Finances locales : l'épargne brute des communes devrait se contracter en 2023
Par A.W.
« L’exercice en cours se terminera sans doute difficilement. » C’est le constat de La Banque postale dans sa dernière note de conjoncture sur les finances locales, publiée vendredi, dans laquelle elle estime que « les excellents résultats constatés fin 2022 pourraient n’avoir été, pour diverses raisons, qu’un sursaut ».
« En dépit d’une forte croissance de ce qui peut rester de fiscalité directe, pour des raisons plus conjoncturelles que délibérées, et des mesures de soutien décidées par le législateur, la reprise des dépenses d’action sociale, la poursuite de la hausse des prix en matière énergétique et alimentaire, la croissance inévitable de la masse salariale, combinées à la chute accélérée des droits de mutation à titre onéreux et à un net ralentissement du dynamisme de la TVA, devraient se traduire par une diminution sensible de l’autofinancement » des collectivités dans leurs budgets 2023, selon La Banque postale.
Effet de ciseau
Sans surprise, les collectivités demeurent donc confrontées aux mêmes défis que l’année précédente, c’est-à-dire l’inflation et la hausse des frais de personnel. Dans ce contexte, La Banque postale estime qu’elles devraient subir un effet de ciseau à la fin 2023, leurs recettes (+ 3,2 %) progressant moins rapidement que leurs dépenses de fonctionnement (+ 5,8 %).
Ces dernières augmenteraient ainsi sous le poids des charges à caractère général (achats, contrats de prestations de services…) « très fortement touchées par la hausse des prix », et des frais de personnel, alourdies notamment par la revalorisation du point d’indice. Deux postes en hausse de 9,4 % et de 5,1 %, respectivement.
Or la progression des recettes serait « dans l’ensemble insuffisante » pour maintenir un niveau d’épargne équivalent à celui de 2022. Le dynamisme des recettes fiscales assises sur les valeurs locatives, revalorisées de 7,1 %, serait, en effet, « tempéré » par la « forte baisse » (autour de - 20 %) des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), « en lien avec la dégradation du marché de l’immobilier », et le ralentissement de la dynamique de la TVA, après « une année 2022 exceptionnelle ».
Résultat, leur épargne brute – qui représente la différence entre leurs recettes et leurs dépenses – diminuerait de 9 % cette année.
Communes : l'autofinancement en baisse de 2,6 %
Si les départements subiraient une chute impressionnante de leur épargne brute de plus de 30 % (victime de la forte baisse des DMTO), les communes verraient la leur baisser de manière relativement contenue (- 2,6 %, après s’être maintenue l’an passé), tout comme les régions (- 1,7 %). À l’opposé, les intercommunalités verraient leur autofinancement légèrement progresser de 0,3 %.
S’agissant des communes, ce sont les hausses des prix de l'énergie et de l’alimentaire qui les impacteraient sensiblement avec une augmentation de 5,5 % de leurs dépenses de fonctionnement tandis que leurs recettes progresseraient moins rapidement, à hauteur de 4,3 %.
« La taxe foncière sur les propriétés bâties, principal impôt communal (59 % des recettes fiscales), augmenterait de 9,4 % en raison d’une évolution des bases tirée par la revalorisation forfaitaire de 7,1 % […] et d’une hausse des taux de l’ordre de 2,6 % en moyenne nationale », expliquent les auteurs de la note de conjoncture. En parallèle, « la taxe d’habitation sur les résidences secondaires s’élèverait à 2,2 milliards d’euros : elle bénéficierait également de la hausse des bases et d’un effet taux retrouvé (ils étaient encore gelés en 2022) de 3,8 % ».
« L’accroissement de la pression fiscale, relativement importante comparée aux années précédentes, serait en réalité le fait de fortes hausses sur un petit nombre de communes », soulignent-ils, rappelant que, « globalement, ce dynamisme serait atténué par le très net recul des DMTO, notamment dans les plus grandes communes, celles de moins de 5 000 habitants les percevant via un fonds départemental avec un décalage d’un an ».
Des investissements toujours dynamiques
Malgré cette contraction des marges de manœuvre financière, les communes poursuivraient, toutefois, leurs investissements, « rompant [ainsi] avec le cycle électoral traditionnellement observé », note La Banque postale.
Après 10,8 % l’an passé, les dépenses d’investissement progresseraient de 7,8 % cette année. Et si « l’augmentation des coûts de la construction et des travaux publics explique une partie de cette hausse », cette dernière serait « aussi le fait de l’engagement des communes dans de nouveaux projets dont la réalisation est notamment nécessaire au regard des défis de la rénovation du patrimoine et de la transition écologique », souligne-t-elle.
Plus globalement, l’investissement resterait « particulièrement dynamique » pour l’ensemble des collectivités, en accélération par rapport à l’année précédente (+ 9,1 %), « du fait du recours à l’emprunt, mais aussi, fait notable de 2023, par un prélèvement important sur le fonds de roulement ».
Perspectives pour 2024
La Banque postale esquisse, en parallèle, les évolutions pour l’année prochaine.
« Alors qu’en 2023, les collectivités locales ont bénéficié d’une très forte revalorisation de leurs bases foncières, en 2024, elle devrait être un peu moindre », prévoit-elle, prédisant également un ralentissement de l’évolution des recettes de la TVA.
Les DMTO, eux, « continueront d’être influencés par les conditions d’évolution des ventes dans l’immobilier qui s’inscrivent en baisse continue depuis le début 2023 », au grand dam des départements puisqu’ils représentent leur deuxième recette fiscale derrière la TVA.
En revanche, « les recettes de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) devraient augmenter » puisque le nombre de municipalités pouvant en instaurer une majoration a été étendu à 2 500 nouvelles communes.
En parallèle, la forte hausse des prix actuelle devrait s’étaler de nouveau « jusqu’en 2024 ». La Banque postale rappelle, en outre, que, à partir de janvier 2024, « tous les agents de la fonction publique se verront attribuer 5 points d’indice supplémentaires, soit environ 25 euros de plus par mois par agent », que le taux de la cotisation pour la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) sera réévalué d’un point et que les employeurs territoriaux prendront en charge, progressivement en 2025 et 2026, une partie des frais de prévoyance (assurances incapacité, invalidité) et de complémentaires santé (mutuelles) des agents.
« Rien n’empêche évidemment d’être optimiste pour l’avenir, en escomptant un réel ralentissement de l’inflation, une reprise économique que faciliterait ce dernier, et partant une stabilisation voire une amélioration de l’emploi », tempère La Banque postale.
Télécharger la note de conjoncture.
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