Des députés veulent à nouveau tenter de restaurer le cumul des mandats
Par A.W.
Nouvelle tentative de revenir sur la loi sur le non-cumul des mandats. Le député LR de la Meurthe-et-Moselle, Thibault Bazin, et plusieurs membres de son groupe viennent de déposer à l’Assemblée une nouvelle proposition de loi visant à « restaurer la confiance » en abrogeant ce texte voté en 2014 sous la présidence de François Hollande, mais largement critiqué depuis.
Plusieurs échecs déjà
Interdisant depuis 2017 d'être à la fois parlementaire national ou européen et titulaire d'un mandat exécutif local, ce texte est régulièrement remis en cause par une partie de la classe politique qui juge que les élus nationaux et européens seraient désormais « déconnectés » du terrain puisqu’ils n’ont plus de responsabilités locales.
Au printemps dernier, les députés Horizons avaient déjà échoué - de justesse - à faire adopter un texte assouplissant la loi pour certains élus locaux… mais simplement pour des raisons de procédure (dépassement du temps imparti avant le vote), la majorité des députés présents l'ayant bien soutenu. Les sénateurs avaient, sans plus de succès, eux aussi, tenter de relancer le débat en 2021, leur texte ayant été pour sa part rejeté par l’Assemblée nationale.
« Déconnexion » et « hypocrisie »
Pourquoi vouloir abroger cette loi ? Pour les députés signataires du texte, le bilan de la loi de 2014 est « négatif ». Sans surprise, ils reprennent l’argumentaire assurant que l’interdiction du cumul des mandats est « à l’origine d’une forme regrettable de déconnexion de certains élus, qui, par exemple, ne comprennent pas les difficultés concrètes que les normes qu’ils votent pourraient créer ».
D’autre part, cette interdiction n’aurait « pas permis de combler le déficit de proximité entre les élus nationaux et leurs électeurs », selon les députés LR, qui soulignent que « cette loi entretient une forme d’hypocrisie ». Alors qu’elle interdit à « un député d’être maire d’un village de quelques centaines d’habitants », elle permet dans le même temps à « un ministre de rester président de conseil départemental », dénoncent-ils.
Partant du principe que « l’opportunité du cumul de plusieurs mandats » par un élu doit être « tranché par les électeurs », ils proposent donc, dans un très succinct article, d’abroger définitivement la loi actuelle. Ils précisent, toutefois, que « le rétablissement de la possibilité d’un cumul des mandats se fera dans le respect des règles actuelles de plafonnement des indemnités ». Autrement dit, « cette abrogation ne conduira pas les élus à être mieux rémunérés ».
La gauche opposée à « toute régression »
On peut rappeler que celui qui était encore Premier ministre démissionnaire ce matin, Michel Barnier, s’était dit ouvert à l’idée, lors des assises des Départements de France, il y a un mois, et plaidait pour « une réflexion pluraliste afin d’évaluer et remettre à plat l'interdiction du cumul des mandats, dans l'objectif de rapprocher les élus nationaux et européens des citoyens ». « Cette loi fait qu'aujourd'hui, par exemple, [parmi les] centaines de parlementaires, il n'y a plus de maire. Il n'y a plus de maire ! », avait-il également déploré lors du congrès des maires, confirmant là aussi son ouverture « sur cette question, sans tabou et sans idéologie ».
« C'est un peu dommage que [...] des élus locaux ne puissent pas aller directement à Paris eux-mêmes pour porter un grand nombre de préoccupations ou de sujets », avait-il regretté lors d'un entretien, soulignant que « dix ans après, il est normal d'évaluer une loi ». Et celui-ci de défendre : « Si on s'aperçoit que cette loi présente plus d'inconvénients que d'avantages, comme je pense que c'est le cas dans ce lien entre les citoyens et les élus, on pourrait sur certains points la revoir ».
Une majorité de groupes parlementaires (Renaissance, MoDem, Horizons, LR et RN) est également favorable au retour des députés-maires et des sénateurs-maires, certains ayant, toutefois, proposé par le passé l’application de certaines restrictions et certains seuils de population.
Du côté des partisans du statu quo, les députés de gauche se sont fortement opposés en début d’année à « toute régression en ce domaine ». Que ce soient les députés socialistes, à l’origine de la loi de 2014, écologistes ou bien « insoumis », ces derniers ayant même tenté au printemps de durcir la loi en refusant aux députés et sénateurs d’être conseillers régionaux ou départementaux.
En début d'année, ils avaient réussi à faire abandonner la proposition de loi des députés Horizons durant leur « niche parlementaire » en déposant de nombreux amendements et en usant de tous les moyens possibles pour jouer la montre (interruptions de séance, rappels au règlement, interminables interventions sur chaque amendement). Ils étaient ainsi parvenus à atteindre minuit – délai maximal pour adopter un texte issu d’une « niche » - sans que l’ensemble des amendements aient été examinés, et ce, bien que l’unique article de la proposition de loi ait été adopté, mais pas le texte lui-même.
En attendant, on ne sait pas, pour l’heure, si ce texte LR sera examiné prochainement en commission ou pas.
Consulter la proposition de loi.
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