Utilisation de drones par les forces de sécurité : le décret est paru
Par Franck Lemarc
Après la très violente manifestation de Sainte-Soline, le 25 mars, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’était une fois de plus désolé de ce que les forces de l’ordre n’aient pu utiliser des drones, alors que les « manifestants violents, eux, en utilisent ». L’interdiction de l’usage des drones par les forces de l’ordre, posée par la Cnil en janvier 2021, est donc désormais levée. Explications.
Multiples tentatives
C’est le 12 janvier 2021 que la Cnil a interdit au ministère de l’Intérieur de recourir à des drones équipées de caméras (lire Maire info du 19 janvier 2021), avec un argument massue : cette utilisation, qui avait été faite notamment dans le cadre de la surveillance du respect du confinement en 2020, se déroulait « hors de tout cadre légal » : « À ce jour, aucun texte n’autorise le ministère de l'Intérieur à recourir à des drones équipés de caméras captant des images sur lesquelles les personnes sont identifiables », écrivait alors la Cnil.
Cette décision faisait suite à une autre, prise celle-ci par le Conseil d’État en décembre 2020, interdisant l’utilisation des drones dans le cadre des manifestations sur la voie publique.
Il fallait donc changer la loi pour pouvoir utiliser des drones dans ce cadre. Le gouvernement l’a tenté une première fois, avant de voir sa proposition censurée par le Conseil constitutionnel. Il a remis l’ouvrage sur le métier dans la loi pour une sécurité globale du 25 mai 2021, cette fois avec l’assentiment – partiel – des Sages.
L’article 47 de cette loi autorise les forces de l’ordre à « procéder au traitement d'images au moyen de caméras installées sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote ». Avec des limitations : il est interdit de capter le son, ainsi que le traitement des images captées via des logiciels de reconnaissance faciale. Les détails de la mesure étaient renvoyés à un décret qui, deux ans plus est tard, est paru au Journal officiel de ce matin.
Cadre d’emploi
Ce décret détermine les conditions d’utilisation des drones par « les services de la police nationale, de la gendarmerie nationale, des douanes et par les militaires des armées déployés sur le territoire national ». Rappelons que les polices municipales ne sont pas autorisées à utiliser des drones : cette disposition figurait dans la loi Sécurité globale, mais elle a été censurée par le Conseil constitutionnel (lire Maire info du 21 janvier 2022).
Cette utilisation ne se fera pas que dans le cadre des manifestations. Elle est autorisée pour « la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés » (par exemple des lieux habituels du trafic de drogue), ainsi que pour « la protection des bâtiments et installations publics et de leurs abords immédiats, lorsqu'ils sont particulièrement exposés à des risques d'intrusion ou de dégradation ».
Sont également concernés : la prévention d’actes de terrorisme, la régulation des flux de transport, la surveillance des frontières et le secours aux personnes. Enfin, des drones pourront être utilisés lors de la surveillance des manifestations sur la voie publique, notamment « lorsque ces rassemblements sont susceptibles d'entraîner des troubles graves à l'ordre public ».
Exceptions et habilitations
Le décret reprécise que l’enregistrement des sons est prohibé. Il définit les éléments qui doivent figurer dans les enregistrements. Il interdit le filtrage de « catégorie particulière de personnes » dans le traitement des images, sur la base de critères ethniques, politiques, syndicaux ou religieux.
Le décret dresse également la liste des personnes habilités à traiter ces données, qui devront être effacées au bout de sept jours, sauf dans le cas d’une procédure judiciaire.
Il mentionne également « l’information du public », imposée par la loi (« le public est informé par tout moyen approprié de la mise en œuvre de dispositifs aéroportés de captation d'images et de l'autorité responsable, sauf lorsque les circonstances » ). Le décret précise que cette information du public peut souffrir une exception lorsqu’elle « entre en contradiction » avec les objectifs poursuivis (par exemple la surveillance d’un point de deal). Le ministère de l’Intérieur devra organiser une « information générale du public » (c’est-à-dire une campagne de communication) sur ce sujet.
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