Les ZAC décidées avant la loi Climat et résilience ne seront pas comptabilisées dans le ZAN pour la période 2021-2031
Par Franck Lemarc
« L’édifice législatif et réglementaire est désormais stabilisé », assure Christophe Béchu dans une circulaire rendue publique vendredi dernier : tous les textes concernant le ZAN, en particulier les décrets d’application, ayant été publiés (lire Maire info du 28 novembre), il est temps de passer à la phase de mise en œuvre de cette réforme… et de faire de la pédagogie. Le ministre avertit les préfets que « l’enjeu premier est de faire comprendre la réforme pour une mise en œuvre progressive, souple et accompagnée ».
Ce qui est une gageure, eu égard à l’extraordinaire complexité du dispositif. C’est pourquoi le ministre annonce la mise en place immédiate, dans chaque département, d’un « référent territorial » ZAN placé auprès du préfet. Ces référents doivent être nommés avant la fin de la semaine (9 février au plus tard). Ce référent assurera de multiples missions : « Communication autour de la réforme, déploiement des outils d’observation foncière, suivi de l’évolution des documents de planification et d’urbanisme, mobilisation des aides financières et des aides à l’ingénierie ».
Il est par ailleurs rappelé dans cette instruction les nombreux outils mis en place par l’État pour accompagner les élus locaux, tous centralisés sur le portail de l’artificialisation des sols, un site essentiel que les maires vont certainement avoir à beaucoup fréquenter. Rappelons par ailleurs que quatre fascicules pédagogiques ont été élaborés par les services de l’État, autour de quatre axes (Définir et observer, Planifier, Mobiliser, Accompagner).
Les référents territoriaux seront les interlocuteurs des élus locaux pour la mise en œuvre du ZAN et devront « se positionner en facilitateurs de leurs projets ».
La question des ZAC
Le ministre rapporte que le cas spécifique des zones d’aménagement concerté (ZAC) a fait l’objet d’interrogations particulièrement nombreuses chez les maires. La question avait été posée par les sénateurs dès l’année dernière, via un amendement de Jean-Baptiste Blanc qui avait mis le doigt sur une possible conséquence désastreuse de la loi. « La loi Climat et résilience, écrivait-il, prévoit d’imputer l’artificialisation résultant d’un projet à la période décennale où celui-ci sort effectivement de terre. C’est extrêmement problématique pour les collectivités territoriales qui avaient décidé [avant cette loi] de la création d’une ZAC (…) ou pour les projets autorisés avant l’adoption de la loi, alors que les acteurs locaux ignoraient l’impact que ces consommations pourraient avoir sur l’enveloppe future d’artificialisation pour la période 2021-2031. » Pour contourner ce problème, le sénateur Blanc proposait dans son amendement que « l’artificialisation résultant des projets réalisés au sein de ZAC, de GOU, mais aussi d’opérations d’intérêt national (OIN) décidées avant le 22 août 2021 ne soit pas imputée à la période 2021-2031, durant laquelle les projets sortiront effectivement de terre, mais à la période 2011-2021, durant laquelle ils ont été décidés ».
Cet amendement avait alors été rejeté, et une telle disposition n’existe ni dans la loi, ni dans aucun décret. Pourtant, au détour de l’un des fascicules cités plus haut, il est apparu que le gouvernement avait décidé de valider cette disposition. L’instruction signée par Christophe Béchu le confirme, pour des raisons « d’acceptabilité » du dispositif : dans ce cas, « l’élément déclencheur de la comptabilisation de consommation d’espace n’est pas l’acte de création ou de réalisation d’une ZAC, mais le démarrage effectif des travaux. (…) Cette approche est notamment applicable pour les ZAC dont les travaux ont débuté avant 2021, et dont la consommation peut être intégralement comptée pour la période 2011-2021 ». Le maire ou le président d’EPCI, précise encore le ministre, peut librement faire le choix « soit de comptabiliser la consommation d’espaces de manière progressive, soit de comptabiliser la ZAC en totalité au démarrage effectif des travaux ».
Autre précision importante : dans la mesure où « jamais la totalité des espaces ouverts à l’urbanisation dans un PLU ou un PLUi ne sont effectivement consommés ou artificialisés sur la période de leur ouverture à la constructibilité », le ministre estime que « le rapport de compatibilité entre les documents de planification et d’urbanisme doit conduire à porter une appréciation globale sur le respect du document supérieur, incluant une marge d’appréciation dans l’atteinte de l’ensemble des objectifs fixés ». Cette méthode est celle qu'a défendue l'AMF depuis des mois, en particulier devant le Conseil d'État. Le ministre demande aux préfets de « ne pas restreindre aux seuls hectares de la trajectoire de sobriété les évolutions des documents d’urbanisme et d’autoriser un dépassement qui (…) peut aller jusqu’à 20 % ».
Il est à noter également qu'il souhaite que les préfets veillent à « l'application appropriée, nécessaire et proportionnée de cette réforme », ce qui marque un esprit de dialogue qui sera apprécié par les élus.
Projets d’envergure nationale
Le ministre revient également sur la mutualisation des « PENE », nouvel acronyme signifiant « projets d’envergure nationale ou européenne » – dont il faut rappeler qu’ils seront comptabilisés à part, au niveau national, et non dans la région ou le territoire où ces projets sont implantés. Un arrêté listant l’ensemble de ces projets est en cours d’élaboration. Une cartographie va être réalisée, et régulièrement mise à jour, sur le portail du ZAN.
Les régions sont actuellement consultées sur ce projet d’arrêté. En cas de « désaccord persistant » entre les régions et l’État sur le contenu de cette liste, elles pourront saisir les « commissions régionales de conciliation », dont la mise en place est obligatoire et devra intervenir, là aussi, dès cette semaine. Rappelons que ces commissions, dont le fonctionnement est régi par un décret du 27 novembre dernier, comprennent trois représentants de la région, trois représentants de l’État et un magistrat administratif, qui les président. « Peuvent être conviés à siéger à titre consultatif un représentant par commune ou établissement public de coopération intercommunale compétents en matière de document d'urbanisme. »
Ces commissions, saisies sur demande des régions, ont un mois pour faire des propositions, qui sont transmises au ministre. Celui-ci reste le décisionnaire final : il peut, ou non, suivre l’avis des commissions régionales de conciliation. « Lorsque le ministre ne suit pas l'avis de la commission de conciliation, sa décision doit être motivée et transmise aux membres de la commission », indique le décret.
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