Le Conseil constitutionnel valide la suppression de la taxe d'habitation et la compensation pour les collectivités
Le Conseil constitutionnel a validé, le 27 décembre dernier, la suppression totale de la taxe d’habitation et la réforme de la fiscalité locale dans le cadre de la loi de finances pour 2020. Il a, toutefois, censuré le financement de la Société du Grand Paris via un prélèvement sur les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les départements de la région Île-de-France et la ville de Paris. Dans la foulée de cette décision, la loi de finances a été publiée au Journal officiel du 29 décembre, l’essentiel de ses dispositions ayant été déclarées conformes.
Avec cette validation de la suppression de la taxe d’habitation, plus aucun foyer ne paiera donc de taxe d’habitation sur la résidence principale à partir de 2023, et dès 2020 pour 80 % des foyers qui ne font pas partie des plus aisés. Afin de compenser « à l’euro près », selon la promesse du gouvernement, le manque à gagner pour les collectivités, un nouveau schéma de financement entrera en vigueur en 2021 qui permettra aux communes de disposer de l’actuelle part départementale de la taxe foncière, tandis que les intercommunalités et les départements bénéficieront d’une part de la TVA.
Autonomie financière respectée mais perte d'« environ 100 millions d'euros »
Les magistrats de la rue Montpensier ont écarté les critiques des sénateurs et des députés qui les avaient saisis en estimant que ni l’autonomie financière ni la libre administration des collectivités ne sont remises en cause par la réforme fiscale.
Selon eux, le fait que les communes et EPCI qui ont augmenté le taux de la taxe d’habitation en 2018 et 2019 ne bénéficieront pas du produit de cette hausse en 2020 et pour le calcul de la compensation est parfaitement conforme à la Constitution. Si « la perte pour 2020 du produit de la taxe d'habitation résultant […] de la non-prise en compte de cette hausse » représente « environ cent millions d'euros, soit 0,1 % de leurs recettes de fonctionnement », celle-ci « ne constitue pas une diminution de leurs ressources d'une ampleur de nature à entraîner une atteinte aux exigences constitutionnelles », ont-ils fait valoir, alors que les députés de gauche estimaient, notamment, que cette mesure induisait « une instabilité normative impactant gravement la prévisibilité budgétaire et financière pour les collectivités ».
Le Conseil constitutionnel a également écarté la critique des sénateurs de droite qui pointaient le risque que « la part des ressources propres des départements pourrait être fortement diminuée et sera en tout état de cause beaucoup plus dépendante des aléas économiques ». Selon les juges, la part de TVA remplaçant la taxe foncière sur les propriétés bâties est bien « une ressource propre ». Et, dans le cas où « la part des ressources propres dans l'ensemble des ressources des départements devenait inférieure au seuil minimal […] en raison d'une forte baisse du produit de TVA, il appartiendrait à la loi de finances […] d'arrêter les mesures appropriées pour rétablir le degré d'autonomie financière des communes au niveau imposé par le législateur organique », ont-ils notamment rappelé.
« Relativité arithmétique du droit »
Se félicitant de la décision du Conseil constitutionnel qui permettra de « donner de la visibilité » aux collectivités « avant les élections municipales », Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, et Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, ont à nouveau assuré, dans un communiqué, que « l’État assumera la compensation intégrale des collectivités ». Toutefois, la question de l’intégralité de la compensation se pose pour les collectivités dans la mesure où elle est calculée sur les taux de taxe d'habitation de 2017 et non pas sur les derniers taux votés, engendrant cette perte « d'environ cent millions d'euros », calculée par le Conseil constitutionnel.
Ils ont, par ailleurs, rappelé que « les conséquences de la réforme de la fiscalité locale sur les indicateurs financiers des collectivités et la répartition des dotations et fonds de péréquation, sont anticipées et donneront lieu à des travaux dès janvier 2020 ». Des travaux qui devraient aboutir « lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2021, pour une application à compter de la répartition des dotations en 2022 ».
Du côté des associations d’élus, le secrétaire général de l’AMF, Philippe Laurent, a critiqué cette décision : « Le Conseil constitutionnel a définitivement fait le choix de la centralisation, il valide le fait que l’annonce d’une loi vaut la loi elle-même et introduit la « relativité » arithmétique du droit », a-t-il estimé sur Twitter. Le président de l’Assemblée des départements de France, Dominique Bussereau, a, quant à lui, « suggéré au gouvernement une lecture très attentive de la décision sur le transfert du foncier bâti ».
Société du Grand Paris : le prélèvement des DMTO censuré
Outre la réforme de la fiscalité locale, les magistrats de la rue Montpensier ont censuré l’article du projet de loi de finances instaurant un prélèvement sur les DMTO par les départements d’Île-de-France et la ville de Paris au profit de la Société du Grand Paris. Bien qu’ils « ne préjuge[nt] pas de la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles », cette mesure a été « adopté selon une procédure contraire à la Constitution, faute de trouver sa place dans la loi de finances ».
A.W.
Consulter la décision du Conseil constitutionnel.
Consulter la loi de finances parue au JO.
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