86 % des Français sont défavorables à la mise en place des ZFE, selon une consultation du Sénat
Par Lucile Bonnin
C'est en mars dernier que la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a décidé de lancer une mission flash sur le sujet des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m), créées par la loi d'orientation des mobilités de 2019 et renforcées par la loi Climat et résilience de 2021 (lire Maire info du 18 avril).
« Sources de vives inquiétudes et de lourdes incompréhensions » , ces ZFE-m ont fait l’objet d’une consultation publique menée par le rapporteur de la mission, le sénateur des Alpes-Maritimes Philippe Tabarot. Ce dernier a présenté hier, lors d’une conférence de presse, les résultats de la consultation en ligne organisée du 17 avril au 14 mai dernier.
« Cette consultation a rencontré un succès inédit, avec 51 346 réponses complètes » , est-il indiqué sur le site du Sénat. Comme l’indique le rapporteur, 93 % de réponses proviennent de particuliers dont 48 % résident au sein d’une métropole et 52 % au sein d’une commune péri urbaine ou rurale. « En outre, 60 % d’entre eux résident dans ou à proximité d’une ZFE parmi les 11 rendus obligatoires par la loi d’orientation des mobilités », a t-il précisé.
« Un ressenti nettement négatif »
Les résultats de cette consultation publique, à défaut de créer la surprise, montrent un avis tranché concernant la mise en place des ZFE. 86 % des particuliers répondants se disent opposés à la mise en place des ZFE ainsi que 79 % des professionnels répondants.
Les réponses traduisent clairement un « ressenti nettement négatif sur la mise en œuvre des ZFE, faisant état d’une forte inquiétude quant aux conséquences sociales du dispositif » . En effet, ce qui préoccupe majoritairement les répondants c’est le « risque de creusement des inégalités sociales » que pourrait entraîner la mise en œuvre des zones à faibles émissions mobilité (ZFE), qui concernera d’ailleurs une quarantaine d’agglomérations d’ici fin 2024.
« C’est de l’exclusion sociale pure », « il y a une discrimination flagrante entre les différents citoyens ; il y a ceux qui ont les moyens de suivre la technologie requise et les autres », « un sentiment d’injustice, quand le travail est concentré en métropole mais insuffisamment rémunérateur pour avoir accès à l’acquisition d’un logement en métropole, mais aussi à un véhicule propre »... Les réponses apportées traduisent cette peur d’exclusion de la part de certains citoyens.
L’AMF alerte d’ailleurs « sur les risques de fracture territoriale entre zones urbaines, périurbaines et rurales » et « sur les risques de fractures sociales pour les habitants ne pouvant pas se procurer un véhicule « propre » mais aussi pour une part de ceux des zones périphériques qui seraient interdits de circuler dans les grands centres urbains ».
Les obstacles à l’acceptabilité
« La consultation a permis de mettre en lumière les principaux obstacles à l’acceptabilité des ZFE » , peut-on lire dans la synthèse de la consultation. Premier frein : le coût d’acquisition des véhicules propres est considéré comme trop élevé pour 77 % des particuliers. D’ailleurs 83 % des répondants n’envisagent pas de changer de véhicule du fait de la mise en place des ZFE. L’accessibilité de la métropole est aussi considérée comme insuffisante pour 51 % des répondants depuis les zones périurbaines ou rurales avoisinantes.
47 % estiment que le classement Crit’air manque de pertinence et 42 % expliquent notamment leurs réticences par l’insuffisance de l’offre de services et d’infrastructures de transport alternatifs à la voiture individuelle dans l’agglomération. Enfin, et c’est un peu ce qui a encouragé le Sénat a lancé cette mission, 40 % des particuliers regrettent le « manque de concertation en amont de la mise en place de la ZFE ».
Ainsi, l’AMF « insiste sur la nécessité d’une concertation et d’une recherche d’équilibre entre les territoires » qui « passerait également par plus de souplesse et de liberté données aux collectivités » . Pour ce qui concerne le rapport final du sénateur des Alpes-Maritimes, il sera présenté à la mi-juin avec une série de recommandations où figurera sûrement la proposition d’un « report modal vers les transports en commun, car 40 millions de véhicules électriques ne régleront pas le problème de la congestion automobile ».
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