Violences faites contre les élus : les agressions ont augmenté de 15 % en un an
Par Lucile Bonnin
C’est ce week-end, juste avant la tenue du 105e Congrès des maires et présidents d'intercommunalité de France, que la ministre Dominique Faure, chargée des collectivités territoriales, a dévoilé quelques chiffres concernant les atteintes faites aux élus.
Incivilités, dégradation des permanences, cyberharcèlement, insultes, agressions physiques… Les atteintes faites contre les élus ont ainsi progressé de 15 % entre 2022 et 2023, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur. Au total, à la date du 12 novembre 2023, 2 387 atteintes aux élus ont été recensées, ce qui représente plus que sur toute l’année 2022 (2 265 atteintes). Les projections vont même jusqu’au dire qu’à la fin de l’année, les atteintes aux élus atteindront le triste chiffre de 2 600 au total.
Maires ou conseillers municipaux particulièrement touchés
Concrètement, ces agressions concernent majoritairement les maires puisque six maires sur dix sont concernés par des menaces, injures ou outrages (70 % des cas). Dans près de 8 cas sur 10 ce sont les élus municipaux (maires ou conseillers municipaux) qui sont la cible des agressions. Sur le terrain, ces élus sont effectivement à « portée de baffes ».
Il s'agit principalement de menaces, d'injures ou d'outrages (70 % des cas). Dans la plupart des cas, ces atteintes faites aux élus arrivent dans le cadre d’échanges avec les administrés. Il est en revanche à noter que les violences physiques n'augmentent pas et restent, selon le gouvernement, minoritaires puisqu’en juillet dernier, le gouvernement parlait de 7 % des atteintes qui étaient de l’ordre de l’atteinte physique. Il y a bel et bien eu cependant « un pic au moment des violences urbaines, en particulier sur les atteintes aux biens publics ».
Selon une enquête du Cevipof réalisée pour l’AMF (lire article ci-dessous) avec la participation de 8 000 répondants, 69 % des maires interrogés déclarent avoir déjà été victimes d’incivilités (+ 16 points par rapport à 2020), 39 % avoir subi injures et insultes (+ 10 points) et 27 % avoir été attaqués sur les réseaux sociaux (+ 7 points), les violences physiques restent effectivement plutôt rares.
Harcèlement en ligne
« Les incivilités ou les intimidations via les réseaux sociaux touchent désormais toutes les communes » , peut-on lire dans l’enquête Cevipof. Selon le gouvernement, le cyberharcèlement représente un quart de toutes les atteintes comptabilisées, ce qui est inédit.
Pour la porte-parole de la gendarmerie Marie-Laure Pezant, il faut absolument porter plainte comme l’a indiqué Oliver Véran, porte-parole du gouvernement, à l’occasion d’un déplacement jeudi dédié au cyberharcèlement des élus. Elle explique sur Franceinfo que « c'est un phénomène qui est parfois banalisé parce qu'ils se disent : 'Bon, je me fais insulter, mais ça fait partie du métier.' Mais non, ça ne doit pas faire partie du métier. Avant, l'élu était insulté sur les réseaux en tant qu'élu. Désormais, il est parfois insulté en tant que personne, ainsi que sa famille ».
D’ailleurs, l’enquête Cevipof montre bien que « 12 % des maires reconnaissent que leur entourage familial a également subi les mêmes comportements violents ».
Plateforme téléphonique et réponse pénale
C’est dans les colonnes du JDD que Dominique Faure a détaillé la stratégie du gouvernement pour lutter contre les violences faites aux élus. Si le gouvernement remarque « une libération de la parole » sur le sujet, les maires sont incités à porter plainte plus systématiquement : « Nous devons en finir avec la banalisation des violences faites aux élus, le moindre tag, la moindre insulte doit être signalés », indique Dominique Faure.
Cette dernière a également annoncé hier le lancement officiel ce jour d’une ligne téléphonique « de suivi psychologique (…) via une plateforme téléphonique au 01 80 52 33 84 (7 jours sur 7 de 9 heures à 21 heures) » . Rappelons que cette mesure ne répond pas à la demande des élus qui attendent avant tout une réponse pénale face à ces violences. Ce nouveau dispositif vient en complément du suivi fait par le Centre d’analyse et de lutte contre les atteintes aux élus (CALAE) où près de 3 000 situations litigieuses ont été surveillées et une cinquantaine de situations individuelles ont été suivies quasi quotidiennement.
C’est aussi autour de la sanction que le gouvernement compte miser pour résorber ces violences. « Le Sénat vient d’approuver une loi durcissant la répression : qui s’attaque à un élu sera sanctionné comme s’il s’attaquait à un policier, un gendarme, un pompier… Jusqu’à sept ans de prison ferme et 100 000 euros d’amende » . La proposition de loi sera présentée aux députés en début d’année prochaine. Rappelons que la reconnaissance d’un statut de l’élu « devrait voir le jour rapidement » , selon le JDD.
Enfin, la ministre a confié réfléchir à « donner certains pouvoirs de police judiciaire aux directeurs et chefs de police municipale sous l’autorité du procureur pour certaines infractions » . Déjà plus de 3 400 policiers et gendarmes sont des référents « Violences aux élus ».
Le sujet sera largement discuté dès demain lors de la séance solennelle d’ouverture du Congrès des maires où les conditions d’exercice du mandat feront l’objet d’un débat en présence de la ministre Dominique Faure.
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