Diffamation des élus : l'AMF pour rallonger la prescription, mais l'Assemblée nationale recule
Par AFP et FL
Le vote en première lecture à l’Assemblée nationale, il y a une semaine, d’un délai de prescription allongé pour injure et diffamation envers les élus ou candidats à un mandat a suscité de très vives critiques des syndicats de journalistes comme d’avocats. Ils dénoncent une épée de Damoclès sur l’information et l’anéantissement d’un pilier de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.
Cette mesure a été adoptée dans le cadre d’une proposition de loi sénatoriale plus large visant à mieux protéger les élus locaux, de plus en plus victimes de violences et de menaces.
L’AMF favorable à la mesure
Selon l’Association des maires de France (AMF), le harcèlement des élus locaux et nationaux via les réseaux sociaux, en « augmentation constante » , est « massivement le fait de particuliers et non de journalistes professionnels ».
Il s’agit donc « d’adapter la loi à un environnement qui a changé sans nullement remettre en cause la liberté d’expression, dont le juge assure de longue date une protection particulièrement efficace » , explique-t-elle dans un communiqué. « Actuellement en vigueur, le délai de prescription abrégé de 3 mois est une exception dans le droit français et les conditions de son application sont très complexes, poursuit l’association. Au-delà des grandes affaires médiatisées, traitées par des juridictions spécialisées, la réalité quotidienne pour les élus locaux et nationaux est celle d’une procédure d’une extrême complexité, conduisant au renoncement à poursuivre, aux classements sans suite massifs et paradoxalement en la persistance en ligne de propos potentiellement diffamatoires qui ne peuvent faire l’objet d’une prise en considération par la justice. »
À l’inverse, la disposition votée a suscité depuis une semaine une avalanche de critiques de la part de la presse. Après les syndicats de journalistes et des organisations d’employeurs (Apig, SEPM...), 33 sociétés des journalistes de différents médias nationaux, du Parisien à TF1, ont demandé mercredi d’écarter la mesure pour ne pas qu’elle « porte une énième entorse inutile et arbitraire à la liberté d’informer et d’être informé ».
« Il est normal que la presse rende des comptes sur ce qu’elle produit » mais « une telle disposition ferait peser une menace juridique et financière supplémentaire sur les rédactions, et ce pour une durée excessivement longue » , soulignent dans un communiqué commun ces sociétés des journalistes, dont celle de l’AFP.
Proposition de suppression de l’article
Comme elle s’y était engagée, la députée et rapporteure Violette Spillebout (Renaissance, majorité présidentielle) a réuni mercredi syndicats, associations de journalistes, éditeurs de presse et AMF.
Elle a indiqué sur X qu’« au regard des arguments juridiques, économiques, démocratiques soulevés par nos interlocuteurs, et des positions des groupes politiques représentés », elle porterait « une proposition de suppression de l’article » litigieux le 27 février lors la commission mixte députés-sénateurs chargée d’arbitrer sur la proposition de loi.
Violette Spillebout souhaite cependant ouvrir plusieurs « champs de travail ». Elle veut introduire « une disposition efficiente pour faciliter l’exercice de leurs droits aux élus locaux en matière de défense face aux diffamations et au harcèlement en ligne » et « revoir les dispositions votées en 2022 sur la levée de l’anonymat pour la haine en ligne ».
En outre, la députée plaide pour « travailler sur la modernisation de la loi de 1881 au sein des États généraux de l’information qui sont en cours ».
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