Hausse des prix de l'énergie : des propositions concrètes de la FNCCR
Par Franck Lemarc
Tous les experts en sont convaincus : la hausse brutale des prix de l’énergie va être durable. Alors que le prix des carburants est repassé depuis plusieurs jours au-delà, voire bien au-delà des 2 euros le litre, le prix du gaz est au plus haut, et le fait que la Russie soit en train de stopper ses livraisons à l’Europe de l’ouest ne va rien arranger.
Ces événements ont déjà des conséquences très concrètes, comme la décision prise ces derniers jours par le gouvernement de rouvrir d’ici l’hiver prochain la centrale à charbon de Saint-Avold, en Moselle, fermée il y a trois mois seulement.
Le retour de la « chasse au gaspi »
On a vu par ailleurs hier, chose assez exceptionnelle, les trois principaux énergéticiens du pays – EDF, TotalEnergies et Engie – appeler conjointement les Français, dans une tribune publiée dans le Journal du dimanche, à réduire « immédiatement » leur consommation d’énergie (carburant, pétrole, fuel, gaz, électricité) pour éviter une pénurie l’hiver prochain. Que des entreprises qui vivent de la vente d’énergie appellent leurs clients à moins consommer donne une idée de l’ampleur de la crise. La guerre en Ukraine et les relations tendues avec la Russie ne sont pas les seules causes de la crise, expliquent au passage les patrons des trois groupes : les capacités de production d’électricité en France sont réduites par des éléments conjoncturels que sont la mise à l’arrêt d’un nombre anormal de réacteurs nucléaires et la sécheresse, qui diminue les capacités de production des centrales hydroélectriques. Ils demandent donc que soit lancée une « chasse au gaspillage nationale », arguant que « agir dès cet été nous permettra d’être mieux préparés pour aborder l’hiver prochain ».
Bouclier tarifaire prolongé
On a également appris ce week-end, à la lecture du Journal officiel, que le gouvernement avait décidé de prolonger par arrêté le bouclier tarifaire sur le prix du gaz, qui devait prendre fin le 30 juin, c’est-à-dire jeudi prochain, ainsi que cela avait été fixé en loi de finances l’hiver dernier. Le bouclier tarifaire est prolongé jusqu’au 31 décembre 2022, est-il annoncé dans le décret. Il va maintenant rester à financer cette mesure, via une loi de finances rectificative, ce qui devrait être l’un des premiers textes étudiés par le Parlement à la reprise de la session parlementaire extraordinaire, début juillet.
Des mesures pour les ménages
Dans ce contexte, la FNCCR appelle d’abord à prendre des mesures d’urgence pour protéger les consommateurs, mesures parmi lesquelles le bouclier tarifaire n’apparaît que comme un strict minimum. La fédération demande en effet, au-delà, un « droit à une alimentation minimale pour tous les ménages, toute l’année » ; et réclame au gouvernement qu’il repousse « la date limite de suppression des tarifs réglementés dans le secteur du gaz naturel » (date fixée, pour l’instant, au 1er juillet 2023).
Mais la FNCCR veut aller plus loin et appel à une révision du modèle même de tarification de l’électricité en France : le principe qui guide la fixation des prix (principe dit de tarification au coût marginal), qui ajuste le prix de l’électricité « au coût de la dernière centrale appelée pour équilibrer le réseau » , lui apparaît socialement injuste. Au contraire, la Fédération demande que chaque ménage « puisse bénéficier d’un prix de l’énergie compétitif induit par un mix énergétique national performant et décarboné » , en « obligeant » notamment les fournisseurs d’énergie à « s’adosser à un parc de production d’énergies renouvelables. »
Elle souhaite également la fin du système de l’Arenh (accès régulé à l’électricité nucléaire historique) qui a peu à peu été détourné de sa fonction initiale pour organiser, aujourd’hui, « un système de rente au profit de certains fournisseurs d’électricité opportunistes, qui n’apportent aucun plus-value au système énergétique français » . Rappelons que le gouvernement a récemment augmenter le quota d’électricité qu’EDF doit revendre à bas prix à ces concurrents (c’est cela qu’on appelle l’Arenh), passé de 25 à 30 % de sa production. Le mégawattheure au tarif Arenh est fixé à 46,20 euros… mais l’électricité achetée à ce prix par les « fournisseurs alternatifs » est revendue par ceux-ci au prix du marché de gros, c’est-à-dire autour de 300 euros.
Vente directe
Concernant plus spécifiquement les collectivités locales, la FNCCR demande en premier lieu la possibilité pour celle-ci de « revenir aux tarifs réglementés de vente d’électricité » si elles les souhaitent, « quelle que soit leur taille » . La Fédération demande également que les fournisseurs alternatifs se voient imposer de « fournir des garanties techniques, d’approvisionnement et de solvabilité » au moment des appels d’offre, pour éviter les situations où des collectivités se trouvent confrontées à la faillite de leur fournisseur, comme cela a été le cas, par exemple, pour la Ville de Paris avec le fournisseur Hydroption (lire Maire info du 18 janvier 2022).
La FNCCR demande également l’accélération de la rénovation énergétique des bâtiments publics, afin de permettre, à plus long terme, une diminution de la facture énergétique des collectivités. Elle souhaite pour cela que le gouvernement renouvelle le programme Actee (Action des collectivités territoriales pour l’efficacité énergétique).
Enfin, la fédération souhaite – tout comme l’AMF – que les règles évoluent en matière d’achat d’électricité renouvelable par les collectivités : « Les contrats d’achat directs à long terme doivent être facilités en adaptant les règles de la commande publique à ces nouvelles formes de commercialisation. » Dans un courrier adressé au Premier ministre, fin janvier dernier, la FNCCR et l’AMF avaient déjà demandé que soit facilitée la possibilité pour les collectivités d’acheter directement de l’électricité « verte » auprès d’un producteur. On parle ici du dispositif dit de « vente directe d’électricité » ou PPA (power purchase agreement) : un producteur d’électricité renouvelable passe un contrat pour vendre sa production à une collectivité qui la consomme directement, sans passer par un fournisseur. Ce système, s’il a été rendu possible par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015, ne décolle pas en France.
Télécharger la plaquette de la FNCCR.
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