Déploiement de la fibre : une couverture qui progresse en même temps que les vols de câbles de cuivre
Par Lucile Bonnin
Comme c’est la tradition, l’Arcep publie en ce mois de décembre les résultats de son suivi du marché des services fixes à haut et très haut débit. Ces derniers chiffres concernent le suivi des déploiements fibre au 30 septembre 2024. Ainsi, les résultats de l’année 2024 complète seront connus l’année prochaine, au mois de février.
Concrètement, « au 30 septembre 2024, près de 40 millions de locaux sont raccordables à la fibre sur le territoire national et 4,6 millions de locaux restent encore à rendre raccordables » . L’année dernière, à la même date, 37 millions de locaux étaient déclarés comme raccordables et près de 8 millions restaient à rendre raccordables.
Une progression lente mais pas d’effet boule de neige sur les abonnements
Si ces résultats paraissent très bons, ils sont à relativiser puisqu’ « au cours du troisième trimestre de 2024, le rythme de déploiement poursuit son ralentissement » . En effet, « 605 000 locaux supplémentaires ont été rendus raccordables au FttH, soit 27 % de moins que lors du troisième trimestre de l’année dernière. »
Ce ralentissement des déploiements de la fibre est constaté depuis 2023. Le point noir se situe surtout au niveau des zones très denses où « il reste 500 000 locaux à rendre raccordables » et où seulement 35 000 locaux ont été rendus raccordables au troisième trimestre 2024. Les zones moins denses d’initiative privée sont aussi concernées par le ralentissement des déploiements. Aussi appelées zones Amii (Appel à manifestation d'intention d'investissement), elles se situent en dehors des agglomérations contrairement aux zones très denses. Au troisième trimestre 2023, « seulement 139 000 locaux » ont été rendus raccordables. Un an plus tard, 140 000 locaux de plus ont été rendus raccordables mais il reste encore 1,5 million de locaux à rendre raccordables.
Il faut rappeler qu’en novembre 2023, l’ex-ministre du Numérique Jean-Noël Barrot avait annoncé la signature d’un accord entre l’État et les opérateurs pour rattraper ces retards. En zone Amii par exemple, l’opérateur Orange s’est engagé « d’ici fin 2024 à rattraper le retard dans les 55 EPCI dans lesquels les taux de raccordements sont les plus en retrait et en particulier ceux dans lesquels les taux de raccordements sont inférieurs à 85 % » . Selon Orange, ce rattrapage a été fait aujourd’hui. Pour les zones très denses, Orange s’est engagé à reprendre les déploiements et à atteindre un taux de 96 % fin 2025. Il faudra sans doute être patient pour voir cette tendance à la baisse observée par l’Arcep s’inverser, mais si les engagements pris par Orange sont honorés, une vraie différence devrait être constatée à la fin de l’année 2025.
Cependant ce ralentissement ne fragilise pas pour l’instant le rythme du nombre d’abonnement en fibre optique. En effet, fin septembre 2024, « huit abonnements internet sur dix sont désormais à très haut débit » et surtout « près des trois quarts des abonnements internet sont en fibre optique (73 %). » « Malgré un ralentissement observé depuis trois ans, la croissance de ces abonnements reste soutenue. Le nombre d’abonnements en fibre optique atteint ainsi 23,7 millions à la fin du troisième trimestre 2024 ».
Vols de câbles de cuivre : le défi des prochaines années
Mais une bonne nouvelle n’arrive jamais seule. Alors que le pays est de plus en plus fibré, et que le chantier de fermeture du réseau cuivre est déjà bien amorcé, un nouvel obstacle survient dans ce plan de transition du cuivre vers la fibre. Rappelons que le chantier de fermeture du cuivre conduit par l’opérateur historique Orange va faire du réseau fibre la nouvelle infrastructure de référence. De 2023 à 2025, une première phase de transition est menée par Orange et une deuxième phase de fermeture aura lieu entre 2026 et 2030.
Depuis 2023, cette fermeture technique du réseau ADSL apparaît comme une opportunité pour le « business » des malfaiteurs. Les techniciens qui installent la fibre dans les communes retirent d’abord les câbles de cuivre qu’Orange recycle par la suite. L’enjeu pour les voleurs est de mettre la main sur ce cuivre avant les travaux. Cyril Luneau, directeur des relations avec les collectivités locales chez Orange explique qu’il y a « une hausse constante et exponentielle de ces actes malveillants. Pour donner un ordre d’idée, nous avons enregistré plus de 1 300 vols sur ce premier semestre 2024 contre 1 500 sur toute l’année 2023, soit 1 200 km de câbles volés, 1 000 en 2022 et 200 en 2021 ».
La sénatrice des Pyrénées-Atlantiques Frédérique Espagnac rappelait, à l’occasion d’une question écrite en août dernier, que « le prix d’une tonne de cuivre était de 5 700 euros en 2020, et il a atteint 8 200 euros en 2024 » (lire Maire info du 9 septembre).
Et les conséquences sont lourdes pour les citoyens. Hier encore, plusieurs milliers de Finistériens se sont retrouvé sans téléphone et sans internet après une tentative de vol de câbles de cuivre. « Ces interruptions de service touchent aussi de plein fouet la collectivité à travers les services d’urgence (hôpitaux, pompiers, police), les entreprises dont la perte de connectivité a un impact direct sur leur business et les collectivités locales avec parfois l’indisponibilité des services rendus aux citoyens » , explique Cyril Luneau.
Des conventions de lutte contre ces actes de malveillance sur les réseaux télécom ont déjà été signées avec près de 80 préfectures, notamment en Occitanie où ces vols sont très fréquents. La sénatrice des Pyrénées-Atlantiques indiquait à Maire info en septembre dernier qu’il faudrait « que les peines soient alourdies » alors que ces pratiques sont de plus en plus régulières. Actuellement, les mis en cause encourent jusqu'à trois ans de prison et 45 000 euros d'amende.
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