Nouvelle condamnation de l'État pour manquement à ses obligations sur l'hébergement d'urgence
Par Emmanuelle Stroesser
Le CCAS de Bordeaux mettait en cause le fait qu’il avait hébergé des personnes à la rue en lieu et place de l’État, en raison « d’une carence avérée et prolongée dans l’exercice de sa compétence en matière d’hébergement d’urgence du fait de l’insuffisance de ses interventions pour créer des places d’hébergement supplémentaires ». Ce que l’État contestait. Il avait d’ailleurs rejeté les demandes préalables d’indemnisation faites à la préfecture (en octobre 2023 et décembre 2024).
Le tribunal donne, lui, raison au CCAS dans un jugement rendu mardi 4 novembre. Mais en partie seulement.
Un jugement en demi-teinte
Le jugement reconnaît que l’action du CCAS « revêtait un caractère supplétif et ne lui imposait pas de prendre définitivement à sa charge des dépenses incombant dans ce domaine à l’État ». Et qu’il était donc fondé à « rechercher la responsabilité de l’État en raison de sa propre prise en charge de personnes relevant de l’hébergement d’urgence ». En revanche, il estime que « la carence avérée et prolongée de l’État » à accomplir cette mission d’hébergement d’urgence n’est « pas suffisamment » prouvée par le CCAS.
Ce dernier demandait le remboursement de la totalité des sommes engagées pour l’hébergement d’urgence de personnes sans abri entre 2020 et 2023. Soit 125 457,74 euros, correspondant à l’aménagement de 55 places dans une salle municipale ouverte de décembre 2020 à juin 2021 et aux nuitées d’hôtel pour une vingtaine de personnes et familles en 2022 et 2023.
Le tribunal n’enjoint l’État à rembourser que 8 537,82 euros. En ne retenant que le « coût des nuitées pour un couple hébergé à l’hôtel en 2022, ainsi qu’une famille et deux personnes pour l’année 2023, déduction faite des frais liés à leur premier mois d’hébergement ». Le tribunal ne retient donc pas les dépenses engagées par le CCAS pour l’aménagement de la salle en 2020 et 2021. Les preuves versées ne suffisent pas, selon le tribunal, à établir qu’il a été « contraint de prendre en charge pour des durées significatives des personnes n’ayant pas ou plus obtenu de places d’hébergement dans les divers dispositifs gérés par les services de l’État ».
Une deuxième condamnation
Pour le maire de Bordeaux, il ne s’agit pas moins d’une « décision importante pour rappeler urgemment l'État à refonder le système de l'hébergement d'urgence, à le doter des moyens adaptés à l’accueil des personnes et notamment des familles avec enfants », estime Pierre Hurmic, qui insiste sur le fait que « les territoires sont, comme souvent, en première ligne pour garantir notre cohésion sociale ».
Selon la municipalité, en janvier dernier, 392 personnes étaient sans abri à Bordeaux, 245 vivaient dans des bidonvilles et 124 en squats.
Les tableaux diffusés quotidiennement par la préfecture de la Gironde sur le taux d’occupation des places d’hébergement d’urgence montrent, elles, que le dispositif est occupé à 100 %, voire plus.
Prochains jugements à venir
Bordeaux est la deuxième des cinq villes à obtenir un jugement favorable, après Grenoble, en mars dernier, à la suite de leur action engagée en octobre 2023 (lire Maire info du 9 octobre 2023). Trois autres recours – Lyon, Rennes et Strasbourg – sont toujours en cours d’instruction.
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
La Nouvelle-Calédonie confrontée à une crise budgétaire sans précédent
Accès aux services publics : des inégalités qui vont « au-delà des fractures territoriales »
Dans quel cas la commune doit-elle détruire son stock d'enveloppes de scrutin ?








