Nouveau réseau de la DGFiP : bien que satisfaites, les collectivités pointent encore de « nombreuses difficultés »
Par A.W.
Que pensent les élus du « nouveau réseau de proximité » mis en place par la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) depuis 2020 ? S’ils en sont plutôt satisfaits, ils estiment, au regard des nombreuses difficultés qu’ils rencontrent, qu’il y a de larges marges de manœuvre afin de l’améliorer, selon les conclusions d’une enquête de l’AMF réalisée auprès de 1 446 communes et 32 intercommunalités.
Entraînant la fermeture de nombreuses trésoreries partout sur le territoire, la mise en place du nouveau réseau de la DGFiP s’est, notamment, appuyé sur le développement des espaces France services ainsi que sur le réseau de buralistes, accompagné par la dématérialisation.
« Déshumanisation »
A travers cette enquête, l’AMF constate que, si beaucoup collectivités s’estiment « satisfaites » des relations actuellement développées avec les services de la DGFiP, de « nombreuses difficultés » persistent. En cela, elle rejoint les conclusions d’un rapport sénatorial publié en mars dernier et reprenant un travail de la Cour des comptes.
On peut rappeler que ce rapport faisait, notamment, apparaître des « divergences » d’appréciation « entre les communes urbaines et rurales, en particulier sur le maillage territorial du réseau de la DGFiP ». Les communes rurales étaient ainsi bien plus inquiètes de « la fermeture des petites trésoreries locales (...) souvent vécue comme un symptôme du retrait de l’État dans les territoires ».
Parmi les difficultés récurrentes qu’ils rencontrent, les élus interrogés par l’AMF pointent la complexité des procédures, le manque de fiabilisation des bases cadastrales, la surcharge administrative ou encore les difficultés à contacter leurs interlocuteurs, réduits souvent à des « échanges uniquement par courriels ».
Nombreux élus regrettent ainsi l'affaiblissement des « liens personnalisés préalablement créés avec les anciennes trésoreries », pointant une « déshumanisation », si ce n’est un « sentiment d’abandon » face au « désengagement de l’État ».
Sans compter que la restructuration a engendré, selon eux, « la perte d’adaptation des agents DGFiP aux spécificités territoriales » et conduit à « un partenariat dépersonnalisé », sans adaptation « aux particularités liées à la taille de la collectivité ». Les élus déplorent, par exemple, « les règles excessives appliquées » ainsi que « l’utilisation de termes très techniques non connus ou compris par les agents des collectivités ».
Complexité des procédures
Plus de la moitié des collectivités critiquent également « la multiplication du nombre de rejets non justifiés (de certains flux, mandats de dépenses ou titres de recettes), sans un contact préalable, qui aurait pu apporter des solutions et les éviter ».
De la même manière, les élus interrogés se disent aussi en difficultés face au développement de la dématérialisation et dénoncent « la complexité des procédures », « un accompagnement jugé insuffisant » et des « coûts induits » importants. Par ailleurs, des difficultés de recouvrement sont engendrées par la dématérialisation.
Plus globalement, la complexité croissante des procédures agace particulièrement les élus qui les qualifient d’« incohérentes », de « contradictoires » et de « chronophages », ceux-ci pointant aussi « l’allongement des délais de réponse, des délais de prises en charge des mandats et des délais de paiement ». Pour ne rien arranger, « les réponses tardent ou ne sont pas produites » lorsque les DDFiP sont interrogées sur des sujets particulièrement pointus (TVA, crédit baux, explications de taxation...).
Des buralistes appréciés, mais en nombre insuffisant
L’absence et le manque de lisibilité des documents transmis et produits par le comptable sont également « nettement mentionnés » par les collectivités répondantes alors que trois collectivités répondantes sur quatre alertent sur « la nécessité de renforcer la tenue des bases cadastrales et leur fiabilisation ».
S’il est désormais possible de « payer les factures de cantine, crèche, amendes ou impôts en espèces et en carte bancaire dans les bureaux de tabac partenaires partout en France », plus de la moitié des répondants (56 %) indiquent cependant que le nombre de ces buralistes doit « être étendu ».
Si le travail des buralistes est « apprécié », leur nombre est toujours « insuffisant », à leurs yeux, pour compenser la fermeture des services de proximité, soulignent les auteurs de l’enquête.
Alors que l'accessibilité aux services financiers pour les populations éloignées du numérique reste un « enjeu majeur », les collectivités préconisent donc « d’augmenter le nombre de points de contact permettant aux administrés, et plus particulièrement aux populations éloignées des moyens de paiement dématérialisés, de payer leurs créances ».
De la même manière, le nombre de conseillers aux décideurs locaux (CDL) doit aussi être revu à la hausse, selon les élus qui les considèrent comme des interlocuteurs appréciés. Seulement les engagements quant à leur nombre n’ont pas été tenus, rappelait en mars dernier le rapport sénatorial. Concrètement, si « 1 200 conseillers étaient promis d’ici 2025, la cible a été revue à la baisse, à 993 CDL », notait ainsi le rapporteur.
Budget 2025 : nouvelle baisse des effectifs DGFiP
Reste que, malgré les difficultés, les communes et leur intercommunalité souhaitent que « la DGFiP reste leur partenaire privilégié pour assurer un service public efficace et de proximité ». Et l’AMF de rappeler que « le maintien de la qualité du service est un enjeu d’actualité pour les maires, à l’heure où le PLF pour 2025 prévoit une nouvelle baisse des effectifs de la DGFiP, administration qui a déjà vu ses effectifs baisser de 30 000 (postes) depuis 2008 ».
Afin d’améliorer leur relation avec la DGFiP, les élus proposent donc « d’augmenter le nombre de conseillers aux décideurs locaux » afin de garantir un meilleur accompagnement des élus. et de « redynamiser les relations en réinstaurant un dialogue plus direct et personnalisé avec les services locaux de la DGFiP ». Elles souhaitent notamment « maintenir ce lien privilégié » pour les missions de conseil et d’accompagnement.
Les communes et intercos suggèrent également de renforcer l’accompagnement technique, « en particulier pour les petites communes, souvent confrontées à une surcharge de travail induite par les nouvelles procédures », mais aussi « d’améliorer la mise en œuvre de la dématérialisation en améliorant la lisibilité des documents et en supprimant certains coûts jugés pénalisants, comme les commissions sur les paiements par carte bancaire ».
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