne seront mises en œuvre qu’à partir de 2022, les concours de la haute fonction publique restant organisés sous leur forme actuelle en 2020 et 2021. Par ailleurs, les mesures nécessitant une modification de nature législative seront intégrées à l’ordonnance prévue par la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 présentée avant la fin du deuxième trimestre.
À noter que la fonction publique territoriale sera logiquement impactée par le dispositif gouvernemental. L’Institut national des études territoriales (Inet) demeurera avec le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) l’un des instruments de la modernisation de la formation et des carrières des cadres territoriaux supérieurs. En revanche, une partie des épreuves du concours d’entrée à l’Inet et de la formation dispensée sera mutualisée avec les autres écoles de la haute fonction publique.
L'Association des administrateurs territoriaux de France (AATF) a salué dans un communiqué « la parution du rapport Thiriez, une étape nécessaire dans le processus de transformation de la haute fonction publique, que l'AATF appelle de longue date de ses vœux ».
Emmanuelle Quémard
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