Manifestation de maires à Toulouse contre les ponctions budgétaires
Par Franck Lemarc
Peu à peu, les conséquences des ponctions que le gouvernement se prépare à opérer sur les budgets locaux deviennent concrètes. Cette ponction est désormais évaluée à 11 milliards d’euros par André Laignel, président du Comite des finances locales. Si ce chiffre est considérable, il ne suffit pas à se rendre compte des conséquences concrètes de ces coupes, à l’échelle communale ou intercommunale. La manifestation qui a eu lieu hier et les témoignages des maires qui s’y sont rendus sont éclairants sur le sujet.
« Un séisme qui se prépare »
À Toulouse, les élus ont sorti la calculette, et le constat est effrayant : la ville va devoir économiser en 2025 quelque 25 millions d’euros. Et la métropole, 45 millions d’euros. « Moins 70 millions d’euros dans les caisses dès le 1er janvier prochain, c’est quelque chose d’absolument énorme, que nous n’avons jamais connu », a commenté hier Jean-Luc Moudenc, maire de Toulouse, lors de ce rassemblement. Première conséquence : il n’y aura aucune embauche en 2025 à la mairie. « J’ai également annoncé que nous allons nous retirer du financement de l’enseignement supérieur. On y était depuis une vingtaine d’années. Mais c’est une compétence de l’État, alors aujourd’hui c’est terminé. »
La presse locale, notamment La Dépêche, a recueilli le témoignage de bien d’autres maires « catastrophés » par l’ampleur de la ponction. Thierry Suaud, maire de Portet-sur-Garonne, explique ainsi que les mesures prévues par le gouvernement vont avoir « trois types de conséquences » : « On va devoir étaler les investissements, ce qui va impacter les entreprises et l’emploi local ; deuxièmement, on va étaler les projets, ce qui veut dire que notre patrimoine public va s’abîmer. Troisième conséquence, on a devoir faire des économies de fonctionnement, ce qui va affecter le service aux habitants. Les associations, le sport, la culture, la police municipale, l’intervention dans les écoles – tout cela va être remis en cause, abîmé, altéré. Bref, c’est un séisme qui se prépare. »
Mêmes craintes chez le maire de Blagnac, Joseph Carles, qui craint « d’avoir du mal à faire fonctionner les crèches, les écoles faute d’Atsem » , et se dit « inquiet pour le devenir du service public de proximité ».
Quant à la maire de Colomiers, Karine Travail-Michelet, dont la commune va perdre 3,4 millions d’euros, elle explique à La Dépêche que « tous les maires sont en train de faire des listes : quel projet va-t-on arrêter ? Quelle subvention va-t-on baisser ? Fermera-t-on la piscine deux jours par semaine ? Embauchera-t-on des policiers municipaux ? Pourra-t-on rénover les écoles ? ».
« Congrès de la colère »
Fait rarissime – cela ne s’était pas vu depuis 2014 et la baisse massive des dotations décidées sous François Hollande – des dizaines de communes du département ont décidé de fermer symboliquement la mairie pendant cette journée, pendant que leur maire allait manifester à Toulouse. C’est le cas de la communauté d’agglomération Muretain agglo, dont les 26 mairies sont restées fermées hier. Lors du conseil communautaire qui s’est tenu mardi dernier, tous les élus ont cosigné une « lettre ouverte » au président de la République et au Premier ministre, disant notamment : « C’est une décision unanime des 26 maires du territoire, l’expression d’un ras-le-bol que nous vous adressons personnellement, vous qui ciblez et asphyxiez les collectivités locales. (…) Ce n’est pas nous, les maires et présidents, qui avons creusé la dette par des décisions politiques fiscales et budgétaires inefficaces et coûteuses relevant plus de l’idéologie et de l’amateurisme que de l’efficience et du sérieux. »
Le président du département de la Haute-Garonne, Sébastien Vincini, était lui aussi présent au rassemblement, uni avec les maires et dénonçant « un mur d’efforts quasi insurmontable ». Le département va perdre l’an prochain plus de 160 millions d’euros et va devoir, de l’aveu du président, se livrer « à un véritable plan social ».
Plusieurs élus, lors du rassemblement d’hier, ont évoqué le congrès des maires à venir, du 19 au 21 novembre à Paris, décidés à en faire « le congrès de la colère ». Des propos qui entre en résonnance avec ceux du président de l’AMF, David Lisnard, qui alertait mardi, devant la presse, du risque que « les prochains Gilets jaunes soient en écharpe tricolore ».
Nul doute que le Premier ministre, qui devrait être présent à la clôture du congrès, va devoir s’expliquer devant des maires qui, pour beaucoup, ne savent pas tout simplement comment ils vont pouvoir « continuer à faire tourner la boutique », comme le disait l’un d’entre eux hier, à Toulouse.
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