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Édition du mercredi 4 décembre 2024
Social

5,1 millions de personnes sous le seuil de pauvreté en France

L'Observatoire des inégalités a publié hier son rapport 2024 sur la pauvreté en France, appuyé sur les données de 2022. Il met en lumière le fait que la pauvreté en France, sans exploser, progresse inexorablement, comme elle le fait depuis 20 ans. 

Par Franck Lemarc

« La pauvreté n’explose pas mais elle gagne du terrain. »  Après une période de diminution du nombre de personnes pauvres dans les années 1990, et un « point bas »  atteint en 2002, la tendance s’est inversée : 1,4 million de personnes supplémentaires ont basculé dans la pauvreté depuis. 5,1 millions de personnes vivaient sous le seuil de pauvreté en 2022, soit 8,1 % de la population. 

« Renoncements et inquiétude » 

Le seuil retenu par l’Observatoire des inégalités est celui de l’Insee, qui correspond à la moitié du revenu médian des Français : il s’établissait pour 2022 à 1 014 euros par mois pour une personne seule, après prestations sociales, à 1 500 euros pour une couple sans enfant et à 2 500 euros pour un couple avec deux enfants adolescents. 

Le revenu médian des personnes vivant sous le seuil de pauvreté s’établit à 832 euros par mois. L’une des données frappantes de ce rapport est la très faible progression de ce chiffre : en 20 ans, il n’a augmenté que d’une soixantaine d’euros, ce qui semble être la conséquence de la très faible progression des prestations sociales. Cette augmentation du niveau de vie médian des personnes pauvres, d’environ 8 %, est à comparer à l’inflation sur la même période – presque 40 %. Ce qui veut dire malgré la petite hausse de leur revenu, ces personnes ont connu une diminution brutale de leur pouvoir d’achat. 

En conséquence, les personnes les plus pauvres sont de plus en plus amenées à se priver, et leur quotidien, écrit l’Observatoire, « est fait de renoncements et d’inquiétude ». Faute de revenus suffisants, ils sont dans l’incapacité d’épargner et donc, souvent, de faire face à une dépense imprévue :  plus de la moitié de ces personnes disent, par exemple, ne pas être en mesure de remplacer un meuble hors d’usage. Un quart d’entre elles dit se priver sur les repas, 12 % sur le chauffage. Plus de la moitié ne peuvent jamais partir en vacances, et « 15 % ne peuvent même pas s’offrir un verre ou un repas en famille ou entre amis par exemple ». 

Au plus bas de l’échelle de la pauvreté, celui de « l’extrême misère », se trouvent les 330 000 personnes vivant sans domicile fixe – à la rue, dans un hôtel social ou un centre d’hébergement. Si l’Observatoire relève que les capacités de l’hébergement d’urgence ont « doublé »  en quelques années, elles n’en sont pas moins déjà « saturées ». 

Jeunes, immigrés, personnes handicapées

La pauvreté touche d’abord la jeunesse : une personne pauvre sur deux a moins de 30 ans. Le taux de pauvreté chez les plus de 65 ans est nettement plus faible que chez les jeunes, autour de 5 % – ce qui n’épuise pas la question de la grande pauvreté qui touche certaines personnes âgées, comme l’expliquait à Maire info, pendant le dernier congrès de l’AMF, le délégué général des Petits frères des pauvres, Yann Lasnier, auteur d’un ouvrage sur le sujet. 

La pauvreté touche aussi particulièrement durement les familles monoparentales, dont près de 20 % vivent en dessous du seuil de pauvreté. 

Le chômage reste un facteur déterminant – un quart des chômeurs sont pauvres – mais le nombre de travailleurs pauvres reste préoccupant : il s’élevait en 2022 à plus d’un million. 7,3 % des ouvriers et 6,4 % des employés vivent sous le seuil de pauvreté. 

Enfin, l’Observatoire établit que deux catégories sont particulièrement touchées par la pauvreté : les immigrés, qui souffrent d’un taux de pauvreté « trois fois supérieur à celui des personnes nées en France »  ; et les personnes handicapées, dont 20 % sont touchées par la pauvreté. 

Outre-mer et QPV

L’étude se penche également sur les outre-mer, où les chiffres sont effrayants : 36,1 % des Réunionnais vivent sous le seuil de pauvreté, mais sur tout 53 % des Guyanais et 77 % des Mahorais. 

En métropole, ce sont, sans surprise, les quartiers prioritaires de la politique de la ville qui sont les plus touchés par ce phénomène – comme les trois QPV de Perpignan, cités dans l’étude, dont le taux de pauvreté varie entre 73 et 75 %. Les plus grandes villes ne sont pas épargnées, comme le 3e arrondissement de Marseille (52 % de taux de pauvreté) ni même Paris, pourtant cataloguée comme une ville particulièrement riche, mais où 300 000 personnes vivent tout de même en dessous du seuil de pauvreté. 

Rappelons qu’il ne s’agit des données de 2022, c’est-à-dire avant la crise inflationniste, et avant l'actuelle dégradation de la conjoncture économique.

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