Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 25 janvier 2024
Logement

Crise du logement : les acteurs de la filière lancent « un appel de la dernière chance »

Dix fédérations professionnelles du secteur du logement, réunies dans l'Alliance pour le logement, ont tenu une conférence de presse le 24 janvier sur la crise qui sévit depuis des mois. Elles réclament de toute urgence une véritable politique publique de la part du gouvernement et un plan stratégique pour les trois années à venir.

Par Bénédicte Rallu

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© MdF

« La crise est grave »  ! Si grave pour les professionnels du secteur du logement (bâtiment, logement social, bailleurs privés, notaires, architectes, promoteurs immobiliers…) (1), qu’ils se sont réunis dans une Alliance pour le logement afin de faire prendre conscience aux pouvoirs publics, en particulier au gouvernement et au président de la République, de l’urgence à réagir contre la crise qui s’est installée.

Depuis 2022, ces dix fédérations et unions alertent, mais disent «ne pas être entendues », voire «être méprisées »  par l’exécutif. L’échec du conseil national de la refondation pour le logement en 2023 leur a laissé un goût amer. « Nous ne voulons plus de concertations. Les propositions sont sur la table. Il nous faut maintenant des actes » , assènent-ils tour à tour lors d’une conférence de presse tenue à Paris le 24 janvier. En premier lieu, il faut un(e) ministre du logement, une politique publique volontariste et une stratégie pour les trois ans à venir. « Cette visibilité s’avère indispensable pour investir et prendre des décisions » , soulignent-ils.

44% des projets rencontrent des difficultés

Selon un sondage Viavoice réalisé pour l’occasion (2), 83 % des répondants pensent qu’il y a une crise du logement aujourd’hui en France. 32 % ont au moins un projet d’achat ou de location d’un logement. Ceux qui se lancent rencontrent des difficultés dans leur projet pour près d’un cas sur deux (44 %) : les questions financières en sont les premières causes, disent-ils, puis le manque de logements adaptés aux situations personnelles (familles recomposées, monoparentales, télétravail…) et le manque de logements disponibles.

Pour les trois-quarts des répondants, le gouvernement n’aurait pas pris la mesure de la crise. Or ils ont le sentiment que des mesures pourraient apporter des solutions, comme les dispositifs de soutien à l’accession à la propriété, l’allègement de la fiscalité immobilière (TVA, droits de mutations…), la relance de l’accession sociale, un accroissement des aides pour les travaux de rénovation énergétique, la construction de logements sociaux, etc.

Il y a « urgence » 

« Nous ne pouvons pas attendre le projet de loi de finances 2025, avertit Olivier Salleron, le président de la Fédération française du bâtiment (FFB). Il nous faut des réponses lors des prochaines semaines. Il y a urgence. Le logement est un paquebot et une chaîne d’acteurs » , qui, sous-entendu, ne tiendront pas encore très longtemps. Si jamais ceux-ci venaient à disparaître, la machine serait très longue à pouvoir être relancée.

« Il est vital d’avoir une réaction du gouvernement et au plus haut niveau de l’État dans les prochaines semaines. La situation est dramatique, des gens meurent dans la rue et dans leur voiture faute de logement. Nous n’arrivons plus à répondre aux besoins de nos concitoyens. C’est un appel de la dernière chance » , s’est emportée Emmanuelle Cosse, la présidente de l’Union sociale pour l’habitat. « Nous connaissons l’une des crises immobilières les plus graves depuis l’après-guerre » , appuie le président de la FNAIM, Loïc Cantin.

Une aide pour les maires bâtisseurs

Les professionnels ont rappelé quelques-unes de leurs propositions : rétablissement du prêt à taux zéro, exonération partielle des droits de mutations, limitation des refus de crédits, simplification et massification de la rénovation énergétique, revenir sur la baisse des aides publiques au logement (APL, etc).

La Fédération de la promotion immobilière (FPI) propose notamment une aide aux maires bâtisseurs en octroyant « une part de TVA à ceux qui font plus de logements que d’habitude » , explique Pascal Boulanger, le président de la FPI. Aujourd’hui, selon lui, certains maires refuseraient de signer des permis de construire, pourtant conformes au plan local d’urbanisme, afin d’éviter les recours d’administrés mécontents. Attribuer des recettes supplémentaires aux communes corrélées à l’effort de construction légitimerait en quelque sorte la signature des permis de construire.

Connexion fiscalité et aménagement du territoire

Le sujet de « la connexion entre fiscalité et aménagement du territoire »  constitue un autre problème à résoudre, pour Grégory Monod (Pôle Habitat de la FFB), afin d’éviter la spirale inflationniste dans certaines zones. Aujourd’hui, il y a une «anomalie dans le zonage qui est contraire à une véritable politique d’aménagement du territoire », appuie Yannick Borde, président de Procivis (coopératives de toute la chaîne du logement) et lui-même élu local. «Il n’y aura pas de réindustrialisation du pays et de plein emploi sans politique du logement ! » 

Tous attendent beaucoup de la déclaration de politique générale que le premier ministre, Gabriel Attal, doit prononcer le 30 janvier, et des orientations qui seront prises.      

(1)    Fédération française du bâtiment (FFB), Unions sociale pour l’habitat (USH), Fédération nationale de l’Immobilier (FNAIM), Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), Pôle Habitat de la FFB, Procivis (coopératives de toute la chaîne du logement), Unis (professionnels de l’immobilier), Union nationale des notaires Employeurs (UNNE), Union des Architectes (Unsfa), Union nationale des Economistes de la construction (Untec)
(2)    Enquête Viavoice réalisée auprès d’un échantillon représentatif de la population française de 1005 personnes de plus de 18 ans, du 5 au 8 janvier 2024 (Interview en ligne, selon la méthode des quotas). 

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