Résidences secondaires : plus de 2 500 nouvelles communes peuvent désormais majorer la taxe d'habitation
Par A.W.
Très attendu depuis le début de l’année en raison de la crise du logement qui sévit dans le pays, le décret étendant la liste des communes autorisées à majorer jusqu’à 60 % la cotisation de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) est enfin paru la semaine dernière.
Réclamé notamment par les élus des zones touristiques, ce texte a pour objectif principal de « remettre des logements vacants ou des résidences secondaires sur le marché de l’habitat permanent et ainsi limiter la hausse des prix et des loyers dans ces communes », expliquait le ministère de la Transition écologique, en juin dernier, devant les membres du Conseil national d'évaluation des normes (Cnen), qui ont émis un avis favorable quelques jours avant ceux du Comité des finances locales (CFL).
Les principaux bénéficiaires de l'extension de ce dispositif sont ainsi les communes touristiques situées principalement sur les façades atlantique et méditerranéenne, mais aussi celles situées en Corse et dans les zones de montagne.
345 communes entrantes en Corse, 131 en Haute-Savoie
Dans le détail, ce texte actualise, d’abord, la liste des communes situées dans une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où « il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements ». Celle-ci passe ainsi de 1 140 à 1 434 communes, soit une augmentation de près de 300 communes. « Ce qui permet notamment à 38 communes d’Outre-mer (sur 53 entrantes au total) de bénéficier de tout l’arsenal réglementaire » assis sur ce zonage, précisait déjà, il y a un mois, le gouvernement.
D’autre part, et c’est là la vraie nouveauté, il intègre dans le zonage 2 263 communes touristiques qui ne font pas partie de ces zones d’urbanisation continue, mais qui sont pourtant « confrontées à un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant ».
« Pour ces communes, la tension immobilière est notamment caractérisée par le niveau élevé des loyers ou des prix d'acquisition des logements anciens ainsi que par la proportion élevée de logements affectés à l'habitation autres que ceux affectés à l'habitation principale par rapport au nombre total de logements », rappelle le texte.
Parmi ces communes touristiques les plus tendues, « 345 communes entrantes [sont] en Corse, 45 dans le Finistère et 131 en Haute-Savoie ». Celles-ci peuvent donc dorénavant majorer la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, mais aussi appliquer les réglementations existantes sur l’encadrement des meublés de tourisme (numéro d’enregistrement et procédure de changement d’usage).
Au final, ce sont près de 3 700 communes qui bénéficieront désormais de ce dispositif, à compter de l’année 2024. Soit plus de 2 550 communes supplémentaires (bien qu’environ 4 000 avaient été initialement évoquées lors des débats parlementaires).
Celles qui le souhaitent devront, toutefois, délibérer « avant le 1er octobre 2023 » (voir le modèle de délibération).
« Financer la réalisation de logements abordables »
Le président de l’Association nationale des élus des littoraux (Anel), Yannick Moreau, s’est réjoui sur son compte X (ex-Twitter) de la parution de ce décret qui « permettra à de nombreuses commun[es] touristiques, notamment littorales, de disposer de nouveaux moyens permettant de financer la réalisation de logements abordables ».
« Aux Sables-d’Olonne, par exemple, la recette nouvelle issue de cette majoration permettra d’aider la ville à financer la réalisation de 500 nouveaux logements abordables en location ou accession à la propriété. Ainsi les résidents secondaires vont-ils favoriser le logement à l’année des populations locales », s’est-il félicité.
« L’objectif, dans une station touristique comme la nôtre, est de rechercher et retrouver un équilibre entre l’habitat secondaire et touristique […] et l’habitat à l’année », explique le maire des Sables d’Olonne.
« La volonté du gouvernement est de donner plus d’outils aux collectivités dans leur politique du logement », a, de son côté, commenté le nouveau ministre du Logement, Patrice Vergriete, sur X, avant de rappeler que, « avec ce décret, dans ces communes, les logements vacants seront désormais [également] obligatoirement taxés », au travers de la taxe sur les logements vacants (TLV), qui est perçue directement par l’État, dans le but d’« inciter leur propriétaire à les remettre sur le marché ».
Le gouvernement a d’ailleurs décidé d’augmenter d’un tiers les taux de la taxe sur ces logements, lors de la dernière loi de finances, en passant l’imposition de 12,5 % à 17 %, lors de la première année de vacance, et de 25 % à 34 % à compter de la deuxième année.
Logements vacants : les communes « intégralement » compensées
Reste que, mécaniquement, les 410 communes ayant auparavant institué une taxe d’habitation sur les logements vacants (THLV, qui elle est perçue par les communes ou les EPCI) et qui passent en zone tendue perdront les recettes associées, dès le 1er janvier 2024, au profit de l’État (à travers la TLV donc). Ces deux taxes ne peuvent, en effet, être perçue simultanément. C’est l’une ou l’autre.
Une conséquence néfaste qui a, notamment, été à l’origine du report d’un an – de 2023 à 2024 – de la parution du décret sur l’extension de la majoration de la THRS à de nouvelles communes.
Depuis, le gouvernement a assuré, à plusieurs reprises (notamment dans ce dossier de presse publié en juillet), que « les pertes de recettes des communes qui avaient institué la THLV et qui ne pourront plus la percevoir dès lors qu’elles entrent dans le zonage TLV, seront intégralement compensées », dans le cadre de la prochaine loi de finances pour l’année 2024.
Seulement, on peut signaler les ambiguïtés de certaines directions régionales des finances publiques (DRFiP), notamment en Bretagne, qui ont omis de rappeler cette compensation par l’État dans leurs courriers adressés aux communes et faisant le point sur l’évolution du zonage. Même chose de la part de la DGCL sur son compte Linkedin. Une omission qui « pourrait inciter les communes à majorer leur THRS à des fins de compensation uniquement, sans que ce ne soit nécessaire si l’État compense bel et bien », redoute l’AMF.
L’association appelle donc le gouvernement à rappeler « urgemment » aux DRFiP de mentionner cette compensation « sachant que les communes sont dans l’obligation de délibérer dans la précipitation – puisqu’elles doivent se prononcer sur la majoration de la THRS avant le 1er octobre dernier délai ».
Lors de l’examen du projet de décret, le collège des élus du Cnen avait d’ailleurs fait part de son « inquiétude » quant à « l'impact financier engendré par le nouveau zonage, d'autant que la perte totale évaluée est inégalement répartie entre les communes ». Et de citer les « 64 euros pour la commune du Pin (Gard), 300 000 euros pour la commune de Chambéry (Savoie) et jusqu'à 2,2 millions d'euros pour la commune du Gosier (Guadeloupe) ». Au total, la compensation prévue par le gouvernement représenterait « 25 millions d’euros pour 410 communes », selon le chiffrage de la ministre chargée des Collectivités, Dominique Faure.
Rappelons que dans ce dossier, l'AMF avait demandé – sans l'obtenir – une extension de la possibilité de majorer la THRS sans zonage. En effet, tout zonage provoque des effets de seuil, et ce sont les maires, estime l'association, qui sont les mieux à même de juger de la tension sur le marché immobilier de leur commune.
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