Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 28 octobre 2025
Budget de l'état

Budget 2026 : les députés revoient le mode de compensation de la CVAE, au profit des collectivités

Afin de ne « pas pénaliser injustement les collectivités », l'Assemblée a décidé hier d'exclure les années « covid » du calcul de la compensation mise en place après la suppression partielle en 2023 de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Dans la foulée, les députés ont avancé la suppression progressive – en trois ans d'ici 2028 – de la partie restante de cet impôt.

Par A.W.

Alors que les tractations continuent d’aller bon train sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2026, les députés ont vu le calendrier d’examen du texte être bouleversé et ont dû discuter en priorité, hier, des articles relatifs à la fiscalité des entreprises puisque le ministre de l’Économie, Roland Lescure, part en déplacement le reste de la semaine.

L’occasion pour eux d’adopter un amendement de LFI favorable aux finances des collectivités. Celui-ci exclurait les années « covid »  du calcul de la compensation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), un impôt dû par certaines entreprises qui devait initialement disparaître intégralement en 2024, après la suppression de sa première moitié en 2023. 

Une compensation « faussée » 

Un mode de calcul que la députée LFI de la Haute-Garonne, Anne Stambach-Terrenoir, a qualifié d’« arnaque complète »  dans l’hémicycle, avant de dénoncer une réforme qui « ne profite qu’aux plus grandes entreprises »  aux dépens de la « trésorerie des collectivités [qui] n’a jamais été aussi faible ».

Afin de « ne pas pénaliser injustement »  ces dernières, l’Assemblée a donc choisi de ne pas retenir « les années 2021 et 2022 »  dans la moyenne actuellement utilisée pour pallier leur perte de ressources – un autre amendement ne retenant que l’année 2023 a été, lui, rejeté. En effet, « ces exercices correspondent au produit de CVAE versée en 2020, année profondément marquée par la crise sanitaire […] qui a provoqué un effondrement temporaire de l’activité économique et une baisse mécanique des recettes fiscales des collectivités », explique le président de la commission des Finances, Éric Coquerel, dans son amendement, en estimant que « le maintien de ces années dans le calcul fausse la compensation en la minorant artificiellement, au détriment des communes, départements et régions ».

Les modalités choisies par le gouvernement d'Élisabeth Borne, à l'époque, avaient déjà été jugées « défavorables »  par l’AMF – mais aussi les Départements de France – qui soulignait que « plus de 650 millions d’euros manqu[ai]ent à l’appel »  pour l’année 2023. Les maires reprochaient, en effet, le mode de calcul de cette compensation, basé sur les recettes perçues par les communes, les intercommunalités et les départements durant les années 2020, 2021, 2022 et 2023 et qui « pénalis[ait] clairement les communes et leur intercommunalité ». Ils proposaient notamment que « l’année 2021, qui a enregistré une baisse exceptionnelle de la CVAE en raison de la crise sanitaire, [soit] exclue de ce calcul ». 

Suppression totale avancée en 2028

Comme le gouvernement, le rapporteur général du budget, Philippe Juvin (LR) a tenté, en vain, de s’opposer à cette modification du calcul et de balayer ces arguments. Étant donné que cet impôt « fluctue au fur et à mesure des années […] il faut le prendre sur un cycle sinon ça n’a pas de sens », a-t-il fait valoir, rappelant au passage que « la CVAE est une recette qui n’est pas en relation avec l’activité des entreprises »  et n’est donc « pas vertueuse ». Pour preuve, selon lui, « l’année du covid, en 2020, la CVAE a rapporté 19,5 milliards d’euros alors que l’année précédente, en 2019, c’était simplement 18,9 milliards », le député des Hauts-de-Seine ne précisant pas le rendement de 2021 qui « avait déjà perdu la [part réservée aux] régions ».

Dans ce contexte, les députés ont décidé d’avancer à 2028 la suppression progressive des quelque 4 milliards d’euros restants de CVAE, dont un tiers dès 2026. Bien que les collectivités soient à l'origine les principales victimes de la suppression de cet impôt, il faut rappeler que l'État avait déjà décidé de compenser à ces dernières la totalité de la CVAE, et non pas seulement la part supprimée en 2023. Seul le budget de l'État sera donc impacté si la baisse de la CVAE est définitivement actée dans le budget 2026.

À noter que l’Assemblée nationale a aussi approuvé un amendement du gouvernement, déposé au tout dernier moment, visant à alourdir la surtaxe sur les bénéfices des entreprises par rapport à la copie initiale du budget, tout en allégeant la charge sur les entreprises de taille intermédiaire. Une disposition qui ferait passer le rendement de la taxe à 6 milliards d'euros, contre 4 milliards d'euros prévus dans le projet initial (et 8 milliards en 2025). 

QPV : les exonérations fiscales prolongées

Les députés ont également voté l’article du projet de budget qui prolonge les exonérations fiscales pour les entreprises implantées dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), « conformément aux orientations »  du Comité interministériel des villes qui s’est tenu en juin dernier.

Ces aides fiscales, qui devaient prendre fin cette année, seraient ainsi prolongées jusqu’à la fin de 2030 pour « toutes les créations ou reprises d’entreprises ». Il est également prévu d’unifier ces exonérations autour d’un zonage unique en étendant « les exonérations applicables en matière d’impôts locaux en faveur des entreprises à l’impôt sur les bénéfices ».

De plus, les activités éligibles aux exonérations en QPV sont étendues aux « activités artisanales et de santé »  – et non plus aux seules activités commerciales – afin de « renforcer l’accès aux soins des habitants de ces quartiers et de favoriser la transmission des entreprises artisanales, y compris dans les QPV situés en outre-mer ».

Bail réel solidaire, PTZ, débroussaillement… 

Par ailleurs, plusieurs amendements visant à « accompagner le déploiement du bail réel solidaire »  (BRS) ont été adoptés afin de permettre aux acquéreurs successifs d’un tel logement de « pouvoir mobiliser un prêt à taux zéro »  (PTZ).

Sur ce sujet, l’USH a dénoncé, hier, un autre amendement déposé par les députés Renaissance Daniel Labaronne et Gabriel Attal qui viserait à augmenter le plafond d’éligibilité au BRS en l’ouvrant à « plus de 90 % de la population »  et lui ôtant « son caractère social ». Selon la fédération des bailleurs sociaux, cela porterait « un coup fatal »  au bail réel solidaire puisque ce déplafonnement « ouvrirait la porte à la suppression par Bercy des avantages consentis à la production d’un BRS qui n’aurait plus rien de social », tel que « la TVA à 5,5% », « les prêts bonifiés de très long terme »  ou encore « les soutiens forts d’un certain nombre de collectivités territoriales ».

Pour le reste, les députés ont voté plusieurs amendements augmentant les plafonds d’opération du PTZ, permettant aux sociétés publiques locales (SPL) de bénéficier du mécénat culturel en étendant le régime fiscal des dons ou encore adaptant le dispositif des dons alimentaires. 

Ils ont également validé une aide aux particuliers soumis aux obligations légales de débroussaillement, « essentielles à la prévention des incendies et à la sécurité civile ». « Face à des travaux de plus en plus coûteux, notamment la coupe d’arbres », ils ont voté la création d’un crédit d’impôt « restituable »  pour les ménages non imposables. 

En parallèle, les députés ont largement rejeté, hier en commission, la surtaxe sur les mutuelles prévue par le gouvernement pour financer une partie de la suspension de la réforme des retraites, estimant qu’elle ferait inévitablement peser l’effort sur les malades. Un vote qui s’est fait, cette fois, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026.
 

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2