Grands travaux en vue pour le réseau électrique français
Par Julien MIVIELLE (AFP)
Essor des énergies renouvelables et des besoins en électricité, équipements vieillissants: le gestionnaire du réseau électrique RTE va devoir investir des sommes colossales ces prochaines décennies pour renouveler le réseau, et il entend jouer la carte de la concertation pour le faire accepter.
Epouser le paysage
A Flers-en-Escrebieux (Nord), RTE vient d’inaugurer sa toute nouvelle ligne Avelin-Gavrelle, allant des environs de Lille à ceux d'Arras, dont il veut faire un emblème à la fois de la transformation des équipements et de ses méthodes de dialogue avec les habitants. « C'est quand même plus joli dans le paysage, ça me fait penser au viaduc de Millau quand on voit l'alignement des pylônes », apprécie Jean-Luc Florin, agriculteur, en observant les nouveaux pylônes qui se succèdent dans ses champs de betterave sucrière et de petits pois.
Après une longue concertation - huit ans pour seulement deux de travaux - RTE a en effet adopté pour la région un nouveau pylône, baptisé "Equilibre", évoquant une voile de bateau et se fondant plus facilement dans le décor. Quarante-cinq ont été plantés le long de cette nouvelle ligne électrique de 400 000 volts, refaite pour un budget de 215 millions d'euros afin de multiplier par trois sa capacité, alors que la précédente approchait de la saturation.
« On avait l'idée de faire une ligne fluide, qui épousait le paysage », explique le concepteur des pylônes, l'architecte franco-britannique Hugh Dutton. Il fallait qu'ils soient « les plus fins possible ».
« Pas facile »
Jean-Luc Florin se félicite aussi de leur moindre emprise au sol : « Pour nous, c'est plus facile à travailler, du fait qu'il n'y a qu'un pilier au milieu, autour duquel on peut tourner ». Les câbles électriques à très haute tension désormais placés plus haut le rassurent aussi pour les passages en tracteur. « Sous l'ancienne ligne, il y a des moments où on se posait des questions, qu'il n'y ait pas un arc qui se produise ».
Le projet n'a pourtant pas toujours eu bonne presse dans la région. « Il y a eu de très fortes contestations les premières années », reconnaît Xavier Piechaczyk, président de RTE. Mais les travaux ont finalement eu lieu « globalement dans un climat serein ».
« L'implantation des nouveaux pylônes a demandé quelques concessions, comme le rachat de maisons sur le passage », se souvient Jean-Jacques Peyraud, maire de Flers-en-Escrebieux. « Ce n'était pas facile, puisque la première maison qu'on a dû supprimer était habitée par des personnes âgées qui vivaient là depuis très très longtemps », raconte-t-il, en saluant le travail de concertation.
Pour RTE, il fallait absolument faire accepter cette nouvelle ligne, jugée indispensable du fait des gros besoins d'une région grande productrice d'électricité renouvelable et où les usines renoncent progressivement aux énergies fossiles. La nouvelle ligne permet aussi de renforcer l’interconnexion avec la Belgique voisine.
Investissements massifs
S'il n'est aujourd'hui pas si fréquent de refaire ou de créer une ligne de 400 000 volts en France, l'exercice va bientôt se multiplier. « Le réseau 400 000 volts français a été conçu au moment où on a fait le parc nucléaire, aujourd'hui c'est un réseau qui va avoir une cinquantaine d'années. Donc on va commencer à le renouveler dans les années qui viennent », explique Xavier Piechaczyk.
Les besoins changent aussi avec l'émergence des énergies renouvelables. « Lorsqu'on aura construit plusieurs parcs (éoliens) en mer, au nord et à l'ouest de la France, il faudra ramener toute cette énergie vers les métropoles et vers l'est ». « Cela nous ouvre des perspectives d'investissement très massives jusqu'en 2050 », souligne le président de RTE.
Aujourd'hui l'entreprise investit 1,7 milliard d'euros par an sur le réseau, une somme qui va progressivement plus que doubler d'ici le milieu du siècle. Ce sera plus de 2 milliards dès 2024, puis plus de 3 milliards après 2030 et enfin plus de 4 milliards annuels entre 2035 et 2050.
La somme consacrée au transport du courant représente environ 10 % de la facture d'électricité, une part qui doit rester stable à l'avenir pour le consommateur, promet RTE, même si la facture globale risque d'augmenter.
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