Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 29 avril 2024
Transition écologique

Rénovation de l'éclairage public via les CEE : gare aux arnaques !

Le gouvernement a annoncé la diminution des aides liées au Fonds vert pour financer la rénovation de l'éclairage public dans les communes, et propose à celles-ci de se tourner vers le dispositif des CEE (certificats d'économie d'énergie). Les professionnels de l'éclairage appellent toutefois les collectivités à être prudentes. 

Par Franck Lemarc

Dans une circulaire parue il y a une dizaine de jours, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, annonçait un « recentrage »  du Fonds vert – mot choisi pour ne pas parler de « serrage de vis »  (lire Maire info du 22 avril). Le ministre y expliquait notamment qu’après un très large financement de la rénovation de l’éclairage public par le Fonds vert, en 2022 et 2023, il faut maintenant que les communes se tournent vers « d’autres modes de financement » , le Fonds vert, amputé de près de 500 millions, ayant vocation à se « recentrer »  sur d’autres actions. Christophe Béchu appelle les collectivités, dans ce domaine, à regarder du côté des CEE (certificats d’économie d’énergie). 

Les CEE, qu’est-ce que c’est ?

Dans un communiqué publié ce jour, le Syndicat de l’éclairage, qui regroupe les principales entreprises du secteur, dit « regretter cette mesure », qu’il juge « moins-disante pour les collectivités », et appelle celles-ci à la prudence face aux risques de fraudes aux CEE.

Rappelons brièvement ce qu’est le dispositif CEE. Ce dispositif distingue deux acteurs : les « obligés »  (fournisseurs d’énergie) et les « éligibles » . Les premiers sont obligés de prendre eux-mêmes des mesures d’économie d’énergie ou, à défaut, de les promouvoir chez les « éligibles », dont font partie les collectivités territoriales. Deux options sont possibles : une collectivité peut, premièrement, réaliser des travaux aboutissant à des économies d’énergie et obtenir, à ce titre, un CEE, puis revendre, moyennant finance, ce CEE à un « obligé » . Deuxième option : l’obligé finance lui-même tout ou partie des travaux en échange de la cession des CEE. Ces différents dispositifs sont expliqués avec précision dans un guide récemment publié par le Syndicat de l’éclairage, la FNCCR et l’AITF

Depuis 2020, ces organisations mettent régulièrement en garde les collectivités contre des pratiques frauduleuses – comme par exemple des sociétés, non adhérentes aux syndicats professionnels ayant pignon sur rue, qui démarchent les collectivités en leur faisant miroiter la fourniture de luminaires « à titre gratuit »  en échange d’une cession de leurs CEE. Ceci s’explique par le fait que les CEE font l’objet d’un véritable marché – comme les actions : ils peuvent être revendus, évidemment avec profit. D’où la mise en place par des sociétés peu scrupuleuses d’arnaques leur permettant de récupérer des CEE pour les revendre ensuite sur le marché. 

Le Syndicat de l’éclairage et la FNCCR rappellent donc que la conclusion de toute opération de travaux doit être soumise aux règles de la commande publique – et qu’une proposition qui commence par une promesse de fourniture gratuite de matériel doit éveiller la vigilance.

Points d’attention

Plus généralement, le syndicat alerte sur « certains importateurs de produits à bas coût, sans marque, aux données techniques douteuses », qui se présentent comme « spécialistes en efficacité énergétique »  sans que leur références puissent être vérifiées. « Ces sociétés sont avant tout des agrégateurs, pour le compte d’obligés CEE peu scrupuleux sur la manière, sans compétence spécifique en éclairage, ni même plus globalement en efficacité énergétique », prévient le syndicat. 

Dans une page dédiée à ces fraudes, le syndicat donne une liste d’une vingtaine de points qui doivent alerter un acheteur public : par exemple, le fournisseur n’a pas d’adresse physique en France, il ne publie pas ses comptes, il ne présente pas d’informations techniques précises, n’a pas de catalogue, « parle essentiellement de certificats d’économies d’énergie mais reste muet quant à l’étude du projet d’éclairage » 

Le Syndicat de l’éclairage prévient les éventuelles victimes que les travaux qui seront faits, dans ce cadre, se révèlent le plus souvent inefficaces, avec « des économies d’énergie inexistantes » … et des matériels qui tombent en panne très rapidement. 

Le syndicat regrette donc les annonces récentes du gouvernement « qui visent à réorienter vers d’autres modes de financement et notamment les CEE la rénovation de l’éclairage des collectivités » , et craint que ces annonces fassent prospérer les fraudeurs. Il appelle donc l’État « à garantir un financement fiable, pérenne et responsable de la rénovation de l’éclairage par la mise en place d’un accompagnement des collectivités, afin de mieux contrôler l’attribution des CEE éclairage ». 

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