Non-recours aux prestations sociales : 39 territoires sélectionnés pour l'expérimentation, les modalités précisées par décretÂ
Par A.W.
Alors que plus de 30 % des Français ne font toujours pas les démarches pour avoir accès aux droits auxquels ils peuvent prétendre, le gouvernement vient de lancer une expérimentation territoriale – qui doit démarrer après l'été – visant à réduire le non-recours aux droits sociaux, et dont les modalités de mise en œuvre viennent d’être définies par décret.
Déjà sélectionnées par le ministre des Solidarités, Jean-Christophe Combe, près d’une quarantaine de collectivités, réparties sur tout le territoire et ayant concouru à un appel à projet du gouvernement, vont participer à cette expérimentation prévue par la loi 3DS afin de détecter les usagers qui ne demandent pas de prestations sociales alors qu'ils y ont pourtant droit.
Financement : une contribution de l'État
Il va donc falloir repérer, dans chacun de ces territoires, des personnes inconnues des bases de données administratives. Pour cela, des initiatives de lutte contre le non-recours aux droits sociaux vont être lancées « en mobilisant une pluralité d’acteurs (collectivités, associations, caisses de sécurité sociale, bailleurs sociaux…), pour conduire des démarches ciblées d’information et d’accompagnement des personnes vers leurs justes droits : accès aux RSA, prime d’activité, mais aussi chèque énergie, APL ainsi que l’accès aux services publics », explique un communiqué du ministère des Solidarités paru au début du mois.
Le décret précise que « l'État contribue au financement des expérimentations dans les territoires pour une durée égale à la durée de l'expérimentation » – celle-ci bénéficiera ainsi « des crédits du Pacte des solidarités ». Une enveloppe de 18 millions d’euros est prévue pour soutenir ce dispositif, qui doit durer jusqu’en 2026.
Ce financement devra donner lieu à la conclusion, entre le préfet et la collectivité ou l'établissement chef de file, « d'une convention qui détermine notamment le montant du financement, les dépenses auxquelles il est affecté, l'échéancier de son versement, et les modalités du contrôle de son utilisation », précise le décret qui indique que la collectivité devra remettre « un bilan annuel » au préfet afin de « rendre compte de la consommation de la subvention et de l'avancement de l'expérimentation (...), des résultats obtenus et des difficultés rencontrées ».
Instauration d’un comité local
En outre, le décret précise que « la collectivité ou l'établissement chef de file s'engage à mettre en œuvre l'expérimentation conformément à sa réponse à l'appel à projets, sous réserve des adaptations susceptibles d'être prévues dans le programme d'action défini par le comité local ».
Chargé de conduire l'expérimentation, ce dernier devra être instauré par la collectivité. « Le nombre et les catégories de membres » de celui-ci, ainsi que « les autorités en charge de leur désignation et le calendrier selon lequel ces désignations interviennent » devront être fixés « par voie de convention entre le représentant de l'État dans le territoire et le président de l'organe délibérant ».
Le décret indique également que « la collectivité ou l'établissement chef de file est chargé du suivi de l'exécution de cette convention et de la mise en place du comité local », qui devra comprendre « des personnes qui bénéficient ou sont éligibles aux droits sociaux sur lesquels porte l'expérimentation ». En plus des représentants du ou des départements concernés, des services déconcentrés de l'État concernés, du service public de l'emploi, de la protection sociale intéressés et des services portant le label « France Services » présents sur le territoire.
Les membres du comité devront désigner un président, « chargé de la préparation et de l'animation des travaux du comité », à défaut de quoi, la présidence sera assurée par « un représentant de la collectivité chef de file, désignée par cette collectivité ». À noter que ce sont les membres du comité qui détermineront « collectivement les modalités de fonctionnement et de prise de décision du comité ».
Un comité scientifique sera, par ailleurs, chargé de mesurer et comparer les différentes méthodologies employées pour repérer ces personnes qui ne demandent pas les prestations sociales auxquelles elles ont droit.
Nommé par arrêté du ministre chargé des Solidarités, il devra se réunir « au moins deux fois par an, jusque six mois après la fin de l'expérimentation » dans le but de l’évaluer. Dans ce cadre, il aura accès aux « documents détenus ou produits par les comités locaux, notamment comptables et financiers », indique le décret.
RSA : 34 % de non-recours
Sur les 67 dossiers déposés dans le cadre de l’appel à projet lancé en mars 2023, 39 territoires ont été finalement sélectionnés, pour mener l’expérimentation. Représentatif de la diversité des territoires français, les lauréats sont des communes, des intercommunalités ou des conseils départementaux, « tant urbains que ruraux ou péri-urbains », a précisé le ministère dans son communiqué.
Cette démarche, qui s'inscrit dans le cadre du vaste chantier de la « solidarité à la source », doit aussi « permettre de fiabiliser les déclarations pour éviter les indus et les récupérations des sommes a posteriori qui fragilisent les ménages », expliquait récemment Jean-Christophe Combe, dans un entretien.
Dans ce cadre, « plusieurs étapes doivent être franchies », a-t-il détaillé : « La première commence dès juillet, avec l'apparition sur les fiches de paie de l'ensemble des salariés d'une nouvelle ligne, le "revenu net social". Pour l'allocataire, cela permettra de connaître le revenu de référence pour le RSA et la prime d'activité. Cette déclaration sera réalisée par les entreprises, à l'image du revenu net imposable. Puis, en 2024, le pré-remplissage sera expérimenté dans une dizaine de départements. La généralisation sera ensuite effective en 2025 : la solidarité à la source deviendra une réalité pour tous les Français ».
Selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), le taux de non-recours aux principales aides et prestations sociales s’expliquerait principalement par « la méconnaissance des aides, les difficultés d’accès aux prestations et la crainte du regard porté par l’institution publique ». À titre d’exemple, plus d’un tiers (34 %) des foyers éligibles au RSA seraient non-recourants chaque trimestre, et un sur cinq (20 %) ne le réclame pas durant trois trimestres consécutifs. Les sommes ainsi non versées atteindraient 750 millions d’euros par trimestre.
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