Bercy : dernier tour de vis avant fermeture
Par Franck Lemarc
En sept années passées à Bercy, et jusqu’à la dernière minute, Bruno Le Maire n’a jamais changé d’avis sur un point : les collectivités locales dépensent trop et il faut leur imposer des économies. À quelques jours de la démission probable du gouvernement, au moment de l’ouverture de la session parlementaire, le discours n’a pas varié : Bruno Le Maire, s’il restait aux affaires, demanderait aux collectivités une diminution de leurs dépenses de 2 milliards d’euros.
15 milliards d’euros à trouver
C’est ce qui ressort d’une tribune parue hier dans Le Figaro, dans laquelle le ministre détaille le dernier étage du plan d’économies budgétaires annoncé cet hiver pour faire face au dérapage du déficit de l’État, qui devrait encore être supérieur à 5 % du PIB cette année.
Selon Bruno Le Maire, ce sont 25 milliards d’euros que la France doit économiser dès cette année, soit par le biais de réductions des dépenses, soit par celui de hausses des recettes. Un peu plus de la moitié du travail a été faite, puisque, on s’en souvient, Bercy a annoncé en février un premier plan de 10 milliards d’économies sur les crédits de tous les ministères (lire Maire info du 22 février), à quoi s’ajoutent les 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires que devraient apporter la hausse de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité.
Il reste donc 15 milliards d’euros à trouver pour atteindre les « 25 milliards » nécessaires pour que la France « ne diverge pas de ses partenaires de la zone euro », ce qui serait pour Bruno Le Maire « une faute économique et politique majeure ». « Je suis encore ministre de l’Économie et des Finances », a rappelé hier Bruno Le Maire lors d’un point presse. « Ma responsabilité, c'est de garantir la continuité de l'État et maintenir l'objectif de 5,1% de déficit public en 2024. »
C’est ce qui l’a conduit, comme si de rien n’était, à « notifier » hier à tous les ministères les crédits qu’ils vont devoir annuler – la répartition n’a pas été rendue publique. « Nous gèlerons tous les crédits au-dessus (des) plafonds » qui ont été notifiés, a indiqué le ministre.
Pour atteindre les 10 milliards d’euros nécessaires, il reste 5 milliards à trouver. Le ministre de l’Économie a indiqué que trois vont venir d’une hausse de la taxation des grandes entreprises de l’énergie, et que les deux derniers milliards seront demandés « aux collectivités locales ». Les modalités n’ont pas été précisées, mais le gouvernement, depuis des mois, explique que cela se fera sous la forme d’une demande de diminution des dépenses de fonctionnement, sans contrainte comparable aux « contrats de Cahors » de triste mémoire.
Bruno Le Maire, qui est tout de même conscient qu’un nouveau gouvernement va, tôt ou tard, être nommé, a précisé hier que celui-ci aura « tout loisir » de dégeler les crédits gelés s’il le souhaite.
Doubler ou tripler les dépenses pour la transition écologique
Hasard du calendrier, ces annonces sont intervenues le jour même où l’institut I4CE, spécialisé dans les questions de financement de la transition écologique, a publié une note dans laquelle il explique que l’atteinte des objectifs de la France en matière de transition écologique va demander… un triplement des dépenses publiques d’ici 2020.
I4CE rappelle que l’État et les collectivités locales dépensent environ 32 milliards d’euros par an pour des mesures liées à la transition écologique et énergétique aujourd’hui. Mais pour atteindre l’objectif d’une diminution de 55 % des émissions en 2030, il faudrait selon l’institut consacrer plus de 70 milliards de plus par an à ces mesures (rénovation des bâtiments, mobilité, électrification du parc automobile, etc.).
L’institut estime néanmoins qu’en cette période de réduction des dépenses publiques, il serait possible de réduire la facture à un « minimum » de « 39 milliards supplémentaires » au lieu de 71 milliards, ce qui représenterait tout de même un doublement des dépenses actuelles.
Voilà qui apparaît, comme l’écrit I4CE, comme « un défi pour les finances publiques ». Comment concilier la nécessaire hausse des dépenses pour réaliser la transition écologique et la lutte contre le dérapage des déficits ? Faudra-t-il finir par augmenter les recettes (c’est-à-dire les impôts), ou décider d’une diminution drastique des dépenses publiques dans d’autres domaines que la transition écologique ? Ces questions vont être au cœur de la fabrication du projet de loi de finances pour 2025 qui, rappelons-le, doit être déposé au Parlement au plus tard le premier mardi d’octobre. Reste à savoir quel gouvernement sera chargé de le rédiger, question à laquelle personne n’a, à cette heure, le plus petit élément de réponse.
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