Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 31 mars 2025
Politique de l'eau

Nouvelle feuille de route du gouvernement pour la protection des captages d'eau potable

Le gouvernement a publié vendredi sa feuille de route sur la protection des captages d'eau potable. Si rien de vraiment nouveau n'a été annoncé sur la méthode, un calendrier précis a été dévoilé. Reste à savoir s'il sera tenu. 

Par Franck Lemarc

Près de 33 000 captages d’eau potable fournissent, en France, les deux tiers de l’eau consommée. La protection de ces captages est une priorité mise en avant depuis la loi sur l’eau de 1992. Plus de 14 000 captages ont été fermés au cours des dernières années, du fait de leur pollution par les pesticides ou les nitrates, et le mouvement s’accélère : du fait du dérèglement climatique, la baisse du niveau des nappes phréatiques augmente mécaniquement la concentration en polluants.

Le gouvernement juge donc « crucial »  de déployer des nouvelles mesures pour protéger les captages d’eau potable, d’autant plus qu’il y est contraint par l’obligation de transcription dans le droit français de la directive européenne Eau potable de 2020. Parmi ces nouvelles mesures, l’accent sera mis sur « la protection préventive », qui vise à protéger les captages le plus en amont possible pour éviter, a posteriori, de coûteux traitements. 

Cette politique volontariste semble d’autant plus indispensable que, au-delà des traditionnels pesticides et nitrates, apparaissent aujourd’hui les nouveaux dangers liés aux Pfas – les fameux « polluants éternels »  dont la présence n’était pas testée il y a quelques années encore, et dont on découvre peu à peu qu’ils sont présents partout.

Nouvel arrêté à la fin de l’année

Dans le dossier de presse consacré à cette feuille de route, le gouvernement insiste sur la « nouvelle méthode »  élaborée entre les ministères chargés de l’environnement, de l’agriculture et de la santé, organisée en « deux volets » : « Cibler et agir ». Il s’agit, d’une part, de mieux identifier les captages les plus sensibles aux pollutions diffuses ; et, d’autre part, de mettre en œuvre des actions de protection « dans le cadre des plans de gestion de la sécurité sanitaire des eaux (PGSSE) élaborés par les collectivités en charge de l’eau potable ». 

Rien de très nouveau sous le soleil, en réalité : le « ciblage »  existe déjà, puisque les Sdage (Schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux) doivent déjà identifier une liste de captages dits « prioritaires ». Mais le gouvernement annonce la parution, en fin d’année, d’un nouvel arrêté définissant les captages dits « sensibles ». Cet arrêté précisera « les paramètres et seuils »  mentionnés à l’article L211-11-1 du Code de l’environnement qui définit les captages « sensibles ». Dès lors, « collectivités en charge de la production d’eau à partir de ces points de prélèvement sensibles devront contribuer à la gestion et à la préservation de la ressource en eau en élaborant et en mettant en œuvre un plan d’actions ». 

Pour parvenir à la rédaction de cet arrêté, une concertation sera organisée dans le cadre du Groupe national captages (GNC), annoncé depuis plus d’un an mais toujours pas réuni. Ce groupe réunit les associations d’élus et la FNCCR, les services de l’État et les représentants du monde agricole. 

Une fois l’arrêté paru, le gouvernement produira « un guide à destination des préfets avec des règles de gestion en fonction des différents cas de figure ». L’étape suivante sera l’élaboration et la finalisation des Plans de gestion de sécurité sanitaire des eaux (PGSSE), à l’été 2026, et enfin la transposition de la directive Eau potable « à la fin de l’été 2026 ». 

Financements encore très insuffisants

La tâche qui reviendra aux collectivités sera, dans un premier temps, de délimiter les aires d’alimentation des captages, avec l’aide d’un hydrogéologue, et de « cartographier la vulnérabilité propre au milieu ». Puis, dans un deuxième temps, « d’élaborer un plan d’action », en associant « l’ensemble des acteurs concernés »  au premier rang desquels, bien sûr, les agriculteurs. 

Les collectivités devraient se voir soutenues financièrement pour mener à bien ces tâches, via l’État et les agences de l’eau. À quelle hauteur ? On l’ignore aujourd’hui. Le seul montant dévoilé dans le dossier de presse est une somme – bien modeste – de 6,5 millions d’euros mobilisés « pour la première fois en 2025 »  dans le cadre de la stratégie Écophyto « pour contribuer à lever des situations de blocage pour les captages les plus prioritaires ». 

Mais lorsque l’on sait que la délimitation d’une aire d’alimentation de captage coûte, au minimum, une cinquantaine de milliers d’euros, on mesure qu’il faudra aller bien plus loin dans le soutien aux collectivités. La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a évoqué l’idée de traiter 500 premiers captages cette année, ce qui représenterait déjà un coût de 25 millions d’euros. Il faut donc espérer que des aides supplémentaires seront débloquées. 

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