Mieux accompagner la sortie du mandat pour les élus locaux
Par Franck Lemarc
La société fait preuve d’une « indifférence relative à l’égard d’un élu tournant la page de son engagement citoyen », constatent les sénateurs dans le troisième volet de leurs réflexions sur l’exercice du mandat, intitulé Comment être après avoir été ? Cette étape, « jamais anodine dans la vie d’un élu », qu’elle soit due à une défaite électorale ou à la volonté de tourner la page, représente souvent « un saut dans l’inconnu ».
Besoin d’accompagnement
Les sénateurs Agnès Canayer (Seine-Maritime, LR), Thierry Cozic (Sarthe, PS) et Gérard Lahellec (Côtes-d’Armor, PCF), ont donc réfléchi à des pistes permettant de faciliter cette étape, notamment sur la question du retour à l’emploi.
Ils notent d’ailleurs que cette problématique ne fait l’objet d’aucune statistique et d’aucun suivi par le ministère de l’Intérieur et la DGCL, comme si, justement, une fois leur mandat terminé, les élus disparaissaient totalement des écrans radar. La première recommandation des sénateurs est d’ailleurs la production de données chiffrées sur ce sujet.
Les auditions conduites par les rapporteurs les conduisent à estimer que beaucoup d’anciens élus auraient eu « besoin d’être accompagnés et mêmes conseillés dans le démarrage de leur nouvelle vie ». D’autant que, notent-ils, la fin du cumul des mandats, en contraignant les élus à ne choisir qu’un mandat exécutif, ne laisse aucune porte de sortie élective aux maires qui abandonnent leur siège ou le perdent.
Questions financières
Beaucoup de maires sortants ne connaissent pas leurs droits. Les sénateurs demandent donc qu’une information réelle soit diffusée au début, au milieu et en fin de mandat aux élus, par les préfets, sous forme d’un « guide d’information recensant les droits des élus en fin de mandat ».
Une telle campagne permettrait par exemple de faire connaitre l’allocation différentielle de fin de mandat (ADFM). Ce dispositif s’adresse en particulier aux élus éligibles qui ont renoncé à leur activité professionnelle pour se consacrer entièrement à leurs fonctions. La perte des indemnités liée à la fin du mandat peut en effet causer des difficultés financières insolubles à un élu qui a, de surcroît, renoncé à son salaire en quittant son emploi. L’ADFM, créée en 2022, permet à un élu dans cette situation de bénéficier d'une somme correspondant à une partie de son indemnité pendant un an après la fin du mandat, sous réserve d'un certain nombre de conditions. Mais selon la DGCL, ce dispositif reste mal connu, avec un taux de recours très faible, « malgré les efforts déployés par l’AMF » pour le faire connaître.
La mission recommande non seulement de mener une campagne pour faire connaître le dispositif, mais également de l’étendre aux élus des communes de moins de 1000 habitants, « qui (en) sont actuellement injustement écartés ». Les sénateurs plaident également pour l’ouverture du droit à l’ADFM pour les élus démissionnaires en cours de mandat, ce qui est impossible aujourd’hui.
En matière de retraite, même si des avancées réelles ont été réalisées ces dernières années (rachat de trimestres par exemple), les sénateurs estiment que « le toilettage du régime de retraite des élus locaux n’est pas terminé ». Ils demandent, comme c’est le cas pour les sapeurs-pompiers, qu’une « reconnaissance » à l’égard de ceux qui se consacrent à l’intérêt général se traduise par l’octroi de trimestres supplémentaires.
À l’instar de l’AMF, les sénateurs souhaitent également que le régime Ircantec élu soit rendu « indépendant » des autres régimes, pour éviter par exemple que des élus retraités de leur activité professionnelle ne puissent pas toucher leur pension sous prétexte qu’ils cotisent encore, en tant qu'élus, à l'Ircantec.
Retour à la vie professionnelle
Reste la question cruciale du retour à l’emploi pour les anciens élus encore en âge d’exercer une activité professionnelle. Sur ce terrain, c’est notamment la possibilité de valoriser l’expérience acquise en tant qu’élu qui devrait, selon les sénateurs, être améliorée. Un levier existe déjà pour cela : c’est la VAE (valorisation des acquis de l’expérience). Les anciens élus locaux peuvent engager une démarche pour obtenir un diplôme lié aux compétences qu’ils ont acquises durant leur mandat, par exemple en administration publique, aménagement du territoire, finances locales, urbanisme, etc. Les frais de cette démarche peuvent même être partiellement couverts par le DIFE.
Mais les sénateurs constatent que ce dispositif « ne trouve pas son public ». Ils estiment donc nécessaire « une action incitative et informative » sur ce processus.
Ils notent également que des démarches « plus simples et plus légères » peuvent être envisagées. Par exemple, dans un rapport de 2020, l’Inspection générale de l’administration avait proposé la création d’un « certificat de compétences professionnelles » pour les élus locaux – comme cela existe pour les élus du personnel – ou encore un « passeport de compétences », « porte-folio numérique dans lequel les acquis de formation et de l’expérience de l’élu [sont] définis, démontrés et stockés en vue de la reconnaissance par un établissement ».
Enfin, les sénateurs proposent que soit mis en place un « accompagnement déontologique » pour les élus en fin de mandat, avec notamment la possibilité de leur donner la faculté de saisir le référent déontologue de leur ancienne collectivité pour « être conseillé et mieux se protéger du risque pénal ».
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