Politique de la ville : les maires demandent des actes
Par Emmanuelle Stroesser
« Le gouvernement doit passer à l’action ! ». Le même message a été répété jeudi 13 juillet par chacune des six associations du bloc communal (1), via un même communiqué de presse. Les élus ont voulu réagir vite après leur entrevue – à distance – avec le ministre chargé de la Ville et du Logement, Olivier Klein, lors d’une commission politique de la ville conjointe, mercredi 12 juillet. Cette réunion – prévue avant les émeutes – devait servir de débriefing du comité interministériel des villes qui avait été planifié le 30 juin. Les émeutes ont bouleversé l’agenda, suite à un CIV rapatrié de Chanteloup-les-Vignes à Matignon, et recentré sur le traitement des émeutes.
Le message des élus est clair : ils appellent à « une ambition forte pour les habitants des quartiers populaires ». Car « s’il importe de réparer à court terme les dommages causés par (les émeutes) », « il est aussi essentiel que la politique de la ville se fixe une feuille de route et un cap, dans le cadre d’un dialogue renouvelé entre l’État et les collectivités ».
Cette prise de position ferme traduit une forme d’exaspération des maires, comme l’explique à Maire info le maire d’Arras, Frédéric Leturque. « Cela fait depuis le plan Borloo que nous avons une série de propositions concrètes, pour travailler pour les gens et pas uniquement sur la rénovation des murs, mais nous avons été méprisés. Cela fait un an déjà que nous attendons ce nouveau CIV pour parler des prochains contrats de ville. Aujourd’hui, le ministre nous annonce un nouveau CIV pour la rentrée. Soit, mais nous ne voulons pas nous engager dans une série de groupes de travail pour le préparer comme il l’a proposé ». Les maires estiment avoir « fait le job ».
Non à de nouveaux groupes de travail
Le communiqué rappelle les propositions du « pacte de confiance durable entre l’État et nos collectivités » présenté en mars 2022 lors de la campagne de l’élection présidentielle. Ces propositions « sont prêtes à être mises en œuvre, notamment concernant l’expérimentation de la délégation des crédits spécifiques du BOP 147 relatifs à la réussite éducative et à la prévention de la délinquance » . Mais ce dont les élus ont besoin, c’est « d’une plus grande visibilité sur les ambitions nationales portées pour les futurs contrats de villes ‘‘Quartiers 2030’’ et sur les impacts de la réforme de la géographie prioritaire ».
Pour éviter que le prochain CIV n’accouche que d’une souris, les élus réclament d’être « étroitement associés », pour « que des décisions concrètes puissent être prises ». Leur insistance traduit leur inquiétude. « Nous avons besoin de réponses adaptées et ambitieuses pour une politique d’inclusion urbaine et républicaine à la hauteur des enjeux », reprend Frédéric Leturque en paraphrasant la conclusion du communiqué de presse.
De même, ils attendent un message ferme de soutien à la politique de la ville, qui à leurs yeux, « n’a pas démérité depuis quarante ans ». « Ceux qui critiquent les milliards de la politique de la ville ne comprennent pas la vie de la France et sa diversité », tacle Frédéric Leturque, passablement agacé de ces « postures » qui reviennent en boucle dès que l’actualité remet les « quartiers » sur le devant de la scène.
Messages du terrain
Sur le terrain, les maires ont commencé à recevoir les propositions de zonage des quartiers amenés à entrer ou sortir de la politique de la ville en 2024. Un travail qui se déroule plus ou moins sereinement suivant les territoires.
« Nous n’avons pas besoin d’énièmes diagnostics, nous avons tous commencé à y travailler depuis deux ans dans le cadre de l’évaluation des contrats de ville qui devaient se terminer. Ce dont nous avons besoin, c’est que ces diagnostics soient entendus, respectés et partagés. Et que nous ayons effectivement de la souplesse pour réajuster et réinterroger les zonages », exprime Frédéric Leturque en guise de « premier message » pour la préparation des prochains contrats. Deuxième message : les élus veulent de la pluriannualité. « Les engagements ne doivent plus être de l’année à l’année » mais sur au moins trois ans. Troisième message, la demande « d’agilité ». Autrement dit, « que le ministère nous laisse adapter les contrats aux réalités de nos territoires », précise Frédéric Leturque. Le ministre a répété aux élus que le cadre des prochains contrats de ville n’obligerait pas à un tronc commun, mais « je ne crois que ce qui sera signé », glisse le maire d’Arras.
(1) France urbaine, AMF, Association des maires d’Île-de-France (Amif), Association des petites villes de France (APVF), Intercommunalités de France, Villes de France et Ville & Banlieue.
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