Catastrophes naturelles : l'Assemblée nationale propose une réforme moins hardie que celle du Sénat
En cette période d’inondations, le sujet est particulièrement d’actualité : le Parlement a enfin décidé de s’emparer du sujet de l’indemnisation des catastrophes naturelles, dont certains aspects sont autant décriés par les communes que par les sinistrés eux-mêmes.
Un texte « enrichi » ou … appauvri ?
C’est le 28 janvier dernier que les députés ont adopté le texte élaboré par les députés des groupes LaREM et MoDem, qui sera examiné en procédure accélérée.
Ce texte « descend » d’une proposition de loi adoptée le Sénat il y a un an, portée par la sénatrice socialiste de la Charente Nicole Bonnefoy (lire Maire info du 20 janvier 2020). À l’issue de l’examen de ce texte, le gouvernement avait promis de le retravailler pour « l’enrichir ». C’est ce travail qui a abouti à la rédaction par la majorité, à l’Assemblée nationale, d’un nouveau texte. Dire que le texte du Sénat a été « enrichi » relèverait un peu de l’exagération, puisque sa principale mesure – le déplafonnement du Fonds Barnier – a été supprimée. Le gouvernement avait également promis, il y a un an, de travailler sur l’amélioration de la couverture assurantielle outre-mer (seule la moitié des biens est assurée outre-mer, contre 98 % en métropole) ; mais ce sujet n’est pas non plus abordé dans le nouveau texte.
Transparence de l’instruction
En revanche, le texte adopté par l’Assemblée reprend une partie des propositions des sénateurs en particulier sur les conditions de déclaration de l’état de catastrophe naturelle. La transparence de cette décision, prise par une commission interministérielle, est souvent mise en cause, ainsi que la lenteur des procédures. Le texte renforce l’obligation de « motiver » la décision de la commission, et permet aux communes de former « un recours gracieux » contre l’arrêté interministériel, si celui-ci refuse la reconnaissance en état de catastrophe naturelle.
Le texte prévoit également la nomination dans chaque département d’un « référent à l’indemnisation des catastrophes naturelles » auprès du préfet. Il aurait pour tâche d’accompagner les communes dans leurs démarches, de les informer de l’avancement de l’instruction, et surtout « de s’assurer de la communication aux communes qui l’ont demandée des rapports d’expertise ayant fondé les décisions de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, dans des conditions fixées par décret. »
Le texte réforme la Commission interministérielle de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Créée par circulaire en 1984, cette commission souffre, dit l’exposé des motifs de la proposition de loi, « d’un fonctionnement opaque ». Le texte propose d’inscrire son existence et sa composition dans la loi. Il crée également une Commission consultative des catastrophes naturelles, chargée d’émettre chaque année un « avis sur la pertinence des critères appliqués pour la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ».
Indemnisations et franchises
Afin de « renforcer le droit des assurés », la proposition de loi vise à lutter contre « l’inefficacité de certaines réparations » qui sont susceptibles in fine « d’aggraver les dégâts ». L’article 5 du texte instaurerait une obligation pour les assureurs « de faire réaliser des travaux de nature à permettre un arrêt complet et total des désordres existants dans les limites du montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre ». Le délai de déclaration d’un sinistre serait étendu de 10 à 30 jours à compter de la publication de l’arrêté et le délai de versement par les assurances de trois à deux mois.
Sur la question des franchises enfin, la proposition de loi prévoit une réforme plus discutable que celle prévue l’an dernier par le Sénat. Rappelons que le système actuel prévoit une modulation de la franchise dans les communes non couvertes par un PPRN (plan de prévention des risques naturels) calculé en fonction du nombre d’occurrences de catastrophes naturelles. Plus il y a eu de catastrophes dans une même commune, plus la franchise est élevée en cas d’absence de PPRN (elle peut être quadruplée à partir du quatrième aléa !). Autrement dit, c’est l’assuré qui paye pour l’absence d’un plan dont la responsabilité incombe… au préfet, c’est-à-dire à l’État.
Il y a un an, les sénateurs avaient purement et simplement proposé de supprimer ce dispositif parfaitement injuste : « Aucune modulation de franchise à la charge des assurés ne peut être appliquée dans les communes non dotées d’un plan de prévention des risques naturels. »
Les députés ont repris cette disposition en l’assortissant d’une nuance : la modulation de la franchise serait bien supprimée pour les assurés, mais pas pour les biens « des collectivités territoriales et de leurs groupements », dans le cas où « un PPRN a été prescrit mais non approuvé dans les délais réglementaires ». Pour les biens des collectivités se trouvant dans cette situation, la modulation de la franchise resterait en vigueur, « afin de maintenir le caractère incitatif du dispositif », plaident les auteurs du texte. Ce dispositif interroge, dans la mesure où l’approbation du PPRN relève, la encore, du préfet et non des collectivités elles-mêmes.
Le texte a été déposé au Sénat, où il va être examiné prochainement.
F.L.
Télécharger la proposition de loi.
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