Accessibilité numérique : les 10 sites internet de l'État les plus utilisés bientôt accessibles aux personnes handicapées ?
Mieux vaut tard que jamais ! Trois ans après la proposition du Comité interministériel sur le handicap (CIH), Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la Fonction publique, et Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des (12 millions de) Personnes handicapées, ont annoncé, hier à Montreuil (Seine-Saint-Denis) la signature prochaine, initialement prévue en juillet selon la mission d’information de lutte contre l’illectronisme et pour l’inclusion numérique du Sénat, d’une circulaire sur la mise en accessibilité des dix sites internet publics de l’État les plus utilisés. En 2017, le CIH faisait référence notamment ici aux sites internet caf.fr, pole-emploi.fr, impots.gouv.fr, service-public.fr mais aussi aux applications d’information sur les transports ou les lieux accessibles.
Le texte rappellera « à l’ensemble des membres du gouvernement l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions juridiques et les engagements gouvernementaux d’amélioration de l’accessibilité des démarches en ligne, et détaillant les modalités de suivi de cet engagement ». Le gouvernement estime en France à 20 % la proportion de personnes ne pouvant pas utiliser les outils et services numériques du fait de leur handicap.
Un retard colossal
Il faut dire qu’en la matière, le retard est considérable. Quinze ans après son inscription dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté, le principe d’accessibilité numérique des services de l’État, des collectivités locales et des établissements publics qui en dépendent est très loin d’être respecté. Selon une étude réalisée par Braillenet en mars 2014 sur 600 sites publics et relayée dans le rapport de la mission d’information, seuls 18 % se déclaraient conformes à leurs obligations légales et seuls 4 % d’entre eux présentaient une attestation de capacité. Depuis 2011, pourtant, « le contenu des services de communication en ligne de ces administrations doit être intégralement livrable et intelligible par toute personne atteinte d’un handicap », rappelle dans un rapport, dont Maire info a fait état dans son édition d’hier, la mission d’information de lutte contre l’illectronisme et pour l’inclusion numérique du Sénat.
Cela concerne « l’accès à tout type d’information sous forme numérique, quels que soient le moyen d’accès, les contenus et le mode de consultation, en particulier les sites internet, intranet, extranet, les applications mobiles, les progiciels et le mobilier urbain numérique ». Ce même article précise que la page d’accueil du site en question doit comporter une mention clairement visible précisant s’il est ou non conforme aux règles prescrites en matière d’accessibilité.
De nouvelles règles à compter de demain
À compter de demain, en application de la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016 et du décret du 24 juillet 2019 sur l’accessibilité des services numériques, « tous les gestionnaires de sites internet auront en particulier l’obligation d’afficher dès leur page d’accueil leur niveau d’accessibilité, de publier un schéma pluriannuel de mise en accessibilité et une déclaration d’accessibilité ». Le décret prévoyait, en effet, la définition d’un nouveau référentiel d’accessibilité (4e version du RGAA, lire Maire info du 25 juillet 2019) et étendu ces obligations aux organismes délégataires d’une mission de service public et aux entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 250 millions d’euros annuel en France.
Or, une fois encore, ces obligations, notamment celle consistant à élaborer un schéma pluriannuel de mise en conformité, décliné en plan d’actions annuelles, sont restées « lettre morte », regrette la mission d’information sénatoriale, qui incite les administrations à « utiliser pleinement les ressources du fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) pour rendre accessibles leurs sites et applications internet ».
80 % des démarches en ligne les plus utilisées accessibles en 2022 ?
Les ministres ont confirmé, au cours de ce déplacement à l’école Simplon à Montreuil, « l’engagement pris lors de la Conférence nationale du handicap du 11 février de rendre accessibles au moins 80 % des démarches en ligne les plus utilisées par les Français d’ici la fin du mandat ». Selon l’Observatoire de la qualité des démarches en ligne, seuls 13 % des démarches étaient conformes aux attentes en matière d’accessibilité en avril 2020. La notion de « charge disproportionnée », introduite par décret du 29 juillet 2019, pourrait en être la cause : celle-ci permet, en effet, aux entreprises et administrations de se dédouaner de la mise en accessibilité de leur site internet sous certaines conditions, notamment financières. Les critères de cette charge seraient « trop étendus », selon le Conseil national consultatif des personnes handicapées.
Plusieurs personnes auditionnées par la mission d’information du Sénat ont rappelé, enfin, que « la loi de 2005 prévoyait déjà une obligation d’accessibilité de 100 % des sites des services publics pour 2011 : la loi oblige déjà normalement à ce que l’ensemble des sites de l’État et des collectivités territoriales soient accessibles. Or, c’est loin d’être le cas. En outre, ce chiffre des 80 % ne concerne pas l’ensemble de sites publics, mais les 250 principales démarches. Ce n’est pas la même chose ».
Ludovic Galtier
Télécharger le rapport de la mission d’information sénatoriale.
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