Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 23 septembre 2025
Patrimoine

67 400 monuments patrimoniaux non protégés « en état critique »

La Fondation du patrimoine lance un « Observatoire du patrimoine non protégé » au titre des monuments historiques : églises rurales, moulins, phares... Une importante proportion de ce patrimoine est « fragilisée ». 

Par Franck Lemarc

La Fondation du patrimoine soutient « tout type de patrimoine », qu’il soit classé ou non. Mais jusqu’à présent, alors que le patrimoine classé fait l’objet d’une base de données assez précise gérée par le ministère de la Culture, le patrimoine non classé est trop peu et mal connu. 

C’est ce « manque »  que veut combler la Fondation, en s’appuyant sur ses propres données, ainsi que sur l’inventaire général du patrimoine culturel, sur l’Observatoire du patrimoine religieux et sur les données observées via OpenStreetMap. 

Typologie

Ce nouvel Observatoire du patrimoine non protégé livre une première estimation : il y aurait en France quelque 295 800 monuments non classés. La Fondation classe dans cette typologie « l’ensemble des édifices publics ou privés qui ne bénéficient pas d’un classement ou d’une inscription au titre des monuments historiques, mais qui présentent un intérêt du point de vue architectural, historique, paysager ou de la mémoire collective des territoires ». Il peut s’agir de monuments religieux (chapelles, calvaires, chemins de croix…), de châteaux, de maisons remarquables, de structures à vocation agricole (pigeonniers, pressoirs…) ou artisanale (moulins, minoteries…), ou encore de pressoirs, ponts, aqueducs, phares, ou de « bâtiments d’architecture civile »  (beffrois, halles, mairies, etc.).

Ce chiffre de presque 300 000 est à comparer avec celui des monuments protégés, qui s’élève à 46 150. 

Estimation de l’état « critique » 

Pour juger de l’état de ce patrimoine, la Fondation s’appuie sur la même nomenclature que celle utilisée pour les monuments classés : l’état peut être bon, moyen, mauvais ou « en péril », ce qui signifie que la dégradation du monument présente « un danger pour le bien ou les personnes ». Les catégories « mauvais état »  et « en péril »  sont regroupées sous le terme d’état « critique ».

La Fondation estime à environ 67 400 le nombre de monuments en état critique. Attention, ce chiffre ne s’appuie pas sur des observations, mais en extrapolant aux bâtiments non classés le taux de dégradation des bâtiments classés. Selon le dernier bilan sanitaire délivré par le ministère, 17,88 % des monuments classés sont en mauvais état et 4,9 % en péril, soit un total « état critique »  de 22,78 %. La Fondation a donc appliqué ce pourcentage aux 295 800 monuments non classés, pour aboutir à ce chiffre de 67 400. 

Le chiffre, avertit la Fondation, est « prudent », c’est-à-dire probablement sous-estimé. En effet, le patrimoine protégé bénéficie « de financements et de suivis spécifiques », ce qui n’est pas le cas du patrimoine non classé et laisse donc à penser que la dégradation de ce dernier est « plus forte ». Le chiffre avancé par la Fondation lui paraît néanmoins cohérent avec les observations de terrain de ses bénévoles et les arrêtés de mise en péril transmis par les préfectures. 

Il reste évidemment à présent à tirer les conclusions de ces chiffres – et à trouver des solutions pour aider les collectivités, au premier rang desquels les communes, à entretenir ce précieux patrimoine. On rappellera que la Cour des comptes, dans une étude publiée la semaine dernière (lire Maire info du 18 septembre), jugeait que l’entretien du patrimoine classé des collectivités devenait « de plus en plus difficilement soutenable financièrement ». La situation est, forcément, encore plus compliquée pour l’entretien du patrimoine non classé, qui ne dispose pas des mêmes financements.

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