Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 7 juillet 2022
Gouvernement

Élisabeth Borne dit vouloir « travailler main dans la main » avec les élus locaux

Lors de sa déclaration de politique générale, le 6 juillet, devant l'Assemblée nationale, la Première ministre a indiqué son souhait de renforcer la coproduction de l'action publique avec les élus, notamment dans les domaines de la transition écologique, de la santé, logement et de l'action sociale. Des concertations seront lancées « l'an prochain » pour approfondir la décentralisation. Élisabeth Borne a confirmé la suppression de la CVAE dès 2023 mais pas l'effort de 10 milliards d'euros demandé aux collectivités. 

Par Xavier Brivet et Franck Lemarc

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© Assemblée nationale

La Première ministre a affirmé son intention « d’associer davantage les élus locaux »  aux réflexions et aux décisions de son gouvernement car « ils sont le ciment de notre République » , autour des trois mots clés : « le respect, le dialogue et l’action » . Élisabeth Borne souhaite bâtir un « agenda territorial »  État-collectivités, ces deux acteurs devant « se donner une lecture commune des défis à relever, des leviers à activer, des moyens nécessaires » . Elle entend « travailler main dans la main »  avec les élus pour construire les politiques publiques. Elle veut « poursuivre la logique de différenciation partout où elle répond aux attentes »  car « c’est dans les solutions différenciées que se trouvent les résultats concrets et la vraie égalité » . Et « donner plus de poids aux élus locaux, plus de lisibilité dans leurs compétences, plus de cohérence dans leur action » . Selon elle, « le conseiller territorial » , promis par Emmanuel Macron dans son programme,  « peut être un moyen d’y parvenir et de construire les complémentarités indispensables entre départements et régions. Cela passera naturellement par des concertations approfondies que nous lancerons l’an prochain » , a-t-elle indiqué.

À court terme, ces bonnes intentions pourraient pâtir d’une annonce redoutée par les élus locaux : Élisabeth Borne a en effet confirmé la suppression de la CVAE « dès la loi de finances 2023, pour renforcer la compétitivité de nos entreprises » , en assurant que la perte de recette (« 8 milliards environ » ) sera compensée aux collectivités, sans plus de précisions. Elle n’a en revanche pas confirmé l’effort demandé aux collectivités de 10 milliards d’euros pour participer au redressement des comptes publics. 

Transition écologique, santé, logement, action sociale : les premiers travaux pratiques

La mise en œuvre de la nouvelle coproduction de l’action publique que la Première ministre appelle de ses vœux devrait trouver une application dans quatre premiers domaines : la transition écologique, la santé, le logement et l’action sociale. S’agissant du premier domaine, « dès le mois de septembre » , le gouvernement lancera « une vaste consultation en vue d’une loi d’orientation énergie-climat » . Celle-ci sera élaborée « filière par filière, territoire par territoire » . Un sujet sur lequel « nous avancerons avec les élus locaux »  car « bien souvent dans leurs territoires, ils ont montré le chemin » , a-t-elle assuré. 

Dans le domaine de la santé, le gouvernement lancera « dès septembre »  des concertations « partout en France »  pour lutter contre les déserts médicaux. Là encore, la Première ministre a indiqué que « nous travaillerons avec les élus, et en particulier les maires, qui sont nos partenaires privilégiés » 

Dans le domaine du logement, Élisabeth Borne propose aux collectivités un « nouvel acte de décentralisation pour concentrer les moyens et les responsabilités à l’échelle des bassins de vie, tout en étant exigeants pour qu’elles permettent aux projets de sortir de terre » . Elle veut plus globalement conclure « un pacte de confiance avec les acteurs du logement social »  afin que « le logement soit accessible partout » 

Dans le domaine social, la cheffe du gouvernement souhaite « bâtir avec les collectivités un véritable service public de la petite enfance »  qui « permettra d’offrir les 200 000 places d’accueil manquantes » . Pour « mieux accompagner les chômeurs »  et atteindre « le plein emploi » , le gouvernement veut « transformer pôle emploi en France travail » , une structure qui permettra à l’État, aux régions et aux départements de « travailler ensemble pour être plus efficaces »  en matière d’insertion professionnelle (chômeurs, bénéficiaires du RSA), sans préciser si les missions locales seraient, ou non, intégrées à cette future structure. 

Elle proposera aussi aux départements « de travailler ensemble et de bâtir un service public efficace, qui réponde aux besoins des personnes âgées et des familles, au plus près des territoires ». Une « conférence nationale du handicap se tiendra début 2023 »  pour apporter de nouvelles réponses (accessibilité, autonomie, adaptation des structures médicosociales, reconnaissance des personnels d’accompagnement, réforme de l’allocation adultes handicapés).  

Agenda rural, contrats de ville et sécurité

Un « nouvel agenda rural sera mis en œuvre »  et l’État poursuivra « le déploiement de France services » , a assuré la cheffe du gouvernement qui s’est aussi engagée à poursuivre les investissements « pour les petites lignes »  ferroviaires. « Nous définirons les nouveaux contrats de ville (…) avec les élus locaux » , a-t-elle précisé par ailleurs, en estimant que « la cohésion des territoires, ce sont aussi des fonctionnaires présents partout et un État qui répond vite et bien aux demandes des Français » , sans préciser concrètement les moyens qu’elle souhaite mettre en œuvre pour ce faire. 

Élisabeth Borne a affirmé que son gouvernement « accompagnera le développement des Outre-mer » , qui « sont une chance inestimable pour notre pays » . Les premiers travaux pratiques devraient concerner la rédaction de l’ordonnance déclinant la loi « 3DS »  du 21 février 2022 dans les territoires ultramarins, un sujet sur lequel la nouvelle délégation aux Outre-mer de l’AMF se penchera très prochainement.

Élisabeth Borne a confirmé la discussion du projet de loi de programmation (LOPMI) 2023-2027, présenté le 16 mars dernier en Conseil des ministres (ce texte prévoit notamment la création de 200 nouvelles brigades de gendarmerie). Elle veut « que nous ayons, en lien étroit avec les élus, les associations, les magistrats et les forces de l’ordre, une action toujours plus résolue dans la lutte contre les violences sexuelles, sexistes, et les violences intrafamiliales ». 

Pour l’AMF, des avancées et des points de vigilance

Dans un communiqué de presse publié dans la foulée de ce discours, l’AMF a pris acte de ces diverses « manifestations de bonne volonté »  du gouvernement, estimant au passage qu’une concrétisation de ces déclarations consisterait à intégrer dans le processus de fabrication des futurs textes le « comité législatif »  que vient de créer l’AMF (lire Maire info du 16 mai).

L’association salue également la volonté d’un « nouvel acte de décentralisation »  évoquée par la Première ministre, mais a souhaité que celui-ci ne soit pas circonscrit au seul domaine du logement. Elle se réjouit du fait qu’Élisabeth Borne n’ait pas évoqué les 10 milliards d’économies imposés aux collectivités, ce que l’AMF assimile à un « renoncement » 

L’association est évidemment nettement moins satisfaite de la confirmation de la suppression de la CVAE, ce qui revient pour elle à « continuer à mettre [les collectivités] sous tutelle d’un État surendetté » . Elle repose par ailleurs la question des moyens dont vont disposer les collectivités pour mettre en œuvre leur politique, dans un cadre marqué par la baisse des recettes et la hausse des dépenses liées à l’inflation. L’AMF, une fois encore, demande que la DGF soit « indexée sur l’inflation ». 
 

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