Maire-info
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Édition du vendredi 12 juillet 2024
Droit funéraire

Les délais maximums d'inhumation et de crémations portés à 14 jours calendaires

Un décret publié hier au Journal officiel modifie le Code général des collectivités territoriales sur un certain nombre de points relatifs au droit funéraire. Il allonge notamment les délais maximums d'inhumation et de crémation, « afin de remédier à l'augmentation croissante des demandes de dérogation à ces délais ».

Par Franck Lemarc

Ce décret a connu un accouchement difficile, puisqu’il paraît plus d’un an après sa présentation devant le Conseil national des opérations funéraires (Cnof), alors que la DGCL, à ce moment, espérait une parution à l’automne 2023. 

Fin des cachets de cire

Le décret comprend d’abord quelques mesures techniques de moindre importance : d’abord, l’autorisation d’utiliser d’autres techniques que la gravure pour les plaques de cercueil. Alors que jusqu’à présent le CGCT imposait que le cercueil soit muni « d’une plaque gravée »  indiquant les informations d’état civil du défunt, la nouvelle rédaction dispose simplement que ces informations sont portées sur le cercueil « par un procédé garantissant le caractère durable de ces mentions ». 

Autre modification : il n’est désormais plus inscrit dans le Code que l’usage de la cire est obligatoire pour sceller le cercueil. Le décret remplace les mots « cachets de cire », à l’article R2512-36 du CGCT, par le mot « scellés ». Comme l’a expliqué la directrice générale des collectivités locales, Cécile Raquin, lors de la séance du Cnof, les services de police n’ont plus recours à la cire depuis bien longtemps, utilisant à la place des scellés autocollants. « Dès lors, il n’y a pas de raison de contraindre à l’utilisation de la cire dans le Code », même si « son utilisation sera toujours possible pour les nostalgiques ». 

Passage à 14 jours calendaires

Si ces points n’ont suscité quasiment aucun débat lors de la séance du Cnof, il n’en a pas été de même de l’objet essentiel du décret, à savoir l’allongement des délais maximums d’inhumation et de crémation. 

Jusqu’à présent, le CGCT disposait que l’inhumation ou la crémation doivent avoir lieu « 24 heures au moins et 6 jours au plus »  après le décès, les dimanches et jours fériés n’étaient « pas compris dans le calcul de ces délais ». Le Code prévoit qu’en fonction de « circonstances particulières », ces délais peuvent être dérogés par les préfets.

Le décret paru hier porte ce délai maximal à « 14 jours calendaires »  à compter du lendemain du décès. 

La DGCL a expliqué les raisons de cette modification devant le Cnof : elle a mené une enquête exhaustive auprès des préfectures sur les dérogations accordées sur le délai maximal de 6 jours ouvrés, et cette enquête a fait apparaître une augmentation de « plus de 87 % »  du nombre de dérogations en 2022 par rapport à 2019. Les demandes de dérogation sont acceptées par les préfectures dans 98,8 % des cas, ce qui signifie que celles-ci ne jouent pour un ainsi dire « qu’un rôle d’enregistrement ». Les préfectures ont expliqué à la DGCL qu’il était « la plupart du temps impossible de refuser les demandes de dérogation », dans la mesure où celles-ci sont le plus souvent liées à « la saturation des plannings des crématoriums ». 

C’est donc pour tenir compte de cet état de fait que la DGCL propose de passer le délai à 14 jours calendaires – le passage d’un délai en jours calendaires plutôt qu’en jours ouvrés permettant de « simplifier les calculs » : « On prend maintenant tous les jours, y compris les dimanches et jours fériés ». 

Par ailleurs, pour faire face à des circonstances particulières (épisode de surmortalité par exemple), les préfets pourront désormais décider d’accorder une dérogation générale, sur tout le département, portant à 21 jours calendaires le délai maximum, pour les seules inhumations. Cette dérogation sera possible sur une durée d'un mois renouvelable

La DGCL a bien insisté sur le fait qu’il s’agit d’une simple mesure de « simplification administrative », visant simplement à faire diminuer le nombre de demandes de dérogations arrivant en préfectures et accordées systématiquement. « Si l'opérateur peut faire avant, si la famille souhaite faire avant, normalement, cela sera fait avant. Il n'y a pas d'intérêt à attendre le délai maximum de 14 jours. Il s'agit simplement d'éviter des situations dans lesquelles la chaîne funéraire est empêchée, qui nécessitent ensuite d'aller solliciter la préfecture. » 

Le coût pour les familles

Ces modifications, si elles ont été plutôt bien reçues par les opérateurs, n’ont en revanche pas suscité l’enthousiasme des associations familiales représentées au Cnof. La principale question qui a été soulevée, sans trouver d’ailleurs de véritable réponse pendant la séance du Cnof, est celle de la conservation du corps. Le représentant de l’Union nationale des associations familiales (Unaf), a posé la question : si l’on passe de manière systématique à « 10 ou 14 jours », « où le corps va-t-il être gardé, d’une part, et deuxièmement, qui va payer ? ». En effet, que le corps soit conservé dans une chambre mortuaire à l’hôpital ou chez un opérateur, les frais de cette conservation sont à la charge des familles au-delà de trois jours. La mesure pourrait donc conduire à un renchérissement des obsèques. 

Pour les opérateurs de pompes funèbres, cela ne sera pas forcément le cas, au contraire : l’allongement des délais pourrait enlever de la pression aux familles et leur donner davantage de temps pour « faire des devis »  et choisir l’offre la moins coûteuse. 

Les opérateurs ont également fait remarquer que la crémation étant une solution de plus en plus fréquemment choisie par les Français, le nombre de crématoriums est « en forte croissance », ce qui devrait conduire à une réduction des délais. « On a aujourd’hui plus d’une vingtaine de crématoriums en construction, les choses s’améliorent ». 

Rappelons que ces questions concernent de près les communes et EPCI, puisque les collectivités sont seules compétentes pour créer et gérer des crématoriums, que soit en régie (environ 20 % des cas) ou en délégation de service public (80 %). 

Le décret, paru hier, entre donc en vigueur aujourd’hui et n’est pas rétroactif :  ses dispositions ne s’appliquent qu’aux opérations concernant « des personnes décédées postérieurement à leur entrée en vigueur ». 

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