Maire-info
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Édition du vendredi 4 avril 2025
Normes

Simplification : François Bayrou replace les usagers et le préfet au centre du jeu

Lors des troisièmes Assises de la simplification organisée au Sénat, le 3 avril, le Premier ministre a posé un principe : « L'administration remplit le document, l'usager contrôle ». Il a également annoncé un travail en cours pour faire du préfet de département « le coordonnateur, le fédérateur, le régulateur de la totalité de l'action de l'État dans nos territoires ».

Par Bénédicte Rallu

[Article initialement publié sur le site Maires de France]

François Bayrou en a fait un « principe de gouvernement »  : « procéder à partir du réel » . Travaux pratiques avec la simplification administrative. Lors de la troisième édition des Assises de la simplification organisée hier au Sénat, le Premier ministre a proposé « un changement de culture radicale : partir de l’expérience » . Concrètement, cela doit se traduire par une inversion du mécanisme de fonctionnement de l’administration de l’État. Dorénavant, celle-ci, qui possède déjà « tous les renseignements sur notre vie », se chargera de remplir les documents et l’usager contrôlera. Rien de bien nouveau – le principe ayant déjà été mis en place avec la déclaration d’impôts sur le revenu. L’ambition est de le généraliser.

Faire remonter ce qui est absurde

Les usagers (administrés, entreprises, collectivités territoriales) pourront demander des explications à l’administration et proposer des simplifications. « Les gains de liberté de temps, de liberté de penser, d’action, de souveraineté sur sa propre vie seront très importants » , a lancé François Bayrou. Dans cette opération « d’élagage et de simplification » , les parlementaires pourront faire remonter « tout ce qu’ils trouvent absurde. Je prends l’engagement que l’administration répondra à chaque remarque que vous ferez ! » 

L’autre grande annonce de ces Assises porte sur le rôle des préfets et leur pouvoir de dérogation, « trop peu utilisé car on a organisé l’impossibilité de l’utiliser », selon le Premier ministre. Celui qui est toujours maire de Pau veut faire en sorte que son « parcours d’élu local serve dans l’organisation des missions de l’État. Le préfet de département, sous l’autorité du préfet de région, [doit devenir] le coordonnateur, le fédérateur, le régulateur de la totalité de l’action de l’État dans nos territoires qui ont besoin d’un interlocuteur en responsabilités. Il y a des décennies que ça traîne, ça ne traînera plus ! » , a promis François Bayrou.

Pouvoir de dérogation rendu au préfet

Le gouvernement serait en train d’y travailler. « Le pouvoir de dérogation, d’interprétation, de bon sens élémentaire du préfet doit être rendu au préfet »  pour qu’enfin les projets puissent sortir de terre et encourager les maires bâtisseurs. Sans apporter plus de détails, le Premier ministre a seulement évoqué les demandes de subventions compliquées pour les collectivités, en particulier celles qui n’ont pas de services pour effectuer les démarches dans ces « labyrinthes ».

Proposition de loi déposée

Le discours n’a pu que plaire au Sénat puisque le premier vice-président de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation de la Chambre haute, Rémy Pointereau (Cher) a cosigné avec sa collègue Guylène Pantel (Lozère), un rapport d’information sur le pouvoir préfectoral de dérogation, en février dernier. Ils viennent de traduire leurs préconisations dans une proposition de loi « visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires », déposée le 27 mars.

Par ailleurs, le gouvernement a repris à son compte le programme « France simplification » , lancé par Michel Barnier lors de son bref passage à Matignon. Via ce dispositif, les préfets font remonter à l’administration centrale les projets arrêtés pour cause de difficultés administratives. Sur 450 projets transmis, 200 auraient été débloqués, selon François Bayrou, citant quelques exemples : un projet d’autoconsommation collective à l’Ile d’Oléron (déjà cité lors du 106e Congrès de l'AMF par Michel Barnier), la simplification des aides aux exploitants agricoles en difficulté, la facilitation des achats de véhicules d’occasion dans les préfectures.

Responsabilité des parlementaires

La présence du Premier ministre et de trois de ses ministres, François Rebsamen (Aménagement du territoire et Décentralisation), Françoise Gatel (Ruralité), Valérie Létard (Logement), aux Assises de la simplification est un signe dans la lutte contre le poids des normes, salué par le président du Sénat, Gérard Larcher. Il est vrai que Françoise Gatel, prédécesseure de Bernard Delcros à la présidence de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, qui fut à l’initiative de la création de ces Assises, ont sans doute facilité un peu les choses.

Malheureusement les chiffres continuent à parler d’eux-mêmes. Le poids des normes a encore représenté un coût d’1,6 milliard d’euros en 2023, selon le Conseil national d’évaluation des normes (Cnen). Gérard Larcher n’a pas éludé la responsabilité des parlementaires dans l’« inflation »  normative : « Sur le projet de loi de finances, 4 553 amendements ont été déposés. Une augmentation de 21 % en un an » …  

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