Malgré les contraintes, les politiques alimentaires des collectivités se dynamisent
Par Lucile Bonnin
En 2024, l’association Un Plus Bio a adressé aux élus et techniciens des collectivités un questionnaire afin de recenser les dynamiques des territoires en matière d’alimentation et de mieux connaître les initiatives portées par des collectivités à travers la France.
Au total, 159 collectivités ont répondu. Si les résultats de cette étude sont loin d’être exhaustifs, ils montrent cependant l’investissement croissant des collectivités en matière de restauration collective mais aussi sur d’autres sujets comme « le foncier nourricier ».
Restauration collective : remunicipalisation et relocalisation
L’Observatoire pointe qu’en 2024, 76 % des communes répondantes ont la compétence restauration collective, 9 % des départements et 6 % des régions. Tous types de collectivités confondus, le mode de production des repas est davantage celui d’une « cuisine sur place » (63 %) que celui d’une cuisine centrale (37 %). Par ailleurs, la restauration collective est à 85 % en gestion directe, à 12 % en gestion déléguée et à 12 % en gestion mixte (pour les collectivités qui cumulent deux modes de gestion pour différents établissements).
Selon Un Plus Bio, « ces cinq dernières années, seules 10 % des collectivités ont changé de mode de gestion, témoignant du fait que la restauration scolaire conserve généralement une organisation assez stable ». Or, en 2024, 20 % des collectivités annoncent avoir pour projet de remunicipaliser leur service de restauration collective dans les années à venir. « Pour elles, le passage en gestion directe de l’ensemble de leurs établissements est un levier pour relever leurs ambitions de qualité dans les assiettes », peut-on lire dans l’étude.
Par ailleurs, l’Observatoire confirme que le bio à la cantine est en progression. L’association suit depuis 2017 trente-trois collectivités ayant sous leur responsabilité 874 cantines scolaires. La part de leurs achats bio a augmenté de 58 % en six ans. Dans le même temps, le coût alloué aux denrées pour chaque repas n’a augmenté que de 14,5 % en six ans, soit 30 centimes environ par repas.
Pourtant, les collectivités ont dû faire face à une envolée des prix liée à l’inflation. L’AMF a publié une enquête en juin dernier sur la restauration scolaire, mettant en avant le fait que les communes subissent une hausse du coût moyen du repas à 8,49 euros (contre 7,63 euros déclarés en 2020), avec un reste à charge supérieur à 50 % pour 71 % des répondants. Gilles Pérole, co-président du groupe de travail sur la restauration scolaire à l’AMF, avait indiqué à Maire info qu’un meilleur accompagnement à la fois technique et financier de la part de l’État auprès des communes était désormais nécessaire (lire Maire info du 20 juin 2024).
L’année 2024 a aussi été marquée par une tendance intéressante : « Les collectivités territoriales s’emploient à relocaliser leurs approvisionnements en fonction des ressources disponibles sur leurs territoires. » Dans le détail, 47 % des collectivités parviennent à relocaliser en passant leurs achats auprès des agriculteurs et 45 % des collectivités disent ne s’appuyer sur aucun outil de transformation de leur territoire pour relocaliser leurs achats. « Par exemple, bien que les légumes soient relocalisés par 61 % des collectivités, seules 23 % d’entre elles déclarent s’être directement appuyées sur une légumerie. » Concernant le coût de la relocalisation, pour la moitié des collectivités la relocalisation amène à de l’achat de matériel spécifique (pour la découpe par exemple) ou la création de nouveaux espaces de travail. Cependant, « 67 % des collectivités n’ont pas eu besoin d’augmenter leurs effectifs et les changements de pratiques se sont donc fait à effectif constant ».
Un partenariat renforcé avec le monde agricole
L’observatoire s’intéresse enfin à une variable de la politique alimentaire menée par les collectivités qui est peu mise en avant : celle des liens entretenus avec le monde agricole. Une grande partie de l’étude montre que la gestion des terres agricoles s’impose désormais « comme une préoccupation pour les collectivités territoriales » qui sont « conscientes des enjeux liés à la préservation et au développement de terres nourricières ».
Au total, 63 % des collectivités déclarent avoir mis en place une stratégie foncière ou être en train d’en élaborer une. 51 % de ces stratégies foncières « visent à maintenir les surfaces agricoles, notamment à travers des documents d’urbanisme (PLU, SCoT) » . Aussi, l’association indique qu’en moyenne les intercommunalités possèdent 466,71 ha de foncier agricole. Cependant, les collectivités méconnaissent généralement le foncier dont elles sont propriétaires ce qui est fort dommageable puisque les collectivités propriétaires et averties font souvent le choix de mettre à disposition ces terres. 49 % de ces collectivités propriétaires choisissent de les mettre à disposition d’agriculteurs dans 71 % des cas.
Ce partenariat avec le monde agricole est intéressant à plusieurs titres. D’abord, 36 % des collectivités qui mettent à disposition des terres profitent de ce partenariat pour imposer un cahier des charges qui intègre l’obligation pour les exploitants de convertir l’exploitation en agriculture biologique. En termes de vente, pour 61 % des collectivités ayant mis à disposition, « la production bénéficie en premier lieu aux habitants qui peuvent venir acheter la production directement sur la ferme ou sur les marchés ». Par ailleurs, « parmi les collectivités qui mettent à disposition leur foncier agricole, la restauration collective représente le deuxième débouché pour les productions issues de ces terres ».
L’association regrette cependant qu’actuellement 14 % des collectivités propriétaires délaissent encore leur foncier agricole, sans envisager de vocation spécifique pour leurs terres, ce qui en freine la valorisation.
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