Maire-info
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Édition du lundi 31 mars 2025
Jeunesse

Service national universel (SNU) : le gouvernement répond enfin aux critiques

Alors qu'il devait être généralisé en 2026, le Service national universel ne cesse depuis sa création d'être l'objet de critiques et de polémiques en tous genres. Mi-mars, Emmanuel Macron a annoncé vouloir une « refonte » du SNU tandis que le ministère de l'Éducation nationale présente des résultats en demi-teinte.

Par Lucile Bonnin

Promesse de campagne d’Emmanuel Macron, le Service national universel a été lancé en 2019 avec pour objectif principal de renforcer la cohésion sociale et de promouvoir les valeurs républicaines chez les jeunes de 15 à 17 ans. C’est un séjour qui se déroule en deux temps : un séjour de cohésion de douze jours durant lequel les jeunes participent à des activités et réalisent des missions d’engagement et une phase de mission d’intérêt général ou un service civique de plusieurs mois.

En mars 2023, sa généralisation annoncée par le gouvernement inquiétait déjà les sénateurs qui estimaient que le contexte où les secteurs de l'hébergement et du recrutement sont en crise n’était pas propice pour cette montée en puissance du SNU (lire Maire info du 16 mars 2023).

Plus d’un an plus tard, la Cour des comptes a sévèrement étrillé le SNU, dénonçant des objectifs non atteints, un coût sous-estimé, des difficultés de déploiement avec des coûts de fonctionnement exorbitants (lire Maire info du 18 septembre 2024).

S’en est suivi une tentative de suppression de ce dernier dans le Projet de loi de finances 2025 à la fin de l’année 2024, soutenue par plusieurs sénateurs à l’instar de Laurent Lafon et Éric Jeansannetas (lire Maire info du 25 octobre 2024).

Depuis, le gouvernement n’avait pas pris la peine de répondre directement à ces critiques. En réponse à une question écrite du sénateur Hugues Saury, le ministère de l'Éducation nationale dresse un bilan du SNU reconnaissant les défaillances du dispositif mais soulignant les efforts qui ont pu être apportés ces dernières années. 

De premières réponses aux critiques 

Le dispositif a d’abord été fustigé pour des raisons économiques, par les magistrats financiers mais aussi par les sénateurs. Le ministère de l’Éducation nationale, dans sa réponse publiée jeudi dernier au sénateur Saury, annonce que la « Délégation générale au service national universel (DGSNU) et l’ensemble des acteurs du réseau SNU (services déconcentrés, éducation populaire, collectivités territoriales) œuvrent pour répondre aux quatre principales critiques »  de la Cour des comptes : « Une cible en termes de diversité des participants non atteinte »  ; « une organisation administrative défaillante, marquée par des achats effectués dans l’urgence en-dehors des règles relatives aux marchés publics »  ; « une trajectoire budgétaire non maîtrisée avec un coût moyen par jeune élevé, estimé à 2 900 euros »  et  « un encadrement à fidéliser et à mieux former ».

Pour davantage de mixité, le ministère précise que le dispositif classes et lycées engagés (CLE) installé en 2024 a renouvelé le public avec un taux de participation de 40 % de lycéens professionnels et de 7 % de jeunes issus de quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Concernant la critique administrative, le ministère indique que depuis août 2023, « la DGSNU a structuré toutes les opérations logistiques en accompagnant les services déconcentrés lors de la passation des marchés de gestion des séjours (modèle de cahier des charges des centres, de contrat de travail pour le recrutement des encadrants) et par la notification de coût-plafond par type de séjour et modalités de gestion. » 

Concernant la « trajectoire budgétaire non maîtrisée », le ministère indique avoir mené des « travaux de structuration et d’analyse des sous-jacents de la dépense »  qui permettent de garantir une diminution du coût moyen par jeune et par séjour : « Là où il s’établissait à 2 475 euros en 2023, il s’élève à 2 172 euros en 2024 et est estimé à 1 944 euros en 2025. »  Le séjour pourrait d’ailleurs passer de 12 à 10 jours. 

Sur l’encadrement des jeunes, qui a aussi été largement mis en cause aussi bien dans les rapports que dans la presse, les difficultés de recrutement s’estompent : « Au total, en 2024, le SNU a établi 8 604 contrats d’encadrants soit 495 équivalents temps plein, dont 7 336 encadrants de proximité », peut-on lire dans la réponse du gouvernement. 

Plusieurs syndicats ont aussi pointé des défaillances dans la sécurisation des séjours. Le ministère de l’Éducation nationale explique avoir eu connaissance en 2023 de « 17 situations de violences ou de harcèlement par des encadrants sur les 40 135 jeunes accueillis (0,04 %) ». « Chacun des faits a fait l’objet d’un signalement au parquet », ajoute le ministère qui estime aussi à l’inverse que le SNU peut permettre de déceler des situations problématiques pour les jeunes dans leur vie quotidienne (harcèlement, violences sexuelles, maltraitance, dans ou hors de la famille). Ainsi, les « encadrants ont signalé 19 situations hors SNU aux autorités judiciaires et administratives pouvant aller jusqu’à la saisine du parquet ». 

Le président veut adapter le SNU « aux priorités identifiées » 

Ces premiers travaux vont mener à terme à une refonte du Service universel tel qu’il existe aujourd’hui. Dans un entretien publié mi-mars dans plusieurs journaux régionaux, Emmanuel Macron annonçait « une refonte du Service national universel (SNU) pour qu’il corresponde aux besoins de la nation et aux priorités que nous avons identifiées ».

Alors que plusieurs pays européens débattent sur une éventuelle réintroduction du service militaire obligatoire – supprimé en France depuis 1997 – cette annonce a aussi été l’occasion pour le président de rappeler qu’il n’était pas question de cela. 

Cette refonte du SNU dans un contexte de guerre doit « permettre à une jeunesse volontaire d’apprendre avec les armées et d’en renforcer les rangs »  a-t-il indiqué. « On va regarder les leviers de mobilisation civile (…). Il y a toute une partie de mobilisation de la société face aux crises qui est à consolider. » 

Cette annonce a été largement critiquée par les syndicats et certains députés de gauche, à l’instar du Snes qui fustige « un dispositif d’inspiration militaire qui ne fait pas recette »  ou encore de l’eurodéputée Manon Aubry qui dénonce une « militarisation »  de la jeunesse.

Cette refonte devrait être détaillée par le chef de l’État « dans les prochaines semaines »  mais il esst impossible de dire pour l’heure si les séjours de cohésion seront maintenus cet été. Selon le média Politis, « une note de la direction du service national et de la jeunesse du ministère des Armées, datée du 6 février, confirme l’absence des séjours de cohésion dans les prochaines obligations du service national. » 

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