Loi Élan et planification urbaine : un nouveau cadre pour les SCoT
Enfin des textes attendus en matière d’urbanisme ! Cruciales pour le bloc communal, les dernières ordonnances prévues par la loi Élan du 23 novembre 2018 ont été publiées hier au Journal officiel. L’habilitation arrivait à échéance le 24 mai : c’est donc dans les temps que le gouvernement est parvenu à finaliser ces textes, après un ultime passage devant le Conseil national d’évaluation des normes. Fruit d’une large concertation avec les différents acteurs – dont l’AMF –, la première ordonnance (n° 2020-744) remet au goût du jour le schéma de cohérence territoriale (Scot), pour tenir compte de la création des Sraddet (schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires), et de la multiplication des PLUi. Ambition affichée : faire de ce document créé par la loi SRU en 2000 « un exercice moins formel, plus politique », et « faciliter la mise en œuvre du projet territorial ainsi que le passage à l'action », selon les termes du rapport relatif à l’ordonnance.
Également publiée au Journal officiel du 18 juin, la seconde ordonnance (n°2020-745) promet de rationaliser la hiérarchie des normes en matière d’urbanisme – un chantier particulièrement scruté par les acteurs, en attente de simplification (décryptage à venir dans l’édition du lundi 22 juin).
Lisibilité, stratégie, long terme
Coté Scot, premier changement notable : son périmètre est élargi au bassin d’emploi – ou au bassin de mobilité sous forme d’un syndicat mixte –, le bassin de vie devenant l’apanage des seuls PLUi. Une clarification bienvenue : avec la fusion de nombreux EPCI après la loi Notre de 2015, la majorité des Scot se confondait avec les nouveaux PLUi.
En ce sens, le texte prévoit qu’en cas de coïncidence entre Scot et PLUi, un débat devra se tenir lors du bilan du document – tous les six ans – sur l’opportunité d’élargir le périmètre du Scot. Ainsi, le Scot se rapproche enfin du dernier né de la planification – le Sraddet –, « comblant le manque d’échelon entre la région et le bassin de vie », estime Me Arthur Gayet, directeur de l’urbanisme au cabinet Seban et associés.
Quant à son contenu, le Scot génération 2021 comprendra un « projet d’aménagement stratégique » (PAS), remplaçant le projet d’aménagement et de développement durables (PADD). Colonne vertébrale du document, le PAS devra définir les objectifs de développement et d'aménagement du territoire « à un horizon de vingt ans sur la base d'une synthèse du diagnostic territorial et des enjeux qui s'en dégagent ».
Un horizon permettant une vision à long terme, compatible avec les nouveaux objectifs assignés aux Scot, en matière de sobriété foncière et de prise en compte du réchauffement climatique. A noter que comme annoncé, le Scot pourra tenir lieu de plan climat-air-énergie territorial (PCAET). Autre composante du nouveau Scot : les annexes, reprenant les éléments du (feu) rapport de présentation – le diagnostic du territoire, l’évaluation environnementale, la justification des choix retenus pour établir le PAS et le DOO, l'analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers et la justification des objectifs chiffrés de limitation de cette consommation définis.
Habitat, mobilité, densité
Surtout, le Scot façon Élan inclut un document d'orientation et d'objectifs (DOO), qui détermine les conditions d'application du PAS, en définissant « les orientations générales d'organisation de l'espace, de coordination des politiques publiques et de valorisation des territoires », dans un objectif de « développement équilibré du territoire et des différents espaces, urbains et ruraux, qui le composent ».
Déjà existant, le DOO est rendu plus lisible et cohérent, le texte réduisant ses orientations de 11 à 5 sous-sections – non moins denses. Parmi elles, les activités économiques, artisanales, commerciales, qui peuvent faire l’objet d’un document spécifique « déterminant les conditions d'implantation des équipements commerciaux qui, en raison de leur importance, sont susceptibles d'avoir un impact significatif sur l'aménagement du territoire, le commerce de centre-ville et le développement durable ».
Autres champs couverts par le DOO : l’offre de logement et d'habitat, l'implantation des grands équipements et services, l'organisation des mobilités ; les transitions écologique et énergétique, « qui impliquent la lutte contre l'étalement urbain et le réchauffement climatique, l'adaptation et l'atténuation des effets de ce dernier, le développement des énergies renouvelables (…) » ; les zones de montagne et enfin les zones littorales et la mer.
A noter que le DOO peut « décliner toute autre orientation nécessaire à la traduction du PAS », et notamment « subordonner l'ouverture à l'urbanisation d'un secteur nouveau ou des secteurs à urbaniser (…) à l'utilisation prioritaire des friches urbaines », ou à la « réalisation d'une étude de densification des zones déjà urbanisées, permettant d'apprécier la capacité de densification des territoires ».
Sobriété foncière et programme d’actions
Outre l’élargissement de son champ aux politiques de l’habitat et de la mobilité, le Scot intègre ainsi de façon transversale la question de la sobriété foncière – nouveau fil rouge du document. Sur ce point, l’AMF a toujours fait valoir son opposition à la fixation dans le Scot d’objectifs chiffrés de densification par secteurs géographiques. C’est pourtant la rédaction retenue, ces objectifs devant être « en cohérence avec l’armature territoriale et la desserte par les transports collectifs ». Néanmoins, l’AMF restera vigilante « quant à l’application du lien juridique de compatibilité qui pourra être réalisée par les services de l’Etat et par le juge administratif sur les dispositions des PLU », pour tenir compte de l’équilibre entre les territoires urbains, péri-urbains et ruraux.
Autre nouveauté qui peut suggérer une ambition initiale plus prescriptive : le Scot modernisé peut comprendre un « programme d'actions » afin de « mettre en œuvre la stratégie, les orientations et les objectifs du Scot », ces actions pouvant être portées par la structure chargée de son élaboration, par les EPCI membres de cette structure, ou « tout autre acteur public ou privé du territoire concourant à la mise en œuvre du Scot ou associé à son élaboration, en prenant en compte les compétences de chacun ». Ce programme peut identifier « les actions prévues relatives aux objectifs nationaux de l'Etat et aux objectifs régionaux, ou les mesures prévues dans les conventions ou contrats qui les concernent, quand ils existent, dès lors que ceux-ci concourent à la mise en œuvre du Scot ».
Le Scot nouvelle formule s‘imposera à compter du 1er avril 2021. En attendant, des mesures transitoires doivent permettre de faciliter l’intégration de cette nouvelle donne aux schémas en cours d’élaboration. Pour mémoire, 354 Scot sont aujourd’hui en vigueur, 112 sont en cours d’élaboration – couvrant ainsi 86 % du territoire national.
Caroline Saint-André
Accéder à l’ordonnance relative à la modernisation des Scot.
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